Fatima Boudraa, née Ait Bara, est la doyenne des citoyens de la commune Draa Kébila ; elle est probablement la plus âgée de toute la région de Hammam Guergour. Elle est mère de 7 enfants (5 filles et 2 garçons) et grand mère de 160 autres descendants.
Elle est présumée née en 1910 à Draa Kébila au village Krima dans une famille modeste d'agriculteurs. Elle est la fille de Belkacem Ait Bara et de Harzoun Keltoum. Après la mort de ces parents, son oncle Mohand Tahar l'a prise en charge.
Elle a vécu ses années de jeunesse chez ses parents et son oncle puis s'est mariée à l'âge de 17 ans avec un jeune homme de Krima nommé Tayeb Boudraa. Ils se sont établis à Lemroudj, village voisin, au quartier Aghled, depuis 1968 à ce jour.
Au 14 avril 2013, date de notre entrevue avec elle, Fatima Boudraa se porte bien, se déplace toute seule, ne souffre d'aucune maladie, voit sans lunettes et sa mémoire est encore très bonne. Elle se souvient des évènements des deux guerres mondiales (1914-1918 et 1939-1945) et ceux de la guerre de libération nationale (1954-1962).
Elle fait quotidiennement sa prière et jeûne chaque année. Elle ne trouve aucun inconvénient à s'alimenter avec les produits d'aujourd'hui, tels que yahourt, flan, fromage, jus, etc.
Elle se souvient des moindres détails ; elle est surtout très marquée par les moments de famine qui ont suivi la fin de la seconde mondiale et les 6 années passées à Lemroudj, de 1956 à 1962, suite à la décision de l'armée coloniale classant le village Krima zone interdite.
De ces deux périodes, après plus d'un demi siècle d'indépendance, Fatima Boudraa garde d'amers souvenirs qui ne la quittent jamais en raison des souffrances endurées. Mais, malgré toutes les difficultés rencontrées depuis sa prime jeunesse, elle a su faire face avec les moyens de bord, une grande patience et beaucoup de sagesse.
Elle se souvient très bien des outres remplies qu'elle portait quotidiennement pour alimenter sa famille en eau potable. L'unique fontaine d'où s'approvisionnaient les habitants du village se trouvait en contre bas et à plus de 1000 m du foyer le plus proche. Les femmes du village partaient à la fontaine avec des outres vides et les ramenaient pleine d'eau, portées sur leurs dos en escaladant une forte pente. La capacité de chacune d'entre elles variait de 20 à 40 litres.
Elle a également évoqué les difficultés vécues en matière de moyens de chauffage et de cuisson. Elle se souvient très bien des milliers de va et vient effectués entre la maison, la forêt et les champs pour s'approvisionner quotidiennement en bois sans oublier les amendes imposées par les services des forêts de l'époque.
Comme elle n'oublie jamais les difficultés endurées en matière d'approvisionnement en produits alimentaires nécessaires pour faire manger ses enfants. A ce sujet, elle est longuement revenue sur la rareté de la nourriture durant les années de disette qui ont suivi la fin de la seconde guerre mondiale. Elle se souvient, qu'à défaut de blé et d'orge, elle et ses concitoyens ont mangé différentes sortes de plantes naturelles qui poussent toutes seules dans les champs, y compris celles qui sont relativement toxiques. Elle révèle avoir ajouté de l'avoine à de l'orge pour obtenir un peu plus de farine.
Pour terminer, Fatima Boudraa n'a pas manqué de relever la nette amélioration du cadre de vie depuis l'indépendance à ce jour. Elle se dit ravie de vivre ses moments pour lesquels le peuple algérien a payé lourdement pour se libérer du joug colonial pour se consacrer ensuite au développement socio-économique du pays afin qu'il vive honorablement et qu'il prépare l'avenir des générations montantes.
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Posté Le : 24/04/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Rachid Sebbah
Source : www.setif.info