Fiertés nationales

«Je n'aime pas mon frère et je n'aime pas qui le frappe.» Proverbe kabyleUn trafiquant français, Serge Atlaoui, avait été arrêté en 2005 dans un laboratoire clandestin de production d'ecstasy près de Jakarta, la capitale indonésienne. Il avait été condamné deux ans plus tard à la peine capitale. Ce Français de 51 ans, artisan soudeur, a toujours clamé son innocence, affirmant qu'il n'avait fait qu'installer des machines industrielles dans ce qu'il croyait être une usine d'acrylique. Mais, voilà, la justice indonésienne, qui n'est pas à sa première affaire d'arrestation de trafiquants de drogue venus des pays riches, a démontré la culpabilité évidente du délinquant et l'a jugé selon les lois, très sévères, concernant le trafic de drogue. Il faut dire que les pays asiatiques sont très vigilants en ce qui concerne la gravité de ce délit qui est considéré comme un crime et ce, pour des raisons historiques. Il faut se souvenir que la Chine est le premier pays à avoir subi le diktat des pays européens. L'Empire du Milieu en proie à une crise interne à la fin du XIXe siècle, les grandes nations impérialistes occidentales, telles que la Grande-Bretagne, l'Allemagne, la Russie, la France, la Belgique puis les Etats-Unis, étaient toutes désireuses d'ouvrir à la Chine leurs marchandises (opium y compris, dans le cas de la Grande-Bretagne) et de se créer chacune sa «sphère d'influence», s'offrant un accès privilégié au territoire chinois. Des armées y sont envoyées pour arriver à ces fins. Ceci entraîne les deux «guerres de l'Opium», menées par la Grande-Bretagne et perdues par l'Empire, obligé, à partir de 1842, avec le Traité de Nankin, de signer une série de traités nommés «Traités inégaux», cédant des ports, des quartiers, comme à Shanghaï avec les concessions française, allemande, américaine et britannique. La mode était alors à la fréquentation de fumeries d'opium et la Grande -Bretagne obligea les Chinois à cultiver le pavot. Cela fut vécu comme une atteinte à la souveraineté nationale. Les autres pays asiatiques connurent le même phénomène à des degrés différents. Comme hier pour Ingrid Bettencourt enlevée par les Farc, pour Florence Cassez au Mexique ou pour Ghilan Shamir soldat franco-israëlien enlevé par les Palestiniens, la diplomatie française se mit en mouvement: Hollande critiqua la sévérité du jugement et aussitôt une formation d'opinion stimula la diplomatie française et les médias à prendre l'affaire, en main. Laurent Fabius a convoqué ce mercredi à 16 heures l'ambassadeur d'Indonésie en France après le rejet par la Cour suprême de son pays de l'ultime recours de Serge Atlaoui. Il s'agit de la troisième convocation de l'ambassadeur indonésien au Quai d'Orsay. Il l'avait déjà été en février et en avril pour échanger sur cette affaire. Mardi, Laurent Fabius avait dit que la France continuait à espérer «un geste de clémence», avertissant qu'une exécution de Serge Atlaoui aurait des «conséquences» sur les relations bilatérales. Cette dynamique de la diplomatie française est vécue et expliquée comme «une fierté nationale». Fiers de se mettre au service de délinquants. La justice italienne n'a-t-elle pas montré l'exemple en poursuivant ses nationaux coupables d'avoir versé des pots-de-vin' L'Indonésie deviendrait-elle sous les pressions un pays comme le Maroc ouvert à tous les délinquants de l'Hexagone' Mais comment s'appelle et que devient-il le citoyen algérien arrêté en Inde et condamné sévèrement pour la possession d'une balle'