Algérie

Francophonie 2017



Francophonie 2017
Dans le cadre de la Semaine de la francophonie qui s'est tenue du dimanche 19 au samedi 25 mars 2017, les ambassades de France, du Canada, de Suisse, de Croatie, de Pologne, et la délégation Wallonie-Bruxelles, avec l'appui de l'Institut français d'Algérie ont organisé un concours d'écriture sur le thème : «J'ai carte blanche pour embellir votre ville/quartier». Voici les textes des lauréats.Premier prix ex aequo : Hammou Issad 22 ans , Tizi Ouzou Je me suis toujours demandé à quoi servaient les villes 'Ces fourmilières où les gens attirés par une gravité humaine irrésistible viennent s'agglutiner au milieu de la flétrissure ; progéniture de nos sociétés auto-lytiques. Là, s'entrechoquent idéaux et aspirations pour être engloutis dans le maelstrom citadin, uniformisés par le moule des codes sociétaux et rapiécés par les strictes lois de la civilisation. Pourtant, ce n'est qu'une utopie lointaine qui se dessine dans ce concept urbain. Au fond, des fissures invisibles existent entre chaque individu, famille ou quartier, des ghettos de pensées se forment, récurrences imparfaites des vies solitaires de nos ancêtres. Les agglomérations inspirent l'image des regards glaciaux, de la pollution et de la routine écrasante. On y voit la lutte des classes creuser ses tranchées et l'environnement être bafoué jusqu'à la relégation aux confins des soucis humains.Alors parfois, accoudé à mon balcon, le regard écartelé entre les lumières de la ville et celles des étoiles, je me vois pourfendeur des cieux et réconciliateur de la terre et du firmament? pourquoi ne pas briller plus 'Je dessine de mes espoirs une ville où chaque terrasse abriterait un potage fécond en légumes frais, au-dessus des immeubles se dresseraient des panneaux solaires et les immondes paraboles seraient remplacées par des éoliennes qui alimenteraient les foyers en électricité.La plus grande force des hommes n'est pas de demander toujours plus mais d'apprécier ce qu'on a. Ainsi, les espaces verts devraient tapisser les quartiers et aérer ma ville, afin d'en faire un lieu de vie et non un simple dortoir insipide. Je ferai la promotion des vélos et des skateboards, tout en développant un transport en commun fiable, je me vois déjà souffler sur le nuage de pollution qui nous surplombe.Quand aux déchets, ces reliques de la surconsommation, je ferai en sorte qu'ils soient trillés et recyclés, afin de limiter notre impact sur la terre.Je finis mes pensées nocturnes en pensant à tout ce que je changerais si j'avais le pouvoir d'influencer les gens, puis je jette ma poubelle à partir de mon balcon et je rentre.Alors, regrettant mon geste et maudissant mon soi-disant inconscient, je me rends compte que je devrais changer, moi? que tu devrais changer aussi, toi. Premier prix ex aequo , Nabila Rabah 21 ans , Aïn TémouchentIl y a cette fille au deuxième qui tente désespérément de m'écrire un texte parce que je ne sais quels gugus lui ont donné carte blanche pour m'embellir. Allez savoir pourquoi ce ramassis d'insécurités s'acharne sur moi.Déflorer du papier est un peu sa manière de faire taire son sentiment d'insuffisance.Tous les deux, nous avons une chose en commun : l'abandon nous fout les pétoches.Mes bâtards d'enfants s'empressent de me déserter ou y aspirent, seulement pour mieux me regretter. Les yeux scotchés au ciel comme des paraboles ankylosées, ils se disent que derrière mes bâtisses affaiblies, qui puent le giclement de vessies et l'humidité, les jours doivent être meilleurs. Et dans cette ingratitude propre à ces corniauds d'hommes, ils oublient que je les ai cajolés du temps des dents de lait, de la morve pendante, où cette sale race de mômes rampait mes flancs de bitumes effrités. Pour ensuite devenir boutonneux, mal branlés, jouant à la roulette russe avec le destin ou jeunes filles chaloupant du derrière en djellabas étroites. Avec des géniteurs tyranniques mais baltringues, traînant leurs chibanis qui, comme disait Brel, ne parlent plus.C'est ici qu'ils rient à s'en perforer les poumons, s'entaillent les joues de sourires. Célèbrent l'anodin. S'embrassent tous les jours comme si c'était l'Aïd. Se donnent même ce qu'ils n'ont pas. On dissout ses malheurs dans tout ce qui est à portée de main, sous mes lampadaires bigleux ou mes cages d'escalier. Les déceptions sont moins austères parce que le voisin du dessus compatit. L'ennui devient chaleureux quand il distribue les cartes, partage ses clopes. On veille sur les siens derrière les étendards de linges entre deux commérages. Les deuils sont maladroits, parce qu'on ne peut pleurer ceux qui n'existaient même pas.