Dans une pétition relayée par les réseaux sociaux et transmise aux autorités locales, des habitants de Biskra s’insurgent avec véhémence contre le projet de construction d’une nouvelle direction opérationnelle d’Algérie Telecom sur un flanc de Djebel Dhalaâ.
Des travaux, selon eux, qui mettraient en danger le fortin construit en 1660 au sommet de ce monticule rocheux situé au centre-ville de la Reine des Ziban et qui est hérissé d’antennes de télécommunication.
Ce projet dénaturerait ce site «portant une charge historique et culturelle des plus importantes pour les générations montantes», selon eux.
«Nous, citoyens de Biskra, dénonçons avec la plus grande fermeté le massacre perpétré sur le site de Djebel Dhalaâ. Nous nous élevons contre les conduites irresponsables et irréfléchies d’atteintes aux symboles de la ville encore épargnés. En effet, après J’Nen Beylek (Jardin du 5 Juillet 1962), le jardin botanique Landon, l’ancien siège de la Mairie, l’Hôtel Royal et le Casino, c’est aujourd’hui au tour du fortin de Djebel Dhalaâ, de subir les actions inappropriées et les outrages des bulldozers et des pelleteuses. Aucune justification stratégique ni considération économique ne justifie les actions entreprises par Algérie Télécom. Nous exigeons l’arrêt immédiat de ce chantier et la remise en l’état du site. Malgré tout ce que notre cité endure depuis des décennies, notre pacifisme légendaire, notre culture, notre sens des responsabilités nous imposent toujours le recours aux voies de droit et de manière civilisée pour faire valoir nos droits de protéger Biskra de pareilles exactions sans recourir pour le moment à d’autres moyens pour exprimer notre extrême indignation», est-il souligné dans ce document ayant recueilli l’assentiment de quelque 400 signataires.
Le fortin de Djebel Dhalaâ a été érigé par les Turcs avec des pierres extraites et taillées sur les lieux mêmes.
Poste d’observation et de surveillance des alentours de choix, les autorités françaises l’ont restauré et utilisé comme base de cantonnement pour ses soldats durant l’époque de la colonisation et de la guerre d’Algérie. De par sa position élevée, ce fortin permettait d’avoir une vue d’ensemble sur Haï Dhalaâ, Haret Triciti, la cité Beni Morah, la gare, la voie ferrée et les palmeraies de Dalia.
«Ce lieu est mythique. Il ne faut pas oublier que durant la guerre de libération nationale quand un Européen était tué, les soldats français y détenaient les suspects et les fellaghas arrêtés et procédaient à leurs exécutions devant le commissariat du lotissement Ferhat mitoyen à Djebel Dhalaâ sous les yeux des habitants rassemblés pour l’occasion. Après la signature du cessez-le-feu du 19 mars 1962, les moudjahidine du colonel Chaabani y ont élu domicile. Ce site devrait être préservé et inclus dans un circuit touristique et d’excursions pour les collégiens, les lycéens, les chercheurs en histoire et les visiteurs de Biskra afin que le sacrifice et les tortures endurées par la population restent dans les annales nationales et la mémoire collective», a ajouté Mohamed Slimani, président de l’association Mosaïque, laquelle active pour la sauvegarde des bâtisses historiques et des biens architecturaux, de la promotion de l’histoire de la ville et pour la sauvegarde des référents culturels de Biskra qui est «une cité millénaire et cosmopolite dont les habitants sont épris d’histoire et de valorisation des éléments constitutifs de son identité profonde ne devant pas être altérée ou détruite par des décideurs et des responsables incultes et irresponsables», est-il souligné.
A noter que pour araser et aplanir l’assiette foncière dévolue au projet de cette nouvelle direction opérationnelle d’Algérie Telecom pour laquelle le maître d’ouvrage et de l’œuvre disposent de toutes les autorisations légales et d’un permis de construire en bonne et due forme, un entrepreneur a entamé des travaux pour creuser une immense rigole de drainage des eaux pluviales sur le côté nord du fortin en question et réaliser en son contrebas une excavation dans la roche de Djebel Dhalaâ au moyen de marteaux-piqueurs et d’engins de creusement.
Selon les pétitionnaires, les vibrations engendrées par ces travaux déstabiliseraient les fondations du fortin et provoqueraient des fissures dans ces murs risquant de le faire irrémédiablement s’écrouler et disparaître à jamais au grand dam des habitants de Biskra encore attachés à l’histoire et aux richesses historiques de leur ville.
Photo: Le fortin a été construit en 1660
Hafedh Moussaoui
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Posté Le : 24/08/2020
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Hafedh Moussaoui
Source : elwatan.com du samedi 22 août 2020