Algérie

Fouad, repose en paix


La très mauvaise nouvelle je l'ai reçue comme un coup de massue sur la tête, ce matin du mercredi 5 juin, deuxième jour de l'Aïd el-Fitr.Fouad est parti pour toujours, rejoignant d'autres collègues qui l'estimaient de par sa discrétion, sa gentillesse proverbiale, sa compréhension des journalistes de la rédaction qui ne le verront jamais passer sur eux sa mauvaise humeur et Dieu sait que confectionner le journal, tous les jours, est un combat exigent, permanent et parfois ardu et ingrat mais qu'une fois le bouclage terminé. Il avait l'écoute de personnes de grande expérience, lui la soixantaine à peine.
Cette liberté d'expression et d'opinion il la chérissait plus que tout, ce qui lui vaudra de subir les foudres du pouvoir. Le Soir d'Algérie n'a-t-il pas fait l'objet de pressions multiformes, de censure (comme l'interdiction de paraître), de pressions financières (à travers le blocage de la publicité durant plus de deux années). Produit de la JFLN, ayant été partie prenante de l'hebdomadaire L'Unité ' Après un passage, dans les années 80, au ministère des Anciens Moudjahidine en tant que chargé de mission, sa trajectoire professionnelle le mènera au quotidien Horizons avec l'équipe regroupée autour de Maâmar Farah dont il était très proche. Pour s'être tenu à ses idées dans une ligne éditoriale sans complaisance, il défendra durant deux longues années Mohamed Benchicou, emprisonné à la prison d'El-Harrach pour son livre sur Bouteflika. Fouad était le dernier à quitter tard le soir, le journal. Il avait aussi cet engagement tranquille qui ne le faisait pas dévier de ses choix éditoriaux. Car, pour lui, il y a dans le champ politique ceux qui nous gouvernent et la presse qui doit veiller aux dépassements et dénoncer la corruption, sujet phare du mouvement populaire d'aujourd'hui, le Hirak en l'occurrence. Faut-il rappeler qu'à ses débuts à Horizons, il avait réalisé un entretien avec Ali Benhadj qui avait fait grand bruit.
Fouad nous quitte à 65 ans, dans la force de l'âge, dans la plénitude de ses moyens intellectuels et professionnels qui aurait énormément servi les nouvelles générations de journalistes. Fouad était très peiné de la disparition de son ami Abderrahmane Mahmoudi, fondateur des quotidiens Les Débats, Le Jour d'Algérie à 54 ans, le 15 février 2007.
La faucheuse ne désarme pas : récemment, c'est Youcef Bettache qui rejoindra sa dernière demeure après Mohamed Bedrina, fondateur du Soir d'Algérie, Abdelkrim Benchicou. Il est sûr que ta disparition pour un monde meilleur sera difficile à combler? à oublier. Repose en paix, cher ami.
Brahim Taouchichet