Algérie

France-Algérie



Mémoires et pressentiments des ancêtres   N’est-ce pas cela qu’il faut aujourd’hui réparer? N’est-ce pas de là, et de cela, que peut naître l’irréparable? Il faut réparer afin que plus jamais Français et Algériens ne s’entretuent. Cela s’étant déjà produit, cela peut encore se reproduire si l’on y prend garde. Nous avons été enfants d’un même pays et avons parlé la même langue.   Citoyen d’une même Ré-publique, nous avons eu la même nationalité. Et malgré tout ce qui nous unissait, les forces du mal ont voulu nous asservir et ont fait naître en nous la haine, justifiée, du colonialisme. Alors de ce qu’il nous a été enseigné, on a pris l’intelligence française de la légitime défense, pour l’opposer au colon et sa force armée, jusqu’à épuisement de ses capacités de résistance, et ainsi l’on a forcé la République française à nous rendre notre liberté. Et il s’est confirmé que ce n’est pas celui qui gêne qui s’en va, mais celui qui se trouve gêné. L’interprétation est aussi simple que cela pour ceux qui cherchent la paix, l’entente et l’amitié, quant aux autres il ne m’intéresse pas d’en parler ici. Et puisque la sincère et authentique réconciliation se cherche avec la tête et se fait avec le cœur, posons-nous la question de savoir, qu’en est-il aujourd’hui, dans un pays comme dans l’autre, des victimes civiles de la guerre d’Algérie, pour ne pas dire victimes civiles du colonialisme, orphelins et veuves? «Enfants et veuves de chouhada» et «Enfants et veuves de harkis», s’entend. La réconciliation d’ordres historique, humain et moral, exige que l’Etat français reconnaisse que la guerre faite à l’Algérie est une erreur dont il s’excuse auprès du peuple algérien. Il n’y a aucune honte à s’excuser auprès du peuple auquel la France a toujours dit vouloir le bien. Ainsi, et seulement ainsi, la France le prouvera et retrouvera le respect qui la grandira dans les cœurs et l’esprit de ceux et celles dont les parents ont été victimes de cette guerre absurde, et ainsi le respect et l’amour seront rétablis et renforcés. Et de par ce geste, le prestige de la France sera rehaussé. Ce sera là aussi un acte de foi, digne d’un pays dont le peuple et la civilisation attestent de leur croyance en Dieu. Nous avons un devoir sacré vis-à-vis des pauvres, des veuves et des orphelins. Le problème des enfants drainés par la mouvance de l’Algérie française, doit être réfléchi dans la seule pensée de la sagesse. Déjà en 1991, alors qu’il était maire de Paris, Monsieur Jacques Chirac posait la question de savoir «qu’a fait l’Algérie depuis 1962 vis-à-vis de cette catégorie sociale» avant de répondre: «L’Algérie aurait dû, dès le cessez-le-feu, en 1962, récupérer les enfants des harkis, brebis égarées.» «Cette communauté, à l’heure actuelle, disait-il, constituerait un lobby très puissant pour faire entendre la voix de l’Algérie» (Quotidien d’Algérie du 30/06/1991). Bien sûr, si cela avait été fait en son temps, cette question ne se poserait plus en ces termes, et nous en serions réellement, aujourd’hui, au traité d’amitié dans son sens le plus concret et dans toute sa simplicité. Mais ne voilà-t-il pas que le ciel de l’entente et de l’amitié est assombri par des oiseaux de mauvais augure, ne voilà-t-il pas que les nostalgiques de l’empire colonial, dans d’ultimes et dernières convulsions d’un agonissant, tentent de faire reluire le blason de la colonisation, en déclarant que celle-ci a eu un rôle positif en Algérie? Mais, tonnerre de Dieu! Y a-t-il au moins un pays dans le monde qui a été colonisé et qui puisse dire que la colonisation lui a été positive? A moins qu’il ne soit fou à lier. Y a-t-il un seul être au monde qui puisse admettre d’être colonisé et dire du bien de la colonisation ? Il serait fou dangereux pour lui, et pour les autres. Heureusement, il n’est jamais trop tard pour bien faire. C’est pourquoi, il faut en urgence enclencher les rencontres et le dialogue entre les deux franges de victimes civiles de la guerre d’Algérie, d’ici et de