Ça gueule de partout dans une cacophonie devenue hymne et presque motet.L'autre godiche peut se mettre son texte là où je pense ! Je n'ai pas besoin de peinture fraîche, de nouvelles balançoires, ni même qu'on remplace ces jeux vandalisés dans le square, parce qu'ici voyez-vous, quand on aime quelque chose on l'use, l'abîme. On souille pour assainir. L'amour vert blanc rouge est le plus morbide des masochismes.Je suis un quartier populaire de l'Oranie frivole et insouciante. Je schlingue la vie, et il n'y a rien de plus beau que ça. Deuxième prix , Djamil Chakali 23 ans , BlidaBlida, surnommée «Ville des roses» ; roses, qui parfumaient jadis chaque coin de la Médina, se font aujourd'hui aussi rares que l'eau dans le désert. Afin que cette ville reporte bien son nom, j'encouragerai les citoyens blidéens à planter des fleurs devant leur porte ; l'opération se nommera «un citoyen, une rose ». Celle-ci participera non seulement à la renaissance de son âme d'antan, mais développera également un esprit écologique, principalement chez la nouvelle génération et prendra part ainsi à leur éducation ; cette initiative verte pourrait être la «révolution des roses» algérienne, inspirant volontiers d'autres régions à fleurir.Ma ville, où musulmans et juifs confondus d'Ibérie trouvèrent refuge lors de la « Reconquista» espagnole, apportant avec eux la musique andalouse, sous forme de 24 pièces musicales nommées «nouba». Hélas, à ce jour, il n'en reste plus que 12 connues. Je les numériserai afin de sauvegarder ce patrimoine transmis jusqu'à présent de bouche à oreille.Pour le perpétuer, ces dernières seront enseignées aux jeunes écoliers et seront jouées lors des fêtes locales et nationales sur les places publiques où des statuts de musiciens ayant marqué l'histoire de la ville ou «cheikhs» seront construites, redonnant à cette région son authenticité andalouse.Ma cité, ancienne Médina nommée «El bled», était jadis fortifiée d'un grand mur autour d'elle, contenant sept portes monumentales construites par les Ottomans. Ces dernières furent rasées à l'arrivée de la France mais je les ferai renaître de leurs cendres, tout en les décorant de roses de toutes les couleurs ; quant au mur, je le reconstruirai... avec des cèdres déplacés directement des montagnes de Chréa, cet atlas à partir duquel ils surplombaient la ville. Un nombre maximal d'arbres sera planté linéairement entre chacune des sept portes de sorte que le mur existera de nouveau, symboliquement et sera naturellement vert.Ainsi, j'espère faire d'elle, ma petite rose, le jardin d'Eden de la Mitidja. Troisième prix , Alyssa Boutnaf 15 ans , AlgerDe nos jours, nous souffrons quotidiennement de la pollution sous toutes ses formes, notamment de la pollution visuelle, confortablement installée dans nos villes et quartiers. Ces derniers sont devenus, en raison du manque d'intérêt de leurs habitants, tristes et sans âme. Ceci dit, si j'avais carte blanche pour embellir mon quartier, et si j'avais le pouvoir de changer les choses, je n'en ferais pas une initiative individuelle, mais un projet dans lequel j'impliquerais tous les habitants de mon quartier, grands et petits, car notre environnement est -ou devrait être- une préoccupation commune.Le problème le plus récurrent étant celui des ordures ménagères s'amoncelant même aux abords des poubelles, je consacrerai, pour ma part, des bacs pour le compostage, ce qui réduirait leur impact environnemental négatif, tout en diminuant le poids des déchets.Dans la répartition des tâches, les femmes auraient pour mission