Algérie

France, « la peur va changer de camp » !



«La peur va changer de camp », a dit Emmanuel Macron cité par le Parisien de mardi, sans que cela provoque outre mesure de réactions ! En mars 1994, quand l'ex-Premier ministre, le regretté Reda Malek avait prononcé presque les mêmes mots aux obsèques d'Abdelkader Alloula à Oran, cela lui avait valu des tonnes de commentaires à charge dans les médias français. Des spécialistes du fait islamique s'en étaient alors servi pour minimiser la responsabilité des groupes islamistes armés et imputer les exactions et violations des droits de l'Homme ? il y en a eu, il ne faut pas le nier ? entre 1994 et 1998, exclusivement ou presque, aux forces de sécurité !Cet odieux assassinat d'un enseignant français par un islamiste d'origine tchétchène a quelque chose de déjà vu, en Algérie. Rappelons-nous : l'enseignante Fatma-Zohra O, tuée le 11 février 1995 à El-Biar, de Khedidja Aïssa professeur et chercheur à l'INRA d'Alger (Institut national de recherche agronomique), assassinée le 26 février 1995 en plein Ramadhan, trois semaines après l'assassinat d'Ali Mansouri, professeur à l'Ecole polytechnique d'architecture et d'urbanisme d'Alger devant chez lui à Bab Ezzouar ' Ou de celui de Ratiba H., le 22 avril 1995, elle aussi enseignante à l'Ecole polytechnique d'architecture et d'urbanisme, d'Ourida C., professeur de français, tuée devant ses élèves dans un collège de la banlieue de Blida en avril 1995 quelque temps après que l'émir du GIA Cherif Gousmi avait décrété l'interdiction d'aller à l'école sous peine de mort '
Et ce, sans compter l'horrible tuerie de ces onze enseignantes commise un samedi 30 septembre 1997 à Sfisef (Bel Abbès) ou l'assassinat devant ses élèves, quatre mois plus tôt, de Djaffar Ouahioune, professeur de mathématiques, le 10 mai 1997 au lycée Ath Yenni !
Le meurtre de cet enseignant en France n'est donc pas un acte à minimiser sous prétexte qu'il a utilisé pour thème de son cours sur la liberté d'expression des caricatures jugées attentatoires à la foi. Cette affaire, qui s'est déroulée dans un collège de la banlieue parisienne, aurait pu être réglée localement, sans bruit. Mais ce n'était pas l'intention de Abdelhaq Sefrioui, proche du parti islamiste PJD marocain, et de ses complices islamistes. Sinon pourquoi ce parent d'élève a balancé une vidéo basée sur le témoignage de sa fille, élève dans ce collège, alors qu'elle était absente le jour où cet enseignant a montré les caricatures. Eh bien, même s'il n'y a pas de lien avéré entre ce témoignage amplifié par les réseaux sociaux et l'assassin, il n'en reste pas moins que cette affaire est le parfait exemple d'instrumentalisation de l'Islam à des fins n'ayant rien à voir avec la religion, mais conduisant à dresser des non-musulmans contre des musulmans que le hasard de l'Histoire a conduits à s'installer en Europe.
Le résultat est aussi qu'il a permis à des Marine Le Pen et des Eric Zemmour, à court d'arguments pour justifier leur haine contre l'immigré musulman et leur théorie de la guerre de civilisation, de rebondir sur cette affaire et de donner libre cours à leur venin xénophobe et raciste.
En Algérie, malgré la décennie noire, il ne faut pas se mentir, le pays n'est pas à l'abri. Car, c'est au nom de cette même vision politico-idéologique de l'Islam visant à codifier le quotidien des Algériens, à normativiser la vie sociale dans une sorte d'autosurveillance, incitant les voisins à se surveiller les uns les autres, à montrer du doigt celui qui enfreint les règles édictées par des hommes qui veulent prendre en otage 43 millions d'Algériens à des fins de pouvoir, que l'on assiste aujourd'hui à toutes sortes de dérives rappelant la fin des années 80.
En atteste le crime abject de la jeune Chaïma qui a certes suscité une grande émotion, mais qui a aussi donné lieu à un déversement, en toute impunité, de propos inadmissibles sur les réseaux sociaux de la part d'individus agissant ? quel courage ! ? sous anonymat total. Au lieu de dénoncer ce crime, d'héroïques anonymes ont excusé le geste de leur auteur, au nom de cette même idéologie qui a légitimé l'assassinat de plus d'un millier de femmes entre 1993 et 1997.
Pour conclure, on terminera sur ce propos du regretté Mohamed Boudiaf, qui a payé de sa vie son franc-parler. Paraphrasant Saad Zaghloul (décédé en 1927), l'un des pères du nationalisme moderne égyptien, Mohamed Boudiaf déclarait : « La mosquée est à Dieu et la patrie à tous .» À jeudi.
H. Z.


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