Youcef Sebti, le poète de l?absurde Youcef Sebti disait : « ... Créer, c?est oser. C?est savoir risquer. La magie du verbe n?est point dissociable de l?éclatement du trop-bien-établi, de l?amorphe, du passif, du déréglé outre conscience et de toute aliénation. » Ainsi Youcef Sebti définit ici la position intellectuelle et esthétique qui fut la sienne et celle de beaucoup d?artistes de notre temps. Et pourtant le poète a décrit, durant toute sa vie, cette vaine anxiété de sortir de sa propre solitude, pour se retrouver dans les choses, dans le visage fraternel des formes terrestres : « Et la vie roule, roule Nous roulons comme les galets, amincis au fond de l?oued. Et les jours se bousculent Se poussent, se pressent, se succèdent Et les heures s?en vont Comme les grains d?un chapelet ». Dans certain de ses poèmes, les mots sont chargés d?une force évocatrice extrême. Parfois, le poète penche vers l?expression la plus secrète. II disait « qu?il se sentait isolé ou bien entouré d?un monde qui voulait de lui un renoncement à sa propre liberté ». II devient par conséquent plus pudique, se donne des allures évasives et fuyant les hommes, s?abrite dans la nature : « II se peut que l?Oued El Kébir déborde qu?il envahisse vallées et plaines qu?il emporte chênes, oliviers, troncs qu?il recouvre de sa boue les terres qu?il rejette de son ventre des poissons inertes. » Youcef Sebti possède un lyrisme délicat, intime, attentif à tout frémissement de l?âme. Par moment, il atteint un ton linéaire dominant sa richesse verbale bouillonnante. II est doué aussi d?un vif instinct mélodique : « Les palmiers dans un chatoiement inoui dans un ballottement gracieux remuaient leurs ailes remuaient les plumes de leurs ailes recourbées sous les caresses répétées de la brise du soir. » La vie apparaît au poète très souvent absurde, noyée dans un infini sans points de repère. La voix chante en écoutant sa propre résonance s?éteindre en vagues légères dans le vide : « Attendre. Attendre dans ces couloirs dont les lignes de fuites se recoupent dont les ombres se dissimulent dont les ondes caverneuses vous assomment. Attendre. Attendre jusqu?à l?infini. Sans omettre de sourire ou de rire. » Youcef Sebti nous a quittés trop tôt. Et pourtant, le poète a exercé sur lui-même et sur la réalité une critique corrosive. 1)-II fut assassiné par les hordes terroristes en 1955.
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Posté Le : 26/06/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Djilali Khellas
Source : www.elwatan.com