Algérie

Flop de M-6 et liberté d'expression



Nombreux sont les Algériens qui n'ont pas besoin de la chaîne M-6 pour être informés ou se faire une opinion sur l'état du pays. Pour la simple raison que pendant plus d'un an, sans autre parrain que lui-même, le Hirak a fait montre d'un civisme et d'une maturité politique que de nombreux pays, même les plus avancés, nous envient. Les hirakistes n'ont attendu personne pour décider d'arrêter de marcher le vendredi en raison de l'épidémie de coronavirus.Cela étant, que penser du reportage de la chaîne M-6 sur l'Algérie ' Le moins qu'on puisse dire est qu'il ne vole pas haut. Il est fait d'une série d'idées reçues et de clichés ? sur les harragas, une jeune femme moderniste, une autre en hidjab qui fait la promotion de ses produits de beauté, un diplômé chômeur à Ouargla qui fait le siège de la direction locale de Sonatrach pour un emploi sans prendre rendez-vous, comme si en France quand Renault décline votre demande d'emploi vous cherchiez à rencontrer son P-dg... et peu d'images, pour ne pas dire pas grand-chose sur le Hirak. Rien sur cette ambiance de fête bon enfant qui a marqué le mouvement entre février et juin 2019. Rien non plus sur les revendications du Hirak. Pas d'explication sur le fait que le social, même s'il était sous-jacent, n'a pas été le détonateur principal du Hirak. Ce qui le distingue du « printemps » social tunisien. Et comme l'a souligné le réalisateur et documentariste, aujourd'hui à France-2, Boualem Gueritli dans un post, le docu de M-6 est un « flop» ! Aussi l'interdiction d'activité future de M-6 en Algérie n'aura-t-elle peut-être d'autre effet que de donner un statut de « martyr » de la liberté d'expression à cette chaîne, dirigée par les forces de l'argent, un statut qu'elle ne mérite pas !
Pour clore ce chapitre, l'Algérie ne fait plus la « une » des médias français, comme elle l'a fait en février-avril 2019 et surtout durant la décennie noire. C'est le Covid-19 et son impact sur l'économie mondiale ainsi que Donald Trump qui sont au centre de l'actualité internationale, suivis par Poutine, Xi Jinping et la crise de Hong Kong, la Biélorussie, la tension Etats-Unis-Iran et Iran-monarchies du Golfe, la crise migratoire... Désolé, hormis le cas Khaled Drareni, et encore, l'Algérie n'est pas au c?ur de l'actualité internationale. Quant à la crise malienne ' Hormis quelques médias français, qui l'évoque en Europe ' Même chez nous, on en parle peu alors que la situation malienne concerne directement l'Algérie !
Et à propos de la presse, Abdelmadjid Tebboune a assuré dimanche que « la liberté d'expression est consacrée mais s'il existe une restriction, elle est imposée aux injures » ! Pour mémoire, le projet de révision constitutionnelle adopté par l'Assemblée populaire nationale (APN) le 7 février 2016 garantit la liberté de la presse, ainsi que la liberté de l'information. L'article 50 de la Constitution amendée dispose que la liberté? de la presse écrite, audiovisuelle et sur les réseaux d'information est garantie et qu'elle n'est restreinte par aucune forme de censure préalable. Quant au délit de presse, la loi stipulait qu'il ne peut être sanctionné par une peine privative de liberté?.
Les seules limitations imposées par la loi concernent « le respect de l'identité? nationale, des valeurs culturelles de la société?, des exigences de la sécurité? et de la défense nationale, de l'ordre public, des intérêts économiques ou encore de la souveraineté? et de l'unité? nationale» ! Ajoutons que l'Algérie a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) qui protège dans son article 19 la liberté d'expression.
Mais il y a un hiatus quand des poursuites judiciaires sont engagées et des peines prononcées sur la base d'un code pénal durci entre-temps durant le confinement, contre des journalistes et des activistes du Hirak pour diffamation, outrage et injure, voire pour atteinte à l'unité nationale !
Dans la pratique, ce que de nombreux avocats font observer, le recours au code pénal est systématique alors qu'en dernier recours, en vertu de son article 50, la Constitution, loi fondamentale, doit avoir la primauté sur le code pénal en ce qui concerne la liberté d'expression.
H. Z.


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