Algérie

Franck Laval. Président de l'ONG Ecologie sans frontières : La plupart des pirates somaliens sont d'anciens pêcheurs



Franck Laval. Président de l'ONG Ecologie sans frontières : La plupart des pirates somaliens sont d'anciens pêcheurs
D’après Franck Laval, les pirates somaliens sont d’anciens pêcheurs ruinés par la surpêche au large de leurs côtes. Privés de leurs ressources naturelles, ils n’auraient pas eu d’autre choix que de tomber dans la piraterie.

- Quelles sont les origines de la piraterie en Somalie ?

On est parti d’un constat simple. Il y a eu en Somalie un pillage phénoménal des ressources en poissons des années 1970 jusqu’au milieu des années1990. La Somalie était alors une des eaux les plus poissonneuses du monde et une grande partie de sa population vivait de la pêche. Ce pillage a été fait par des bateaux-usines soviétiques, japonais, norvégiens, mais aussi européens. A cela, il faut ajouter le rejet de flux radioactifs dans la mer, transformant les eaux somaliennes en une sorte de poubelle géante. Les bancs de poissons ont donc été complètement laminés, tout cela sous les yeux impuissants des pêcheurs somaliens. Bien que ruinés et privés de leurs ressources ancestrales, ces pêcheurs avaient toujours leurs bateaux à disposition. Lorsque la guerre civile est arrivée, au début des années 1990, ils se sont progressivement tournés vers des activités de piraterie pour survivre ou obtenir des rançons finançant les milices armées. La piraterie somalienne est donc le résultat d’un ensemble de choses : le pillage environnemental a provoqué une catastrophe sociale, qui elle-même a poussé une partie de la population à se lancer dans des actes de piraterie.

- La majorité des pirates somaliens serait donc d’anciens pêcheurs ?

Oui, tout à fait, une bonne partie d’entre eux sont d’anciens pêcheurs ou fils d’anciens pêcheurs. Ils sont socialement désœuvrés et en manque de ressources. Il leur reste simplement leurs vieux bateaux et en profitent pour en tirer le maximum. A la fin des années 1990, ces gens ont sombré dans la pauvreté après avoir eu un niveau de vie correcte. Ils ont connu une véritable descente sociale, un choc psychologique et moral important. Il n’est donc pas étonnant qu’ils tentent n’importe quoi pour sortir de la misère. C’est un peu comme dans un quartier où tout le monde serait au chômage. Si des dealers arrivent et proposent de se faire de l’argent facile, les gens répondront «oui pourquoi pas».

- S’agit-il de groupes autonomes ou de réseaux organisés ?

Au début, les pirates n’étaient pas du tout organisés. Ils se lançaient à l’attaque des navires étrangers à bord de leurs anciens bateaux de pêche simplement pour pouvoir manger et améliorer leurs conditions de vie. Progressivement, des groupes criminels organisés se sont constitués, profitant de la misère sociale environnante pour recruter leurs troupes. Aujourd’hui, les pirates somaliens sont un peu plus équipés. Ils ont de grandes vedettes qui leur permettent d’agir rapidement. Cela dit, certains continuent les raids à bord de petits bateaux avec des moteurs moyens. La piraterie leur rapporte sûrement plus que la pêche, mais ce n’est pas complètement sûr. A l’époque, les pêcheurs somaliens gagnaient plutôt bien leur vie.

Benjamin Roger


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