principale le tri de leurs ordures ménagères, où elles mettraient tous leurs détritus naturels biodégradables (fruits ou légumes avariés, épluchures ou autres) dans les bacs de compostage pour en faire un engrais bio, que nous utiliserons, ensuite, pour nourrir la terre de nos jardins. Un geste simple mais de grande portée éco-citoyenne.Les hommes, de leur côté, se verraient chargés du jardinage, à travers la plantation d'arbres, plantes, fleurs? ce qui donnerait à notre paysage une touche de couleur, de verdure et? un second souffle.Enfin, une fois par mois, j'initierai une journée éco-citoyenne, durant laquelle serait privilégié un geste éco-responsable simple comme reconnaître les produits de jardinage toxiques voire nocifs pour l'environnement et la santé, le recyclage des objets dangereux, etc. Outre la dynamique de quartier qui pourrait être créée, une telle action renforcerait les liens entre les membres de la communauté mais surtout permettrait à tous de vivre épanouis dans un espace aussi beau que sain.Enfin, je terminerai par cette phrase de Ghandi qui pourrait être mon slogan : «Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde.» Quatrième prix , Aïmen Laihem , 18 ans Alger Je ne vais guère m'en cacher, lorsque j'ai lu l'intitulé du sujet de la rédaction, je n'étais pas trop enthousiaste. Je vais vous l'avouer, ce thème est rébarbatif à la longue, car du haut de mes dix-huit printemps, c'est toujours la même rengaine dans nos examens ou nos devoirs de collège, lycée ou même université ! L'approche du sujet, on ne peut plus sérieux, est à mes yeux stérile : proposez des alternatives et des idées pour rendre meilleur votre environnement... Pour ma part, c'est encore et toujours les mêmes propositions que je répète dans toutes mes rédactions sur le sujet ; c'est barbant à la fin et je dirais inutile même ! Parce que, pour aborder un sujet d'une si grande importance, il faudrait s'y prendre autrement, non pas par faire preuve de spéculation intellectuelle et paroles sans action, mais plutôt par un changement dans les m?urs. Pour embellir mon quartier, je crois qu'il faut intégrer dans l'éducation des générations futures le principe indéfectible de l'inacceptation des déchets.De nos jours, nous consommons par excès, et ce n'est que par inadvertance regrettable que nous nous rendons compte de notre gaspillage intensif à outrance. Il faudrait introduire dans nos têtes et dans celles des autres l'idée que c'est justement inconcevable que de gâcher ne serait­-ce qu'une miette de pain et faire passer cet acte à l'ordre du délit. Aussi, il serait grand temps de nous mettre bien en tête que le fait de larguer quelques minimes ordures n'importe où soit passible de graves réprimandes. Je voudrais que quiconque laisse s'échapper d'entre ses doigts un papier froissé ressente une culpabilité pesante qui le poussera à s'abaisser pour reprendre son débris et le jeter dans un endroit approprié. Pour conclure, je crois dur comme fer qu'en remaniant nos façons d'approcher ce sujet, nous parviendrons à vraiment embellir nos villes et rendre cet enjolivement valable pour toujours et non pas temporaire, car, aujourd'hui, il ne suffit plus de marteler à chaque porte que le gaspillage et les détritus, c'est mal ! Non, nous voyons le fruit de cette approche : le néant ! Désormais, il faut agir tant qu'il en est encore temps et avant que la moisissure qui sévit dans nos têtes ne devienne pourriture ! Alors, commençons ! Cinquième prix ,Daya Fatma-Zohr Abed , 16 ans , AlgerDangerosité, saleté. Ces deux mots sont malheureusement le reflet de l'endroit où je vis. Dangerosité, car n'ayant pas d'endroits adaptés, beaucoup risquent leur vie lorsqu'ils sortent prendre l'air. Saleté, paquets de chips, papiers froissés, ces choses polluent, pourrissent la terre que l'on foule et l'air que l'on respire?Mon quartier a de nombreuses possibilités pour être beau. Malheureusement, les habitants ne font rien pour, bien qu'ils en aient les moyens. En supposant que j?aie les pouvoirs de l'arranger à ma façon, tel un joueur de SimCity, ayant l'omnipotence de