Algérie

Festivités officielles



Yennayer est célébré pour la première fois en Algérie à travers un programme officiel de festivités pour célébrer le premier jour de l'an amazigh, récemment réhabilité et consacré fête nationale.Le passage à l'an 2968 du calendrier berbère, correspondant au 12 janvier, se caractérise cette année par des festivités multiples et diversifiées, assignées à un programme officiel élaboré par les ministères de la Culture, de la Jeunesse et des Sports et le Haut-commissariat à l'amazighité (HCA). Dans cet élan, les établissements culturels ont tracé un programme qui s'étalera sur toute l'année 2018, placée sous le signe de la célébration du patrimoine culturel amazigh dans sa diversité, à travers la tenue de semaines culturelles à travers toutes les régions d'Algérie. Différentes animations dont des projections de films, des représentations théâtrales et des ateliers d'apprentissage de Tamazight (langue officielle depuis 2016) font partie de ces festivités lancées officiellement le 6 janvier à Ghardaïa. Dans toute l'Algérie, à l'instar de Béjaïa, Annaba, Boumerdès, Bouira ou encore Tizi Ouzou, ce sont des conférences en rapport avec la langue et la culture amazighes ainsi que des manifestations restituant l'art culinaire ancestral, entre autres, qui marqueront Yennayer. Saïda a choisi d'accueillir le nouvel an berbère par la tenue d'un salon du livre dédié à la culture amazighe, alors qu'Alger se joint aux célébrations de Yennayer par des animations artistiques et des expositions de costumes traditionnels, notamment. Des galas artistiques sont également prévus à l'attention des Algériens établis à l'étranger. De son côté, le ministère de la Jeunesse et des Sports a programmé du 10 au 12 janvier plusieurs festivités à Alger et Tizi-Ouzou, où un défilé de troupes folkloriques est prévu. Le programme du HCA s'étalera jusqu'au 20 janvier dans d'autres villes encore, comme Oran, Jijel, M'Sila et Touggourt qui à leur tour accueillent Yennayer, une des plus anciennes fêtes populaires en Algérie et dans la région nord-africaine. Rites et traditions populaires La double dimension culturelle et historique que revêt Yennayer est mise en valeur dans plusieurs villes d'Algérie par la célébration de rites populaires, dans la tradition propre à chaque région. Diversement célébrée, la fête de Yennayer met davantage à l'honneur des traditions culinaires ancestrales, à l'instar de «Amensi n Yennayer», soumis au rite du sacrifice (Asfel) d'un coq qui accompagnera le traditionnel couscous préparé à l'occasion avec une variété de légumes et consommé en famille, comme en Kabylie et dans les Aurès. Chez les Beni Senouss (Tlemcen), Yennayar est fêté dans la convivialité et la solidarité des habitants qui organisent un carnaval, «Ayred» (le lion), en souvenir, selon la légende, de Chechanq, le fondateur d'origine berbère de la XXIIe dynastie des pharaons. Alliant plusieurs rites et traditions, Ayred, qui dure trois jours, est célébré annuellement avec les habitants déguisés et paradant dans les rues au rythme des chants champêtres traditionnels. Dans le Chenoua (Tipasa), Yennayer est accueilli par la préparation de plats traditionnels, notamment le pain préparé avec des herbes sauvages, dans une tradition qui exclut les épices et les ingrédients acides pour que l'année qui commence soit douce et prospère. Les enfants, eux, ont droit à «treize», un mélange de bonbons, dattes et de fruits secs, spécialement prévu pour cette fête. Blida et Médéa, préparent «El Aâm» avec des plats traditionnels à base de viandes, de pâtes, suivis de gâteaux traditionnels comme «rfiss», un mélange de galettes émiettées, de semoule et de dattes. Les Touareg fêtent Yennayer, appelé «Tafaski» en tamacheq, par des chants et des danses exécutés sur des rythmes tindi, tandis que les habitant du M'zab marquent la fête du nouvel an par «rfiss», un plat du terroir à base de semoule, de sucre, de lait et d'?ufs, ou encore une variante de couscous, appelé également «seksou» dans cette région du petit sud algérien. Yennayer, qui signifie «premier jour du mois», est