Algérie

«Fêlures du silence», de Hassaïne-Douadji Dalila: De l'histoire à la fiction



L'histoire, avec un grand H est une source intarissable pour les romanciers qui, sans risque de la travestir, peuvent en faire bon usage. «Fêlures du silence», le dernier roman de Hassaïne-Daouadji Dalila, présenté jeudi après-midi, dans l'enceinte des Maisons d'édition «Dar El-Gharb», se laissant lire d'un trait, est de cette marque-là. Tel un astre céleste ne resplendissant que grâce à sa propre luminosité, Si El-Hadj Ghaouti, le personnage central de la fiction, ne vit que pour les autres. Il est le bel exemple de la tolérance et de la quintessence spirituelle. Au fil des pages et des micro-récits qui les parsèment, le lecteur aura toute la latitude de découvrir, également, d'autres personnages, d'autres gravitations. Il y a d'abord Mohamed et ses multiples questionnements que le père, Si El-Hadj Ghaouti, en guise d'initiateur, essaye, sans le bousculer, de l'accompagner vers la quête intérieure de l'invisible. Et un voyage, tout en contrastes, faisant effectivement jonction avec l'histoire ressuscitée et déconstruite en bribes, de temps en temps, pour la circonstance. L'histoire outragée du grand schisme des musulmans qui n'ont pas attendu longtemps pour sonner le glas de la discorde et de la déviation revient, sans cesse, au fil de la lecture pour mieux mettre en valeur le héros qui a bien su s'élever au-dessus de tous ces clivages. Ma Aïcha avec les vicissitudes de la vie est une Soudanaise, venue, il y a très longtemps et dans la douleur, atterrir chez El-Hadj Abderrezak et Rosalie la juive, convertie à l'Islam et leur idylle jonchée de préjugés. Joseph l'administrateur, St Simonien devenu musulman dans le seul but de se fondre, à travers le mariage avec la fille de Asri, dans la société qui l'a captivée, Ami Yahia le Mozabite égal dans sa différence, Salah le médecin, Mustapha l'étudiant en histoire, l'errant ou le derviche, c'est selon, Si Benfreha, le militaire héros de la Guerre 14-18. Toute une panoplie de personnages qui gravitent tels des derviches tourneurs autour de Hadj Ghaouti. Même si le romancier n'indique pas de date précise du déroulement de la fresque, le lecteur situerait sûrement les faits entre la fin du 19e siècle et le début du 20e. Il y a aussi ce folklore ambiant, presque ethnographique de la fête du mariage, de la visite du mausolée et tout ce glossaire arabe du petit objet ou de l'ustensile qui laisse deviner le désir des auteurs algériens à se différencier des autres à travers cette authenticité, aussi minuscule soit-elle. Si El-Hadj Ghaouti, profondément spirituel, altruiste et moderne à la fois, aura traversé le roman sans rechigner devant la longue quête de la vérité, de l'hermétique et de l'harmonie avec l'essence même de la vie. Le style est simple, le ton est serein, les descriptions n'entravent pas la cadence du récit, les envolées philosophiques ne sont pas confuses, même si elles sont truffées de concepts soufis et le roman est bon à lire.


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