Algérie

FESTIVAL INTERNATIONAL DE MUSIQUE GNAOUIE À L’OREF



Quand l’Afrique «résonne»!
Avec deux cents dinars l’entrée, et une scène proche du public, les organisateurs ont tablé sur la proximité et la générosité qui ont fait de ce festival une belle aventure humaine... C’est à un poignant documentaire que l’on a été convié à regarder à la salle Ibn Zeydoun. Un film où la musique emboîte le pas à un projet fort ambitieux, déterminant et important. Il s’agit de Ishumars, les rockers oubliés du désert, un reportage de 95 minutes qui fera résonner la voix d’Abdallah Oumbadougou, chanteur touareg dont l’oeuvre est écrite en réaction aux persécutions que subit son peuple touareg, au Niger, le pays le plus pauvre au monde, selon les statistiques. Aussi si «Désert Rebel», le projet initié autour, est d’abord un projet artistique, sa dimension politique est centrale et transparaît tout au long du film. Normal, on n’y échappe pas, d’ou l’intérêt pédagogique crucial de ce film qui, en dépit d’être projeté dans le cadre du Festival international de la musique gnaouie, prend ici toute sa signification.Car, comme les tribus touarègues, la confrérie des Gnawa, a longtemps été rejetée pour le même principe de revendication de liberté dans les terres du Sud, à quelques exceptions près. Gnawa et Touareg se ressemblent car «nomades» dans l’âme et portent en eux ce message du désert, celui de la tolérance, de l’amour de l’ autonomie tout en étant accès sur des traditions difficiles de s’en séparer..Aujourd’hui, les Gnawa se fondent dans la masse. Un festival de musique gnaouie existe même en leur honneur, à la Saouira, au Maroc.Les Touareg, sont encore éparpillés, marginalisés...Si les Touareg du Niger veulent jouir de leurs droits, les gouvernements eux, refusent de leur céder ces terres, sources d’uranium et donc de richesse pour le pays. En dépit de ce conflit dépeint avec précision et simplicité, le film renvoie aussi au mouvement de solidarité entre musiciens qui arrivent parfois à dépasser le cap du politique pour une meilleure entente basée sur la sagesse, la paix et le partage. Cependant, avoue François Bergeron, le réalisateur: «La population touarègue est triste», car elle n’en finit pas de subir les affres de ces guerres intestines. En effet, «depuis début 2007, un nouveau mouvement de rébellion s’est déclaré, réclamant l’application des accords de paix de 1995, une meilleure répartition des richesses nationales, un meilleur respect de l’environnement par les compagnies minières. Le gouvernement refuse la négociation, répond par la force et les populations civiles subissent l’état d’urgence», nous apprend-on.Dans Désert Rebel, Abdallah Oumbadougou est l’artiste fondamental du projet auquel ont participé Guizmo, le chanteur de Tryo, Sally Nyolo, Imhotep d’IAM, Daniel Jamet, ancien de la Mano Négra aujourd’hui avec Mano Solo ou Amazigh Kateb, l’emblématique leader de Gnawa Diffusion. En janvier 2005, Farid Mérabet et François Bergeron, le réalisateur partent à la rencontre d’«Abdallah du Niger», originaire de la région de l’Aïr. Ils le retrouvent à Agadez et c’est là qu’ ils décident de démarrer le projet Désert Rebel avec un film documentaire sur lui, Abdallah Oumbadougou, ce chanteur, guitariste, auteur-compositeur de musique Ishumar.Ils réaliseront à quel point sa vie et son oeuvre sont marquées par l’histoire de son peuple: les Touareg. Pour Abdallah, ce projet est source de rencontres artistiques et un réel soutien au développement durable de ses écoles de musique qu’il a créées à Arlit et Agadez. Ces écoles l’ont ruiné et il souffre toujours du manque de moyens. Son engagement passe par la musique, «ce lien alternatif, loin des autorités des gouvernants et autres ministères», comme souligné dans le documentaire par Amazigh Kateb, pour que les gens entendent son message et que les siens n’oublient pas leur langue, leur culture...Ces rencontres insolites ont donné naissance à un album dont les premières notes ont été gravées dans un studio mobile au printemps 2005 autour d‘un feu de camp sur les dunes de sable du désert de l’Aïr, puis complétées quelques semaines plus tard dans le studio d‘enregistrement de Guizmo, près de Saint-Malo, en Bretagne et interprétés majestueusement au festival d’été au Québec en 2005.«Désert Rebel» veut lancer le débat de la «culture équitable». Un concept où les artistes du Nord partent à la rencontre de ceux du Sud pour réaliser des projets musicaux dont une partie des recettes servira à mener des actions concrètes sur le terrain en faveur du développement de l‘accès à la culture. Ce documentaire de 95 minutes est le premier volet d’une série sur les cultures en résistance dans le monde.D’autres suivront, notamment sur l’industrie culturelle et le piratage au Cameroun, la musique saharienne au Maroc, la population inuite du Canada etc. «Le but de ce genre de films est de faire de l’histoire-géo. Il s’agit d’interpeller sur des histoires oubliées. Je travaille avant tout avec des artistes...»Apres la déferlante d’ Etienne M’bappé, le groupe Castigroove ou encore celui bien de chez nous, Harmonica et quelques impondérables coupures d’électricité, le Festival de musique gnaouie, reprendra du poil de la bête, en donnant le meilleur de lui-même, jeudi prochain. Après le gnaoui pur, place au plat de résistance avec des groupes qui font dans la fusion des styles. Des sons élaborés, encore plus recherchés dont le terreau reste le patrimoine, à savoir des sons africains et des textes qui appartiennent désormais au cru universel orientalo-arabe, mêlé à des sonorités jazzy, rock, et blues, mais aussi de tindi et de Sharqui.Ce fut le cas avec le groupe Phantasia qui a donné un bel aperçu de son répertoire, sur la scène du Théâtre de verdure, Bois des Arcades de Riad El Feth. En première partie, le groupe Maâlem Madjbar et sa troupe, quoique composé, de jeunes éléments, a su transporter le public vers le délire de la transe, propre aux gens du Sud.Alors, quand fut le moment venu de Phantasia, la flamme du gnaoui a commencé à vaciller. La «fantaisie» de cette formation, ô combien sympathique n’était pas d’un irrésistible «accro». Ses harmonies peinaient à se frayer un chemin et rencontrer ces jeunes spectateurs quelque peu hermétiques à ces sons «hybrides» qui, faut-il le reconnaître, trouveraient peut-être plus de répondant chez nos amis londoniens pour la singularité de sa trame harmonique.Un peu éteinte au début, l’atmosphère brillera de nouveau, quand Yazid Phantazy et ses camarades, le son du oûd en bonus, en plus de la derbouka, du violon et du sax, aura eu raison de ce moment de flottement, trop calme pour ce festival et ces entrebâillements qui annonçaient déjà la fin du concert. Non, la flamme renaîtra de plus belle. Jusqu’à la dernière note de ce gumbri insaisissable au milieu de tas d’instruments, rehaussés de karkabous...


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