La dégradation de la situation politique en Tunisie, notamment sur le plan des libertés individuelles, est relaté dans le documentaire "Même pas mal" de la réalisatrice franco-tunisienne Nadia El-Fani, projeté lundi à Ouagadougou (Burkina Faso) lors de la 3e journée du 23e Fespaco.
Dans "Même pas mal", Nadia El Fani met en parallèle le "recul" de la liberté d'expression et la montée de l'extrémisme religieux en Tunisie, avec son propre combat contre le cancer dont elle a été atteinte en pleine révolte populaire qui a conduit au départ du président Ben Ali, puis à la victoire du parti islamiste Ennahda aux élections législatives de l'automne 2011.
Cette oeuvre, qui concourt dans la sélection officielle documentaire, revient aussi sur les multiples menaces et insultes dont la réalisatrice a été victime après avoir exprimé ses convictions philosophiques sur l'"absolue nécessité" de séparer le religieux du politique dans la construction de la Tunisie post-Ben Ali.
Nadia El Fani est l'auteur de "Laïcité Inchallah", un précédent documentaire qui avait suscité de grandes polémiques en Tunisie lors de sa projection en 2012.
Dans son nouvel opus, la réalisatrice mêle, images, où elle se filme en pleine séance de chimiothérapie, et joutes politiques entre partisans de la laïcité et salifications qui tentent, par la violence, d'imposer une vision rétrograde de l'islam, rejetant l'idée, même, de la démocratie, revendiquée sans complexe par des représentants de ce mouvement, comme montré dans le documentaire lors de la tentative de ces derniers de fermer d'une université tunisienne.
Le documentaire montre également des extraits d'émissions de télévisions françaises où la réalisatrice a été invitée à s'exprimer sur les menaces de mort proférées contre elle sur les réseaux sociaux ainsi que sur le procès pour blasphème que des avocats tunisiens lui ont intenté après ses déclarations.
La réalisatrice, qui se dit proche des mouvements progressistes tunisiens, a reconnu lors du débat suivant la projection, les "erreurs commises par ces forces politiques après la révolution".
Selon elle, les progressistes tunisiens "n'avaient pas à s'engager sur le terrain identitaire dans le débat avec les islamistes (lors de la campagne pour les législatives de 2012), au détriment des questions socio-économiques", alors même que ces dernières ont été à l'origine de la révolte en Tunisie et que les islamistes, rappelle-t-elle, "n'ont pas fait la révolution".
Concertant sa vision de l'évolution de la situation en Tunisie après l'assassinat, le 6 février, du militant politique, Chokri Belaïd, la cinéaste n'a pas caché sa "profonde inquiétude" devant la "menace de régression" qui guette son pays, tout en se disant "confiante" dans la "capacité de la société civile tunisienne" à défendre les acquis arrachés par l'indépendance, notamment en matière de droit des femmes.
La compétition du 23e Fespaco se poursuit jusqu'au 2 mars avec 101 oeuvres sélectionnées dans les différentes catégories du festival (long métrage de fiction, court métrage, documentaire, vidéo-numérique, série télévisée, cinéma de la diaspora et films des écoles africaines de cinéma).
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Posté Le : 25/02/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Algérie Presse Service
Source : www.aps.dz