réaliser ce qu'il souhaite sur une ville virtuelle, je procéderai comme il suit :En premier lieu, je rassemblerai des bénévoles pour faire un grand nettoyage de printemps ?même si ce n'est pas la saison. Chaque petit déchet et chaque petite ordure tomberont dans les mailles de mon filet.Une fois le nettoyage fait, des poubelles installées à la vue de tous, je me lancerai dans la reconstruction des routes. Beaucoup d'accidents surviennent à cause d'un trou impromptu, et beaucoup de piétons sont décontenancés, ne sachant pas où marcher, les trottoirs étant trop étroits. L'opération sûreté fera en sorte d'agrandir les trottoirs, de bitumer les routes et de mettre des panneaux ainsi que des feux de signalisation, indiquant les sens de circulation. Comme son nom l'indique, cette opération vise à optimiser la sécurité routière, surtout vis-à-vis des enfants, qui passent beaucoup de temps dehors?Cela me fait une transaction toute faite vers le troisième point que je veux aborder, la création d'espaces verts, de petits parcs, d'aires de jeu, de divertissement, pour tous les âges. Je veux que petits et grands puissent s'amuser en toute insouciance, qu'ils puissent avoir des endroits leur étant dédiés, que les enfants, aimant jouer, sauter, courir partout, puissent le faire sans avoir une épée de Damoclès au-dessus de la tête, qu'ils puissent vivre la naïveté que leur âge oblige, sans s'inquiéter des possibles dangers. J'aimerai, que les personnes âgées, puissent se retrouver à profiter d'un banc au milieu d'un parc fleuri, que ces personnes puissent se reposer en toute quiétude et converser avec leurs pairs de la pluie et du beau temps, leur vie devant être, à présent, un long fleuve tranquille?Sûreté, propreté. Ces deux mots seront fort heureusement le reflet de ce que sera mon quartier après mon passage éclair. «Prix du jury» Hala Fennouche , 16 ans Annaba«On ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa famille. On ne se choisit même pas soi-même.» Et je rajouterai : «On ne choisit même pas le quartier où on naît.»Au collège, le sentiment de honte me poursuivait à chaque fois que je devais écrire ou donner mon adresse. J'avais honte de mon quartier pauvre, j'étais mortifiée d'avouer que mon père et tous nos voisins ne pouvaient offrir à leur progéniture des murs en béton.Au lycée, cette peur s'estompa, lorsque je commençais à fréquenter la bibliothèque, et le Le fils du pauvre me convertit, je fus mue par une forte ambition de changer notre destin, de croire en un avenir différent de celui de nos parents.Un jour, en accompagnant ma copine dans son quartier chic, j'aperçus que leurs poubelles regorgeaient de plastique, verre, papiers et boîtes de conserve. J'ouvris grand les yeux, esquissant un sourire, car dans mon quartier, nos poubelles étaient presque vides. Nous ne jetions presque rien. Etions-nous radins ou peu consommateurs ' Eugène Poubelle n'aurait jamais été reconnu comme ingénieux chez nous !La vision du tas de déchets stimula mes neurones et le soir même j'envoyais les garçons de mon quartier apporter «une liste» de ces détritus. Et comme l'art de la récupération et de la débrouille est très développé chez nous, nous réussîmes à fabriquer du beau avec du vieux ! Je dirai même qu'Antoine Lavoisier était né dans notre faubourg.Des sacs, des bijoux en CD, des meubles en carton, des pots, des patchworks? furent confectionnés grâce à la dextérité, au savoir-faire et à l'ingéniosité hérités de nos parents. Nous ouvrîmes notre boutique «Recup'Art» qui en séduisit plus d'un et l'argent collecté servit à bâtir des murs en pierre ornés de fresques fraîches, des airs de jeu et détente accueillirent nos clients.Ainsi, les déchets devinrent notre source de richesse et nous redoublâmes d'efforts lorsque nous apprîmes que nous participions à la protection de l'environnement, nous allégions les décharges publiques qui empoisonnent l'atmosphère, le sol et les cours d'eau. Nous participions à notre petite échelle à l'équilibre écologique et à la sauvegarde de notre belle Terre.


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