le premier jour de l'an du calendrier agraire amazigh qui correspond au 12 janvier du calendrier grégorien. Il est fêté dans toute l'Afrique du Nord, et jusqu'aux Iles Canaries où subsistent des survivances de la tradition berbère, ainsi que dans certaines régions du Sahel. Une fête séculaire encore célébrée au XXIe siècle Le nouvel an amazigh, Yennayer, coïncidant avec le 12 janvier du calendrier julien, est l'une des fêtes populaires les plus anciennes de l'humanité encore célébrée au XXIe siècle sur une vaste sphère géographique. «Yennayer est vraisemblablement la fête la plus ancienne de l'humanité encore fêtée au XXIe siècle», a indiqué à l'APS Djamel Laceb, enseignant et auteur de la traduction vers le tamazight du «Sommeil du juste» de Mouloud Mammeri (1917-1989), à l'occasion du 22ème salon international du livre d'Alger, relevant qu'il s'agit d'une «survie miraculeuse au vu des adversités rencontrées au fil des siècles». M. Laceb note, s'agissant de la célébration de cette fête, un «regain de popularité» depuis la fin du siècle dernier à nos jours, dans la mesure où nous assistons, explique le spécialiste, à «une célébration de cette journée particulière dans des milieux autrefois fermés, à l'exemple des villes côtières d'Algérie, de la capitale Alger et par des populations que l'on croirait inattendues sur ce registre comme les non amazighophones qui s'en réclament désormais». Géographiquement, souligne M. Laceb, «c'est la fête la plus largement partagée en Afrique, puisque nous la retrouvons sur toute l'étendue nord du continent allant de l'Egypte aux côtes Atlantiques au nord et du désert de Siwa en Egypte jusqu'aux Iles Canaries au large de l'océan Atlantique au Sud, en passant par les tribus Dogons au Mali en Afrique de l'ouest», qui relève que le terme Yennayer «on le retrouve dans toute l'Afrique du Nord jusqu'au sud du Sahel avec de légère variations sur la même racine». Pour M. Laceb, «des similitudes clairement identifiables dans les rituels de célébration et dans les mythes qui s'y rattachent sont relevées, malgré la diversité géographique et météorologique de cet immense espace», estimant qu'il s'agit d'«une pratique sociale répandue sur un territoire vaste», relevant que Yennayer «peut-être un dénominateur commun qui pourrait se défalquer quelque peu de son aspect festif pour devenir la base d'un socle culturel commun hautement socialisant». Il a évoqué, dans ce sens, les différents caractères primordiaux de cette fête notamment son ancrage dans l'histoire commune de l'humanité, son caractère trans-civilisationnel et international et son caractère ?cuménique universel. S'agissant de la célébration de Yennayer le 12 janvier du calendrier universel, M. Laceb relève l'existence de quelques divergences quant au jour de la célébration. «Il se trouve en Libye et en Tunisie notamment des communautés qui préfèrent la date du 13 janvier, mais globalement le 12 janvier est retenu dans la majorité des régions concernées», fait-il remarquer se félicitant également de voir des associations culturelles en Afrique du Nord, en France et aussi au Canada qui se font un devoir de fêter Yennayer chaque année. Pour M. Laceb, «les différentes célébrations, ou du moins les plus importantes, se passent au soir du 11 janvier du calendrier dit Grégorien qui clôt l'année écoulée et qui voit les Imazighenes prier les jours noirs de s'en aller pour laisser place aux jours blancs (Adf en iberkanen, Ad kecman imelalen)». Relevant du point de vue étymologique que le vocable Yennayer, signifierait «les Paroles de la lune» ou le «Verbe du ciel», M. Laceb soutient que ceci «reste une étymologie parmi d'autres», mais il faut souligner qu'elle est «l'une des rares à tenir compte de la langue parlée des hommes pratiquant le culte». L'Algérie est le premier pays d'Afrique du Nord à réhabiliter Yennayer. Le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait annoncé lors de la réunion du Conseil des ministres le 27 décembre dernier, sa décision de consacrer Yennayer journée chômée et payée.


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