Algérie

Fragilité des correspondants



Une étude publiée par le numéro 19 (janvier-juin 2005) de la Revue algérienne de la communication de l?Institut des sciences de l?information et de la communication (Isic) d?Alger tente d?établir une cartographie de la situation des correspondants locaux et régionaux de presse en Algérie. L?enquête, menée en 2004, a touché 273 journalistes dans 7 wilayas, sur un ensemble de 350 ciblés. Le corps comporte 19% de femmes, soit 54 sur 219. Les pourcentages féminins sont les plus faibles à Béjaïa et à Boumerdés, alors que Tipaza connaît une sorte de parité. La tradition, la croyance que les femmes ne travaillent que dans des secteurs bien définis (santé, enseignement), l?instabilité financière et le risque seraient des facteurs pour expliquer cette faible proportion. Plus de 60% travaillent pour la presse francophone et 39,19% pour la presse arabophone, alors que 0,73% seulement travaille en langue amazigh pour le même journal. L?ensemble des correspondants reste une corporation jeune : 62% ont moins de 35 ans et 2,94 % plus de 50 ans. A noter que, selon l?étude, plus de 41% des correspondants ne sont dans le secteur que depuis 3 ans. 29% ont plus de dix ans de métier. Manque de couverture sociale Les universitaires restent peu représentés : plus de 25% n?ont aucun diplôme universitaire et 60,44% d?entre eux n?ont pas suivi de formation de journaliste. 48,72% des correspondants ne font pas de leur métier de journaliste leur première source de rémunération, la première place étant tenue par les wilayas d?Oran, de Tizi Ouzou et de Béjaïa. La majorité travaille dans l?éducation, plus particulièrement dans l?enseignement des langues arabe ou française, ou en histoire-géographie. Une bonne partie, souligne encore l?étude, travaille dans les administrations locales et utilise même, des fois, les moyens de ces structures (fax, téléphone, etc.). Ce qui pose la question de l?indépendance vis-à-vis des autorités locales. L?autre donne inquiète également : 58,60% des correspondants sont rémunérés en dessous du SNMG, qui est fixé, lui, à 10 000 dinars/mois. Autre inquiétude : 57,88% des journalistes correspondants ne bénéficient d?aucune couverture sociale. Même si une importante proportion travaille avec les journaux sous forme de collaboration, une bonne partie n?y est pas déclarée à la Sécurité sociale, ce qui pose une problématique sérieuse en termes de législation du travail, des conditions sociales et de fragilisation du statut qui se répercutent sur le contenu des articles. 60,08% des correspondants disent s?imposer l?autocensure dans leur travail. Règne de l?autocensure Les raisons seraient multiples : peur des risques encourus, appréhension de voir que leurs articles ne soient pas publiés et la perte de privilèges pour certains correspondants travaillant également dans l?administration ou dans l?enseignement. L?éloignement de la capitale accroîtrait également les appréhensions des journalistes locaux et régionaux. Plus de 87% travaillent pour la presse privée. Nuance : la presse publique semble plus intéressée par des wilayas comme Oran et Tizi Ouzou, où l?on compte le plus grand pourcentage de correspondants des titres gouvernementaux. L?étude conclut que le discours sur la liberté de la presse en Algérie ne peut être développé sans être lié à la réalité de la pratique journalistique. Proposition est faite d?encourager l?information de proximité, de professionnaliser davantage les journalistes et de s?en tenir à la distinction entre l?information et le commentaire. L?étude tire la sonnette d?alarme sur la précarité des journalistes correspondants qui, aux Etats-Unis et en Europe, ont pourtant porté l?essor de la presse écrite.


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