là-bas. De même qu’il est nécessaire que, dans les deux pays, se développe un discours de fraternité, contre la méchanceté et la haine nées d’interprétations erronées de faux barrages entre les uns et les autres, pour fausser les rapports et faire valoir des fantasmes, depuis déjà très longtemps morts et enterrés. Morts et enterrés, puisque le monde entier sait, maintenant, que le combat de libération du vaillant peuple algérien était juste, et que le tort était du côté de la France coloniale. Et fort heureusement, de vaillants, braves et honorables Français ont su sauver leurs pays du bourbier de «l’Algérie française». Et le maintiennent fort justement, contre vents et marées, dans le bon sens de l’humanité et ce, non seulement pour le bien de la France, mais aussi celui du monde entier, dans lequel la France a un très grand rôle à jouer, avec une mission humanitaire à nulle autre pareille, puisqu’elle se doit de faire profiter ce monde de son expérience, en faisant barrage aux injustices, toutes les injustices. Et pour cela, la France ne se doit-elle pas de concilier ses anciennes colonies, pour en faire, non pas des sujets, mais des partenaires à part entière, associés égaux en droit et en devoir, au même niveau qu’elle? La grande mission civilisatrice de la France, n’est-ce pas maintenant qu’elle doit l’entreprendre, avec ses ex colonies devenues souveraines, et qui doivent devenir ses principaux alliés, dans les défis du 3e millénaire, qu’elle a relevé face aux autres rivalités ? C’est aussi pour cela que la France doit prêcher d’exemple et reconnaître ses propres torts, avant d’exiger des autres qu’ils le fassent, et afin d’être en droit d’imposer aux égarés d’ailleurs de reconnaître les leurs. Ce n’est pas une leçon de morale qui est faite ici, c’est un appel à la raison et à la sagesse, afin de racheter la place dans notre esprit et dans nos cœurs. Le monde a encore besoin de cette France libre, égale et fraternelle. Oui, le monde a encore besoin de cette nation pour indiquer le juste chemin du pardon, de la repentance et de la réconciliation, afin que «Liberté, Egalité, Fraternité», se conjugue avec la triple vérité «historique, humaine est morale» de ceux et celles qui ont souffert de cette occupation coloniale qui a duré cent trente deux ans. Etant certains que nulle personne sensée ne peut nier la grandeur du sacrifice suprême des Martyrs, Chouhada de la libération, l’Algérie peut redevenir le pays de tous ceux qui y ont un lien et qui lui veulent le bien, car c’est le pays de tous les hommes épris de paix et de justice, et tous y sont les bienvenus. L’Algérie a besoin de tous, et plus particulièrement de ses enfants qui, pour une raison ou une autre, se trouvent éloignés d’elle, et nul n’est coupable de l’erreur des autres, nul n’est répréhensible pour les fautes de ses parents. Alors ensemble, pour le respect de nos origines et de nos ancêtres, il nous faut construire une Algérie, juste, prospère et fraternelle, capable d’engendrer des citoyens dignes des sacrifices consentis pour sa libération. Bien sûr que certaines cicatrices restent encore douloureuses, il faut le reconnaître et le respecter, mais au-delà de tout, il faut, tant que faire se peut, faire la paix avec l’esprit et pardonner avec le cœur. Et si l’on doit se remémorer les méfaits de la guerre, il faut toujours que ce soit par souci de vérité et de justice, et non par haine ou envie de vengeance. C’est à ce seul prix que l’on aura été à la hauteur des sacrifices de nos parents, de tous les sacrifices. «La vérité n’a pas d’heure, elle est de tous les temps précisément lorsqu’elle nous paraît inopportune.» ( Albert Sweitzer) Quant à nous, nous agissons par conscience et non par consignes, et au service de cette cause nous sommes d’une servitude volontaire. Et vive la France du repentir et l’Algérie du pardon !   * Attaché de recherche (Formation ICOM) Ex-directeur de centre culturel Moudjahid, fils et frère de chahid


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