Algérie

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«Aucune culture n'est l'entière vérité.» Richard Hoggart
L'ami Hassan souriait à l'évocation de tous ces événements que lui-même avait vécus d'une autre manière. Il m'avait raconté que dès l'été de la discorde, il s'était démobilisé et était retourné à ses chères études contrairement à ses copains de promotion qui s'étaient tous engouffrés dans l'administration, à la recherche d'une bonne place au nouveau soleil qui allait briller sur une partie de l'Algérie. Je continuais à lui narrer toutes les images que j'avais emmagasinées lors de mon passage aux archives: «Ce que j'ai retenu de cette violente transition, celle qui était comprise entre l'Indépendance et le ´´ redressement ´´ du 19 Juin (Tu vois bien que le terme redresseur n'a pas été inventé par les éleveurs de dobermans), c'est qu'il y avait une certaine volonté de coexistence pacifique entre les différentes communautés. Je retiens toujours cette image des trois représentants des diverses confessions réunis à l'occasion d'une campagne de sensibilisation pour le don de sang. Il y avait le cardinal Duval, l'Imam Baba-Ahmed et le grand rabbin d'Alger assis côte à côte. L'Algérie aurait beaucoup gagné si cette tolérance avait survécu aux diverses manipulations de l'opinion publique. Je me souviens encore des derniers Algériens de confession juive qui venaient prendre leur café au «Coq Hardi» tous les matins, pendant le Ramadhan. C'est pourquoi j'ai su que ce n'était pas des musulmans. La Guerre des Six-Jours avait installé une nouvelle façon de voir dans les mentalités. La télévision avait joué aussi un grand rôle dans la permanence du problème palestinien dans les préoccupations des Algériens. Je crois qu'après 1969, Yasser Arafat a été l'homme politique étranger le plus présent dans les archives filmées algériennes. Quand l'Etat palestinien aura besoin d'écrire sa sanglante histoire, il pourra toujours trouver des images pleines de douceur dans les visites d'Alger. Il n'y a peut-être pas un seul pays arabe qui ait soutenu la cause palestinienne comme l'Algérie de Boumediene. Et la télévision y est toujours pour quelque chose, soit dans la diffusion d'images liées aux événements du Moyen-Orient, soit dans la production d'émissions. Même l'Oncic avait contribué en produisant «Sanaoud». Mais je dois dire qu'il y a peu d'images concernant la présence de soldats algériens stationnés sur la rive Ouest du canal de Suez et qui ont pris une part active dans les combats. Des images aperçues au hasard montrant Boumediene visitant un campement et accueilli par le colonel Abdelghani... Seul, peut-être le grand Maâtoub Lounès aura consacré une chanson au lourd tribut payé par les appelés algériens. Il faudra peut-être retenir l'émouvante cérémonie qu'a constituée l'appel des absents à l'issue de ce conflit. Mais la télévision se sera illustrée surtout dans l'animation et la retransmission des différents festivals qui ont contribué à faire connaître la culture algérienne. Moi, je retiendrais surtout le festival de Timgad qui était là pour rappeler que l'Algérie était avant tout un pays méditerranéen. Les touristes étrangers venaient nombreux à ce festival et la joie de vivre s'en ressentait. Mais l'apothéose fut atteinte à l'occasion du 1er Festival panafricain. Bien que tous les secteurs de l'information aient participé à cette gigantesque manifestation (musées, cinémathèque, théâtre, université, cinéma, Anep, Sned), ce sera surtout la télévision qui prendra la part du lion. J'ai toujours en mémoire cette indélébile image de notre directeur de l'information qui, vêtu d'une qachabia et brandissant une canne, ouvrait la marche lors du défilé inaugural de ce festival riche en couleurs et en sonorités. Les équipes de reportage travaillaient jour et nuit pour alimenter une programmation centrée sur cette manifestation inédite. Des réalisateurs étrangers avaient même été appelés à la rescousse. Mais on retiendra surtout l'absence de la culture berbère lors de ce festival: les Zoulous avaient droit de s'exprimer mais pas les Berbères. Myriam Makeba oui, Marguerite-Taos Amrouche, non. La télévision de Boumediene savait aussi être injuste.»


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