BEJAIA - Au matin du 17 octobre 1961 à Paris, Fatima Bedar (15 ans), qui est devenue, sans le vouloir, un symbole des manifestations éponymes, ne se doutait pas du sort tragique qui l'attendait.
Gonflée par son enthousiasme et ses rêves juvéniles, elle n'avait qu'une seule idée : rejoindre les boulevards parisiens et prendre part aux manifestations pacifiques, organisées par la Fédération de France du FLN, pour dénoncer le couvre feu raciste, imposé, alors, aux algériens par la préfecture. Elle n'en est jamais revenue, comme des centaines d'autres victimes, elle a été précipitée dans les eaux de la seine.
C'était un mardi. Le temps était humide, légèrement pluvieux. Avant de sortir de la maison parentale, domiciliée à Stain en Seine-St-Denis, en région parisienne, elle s'était accrochée avec sa mère, qui voulait la dissuader de participer à la manifestation. "J'avais à l'époque cinq ans et demi et je garde toujours le souvenir d'une grande s£ur, studieuse, tendre et aimable. Elle était de plus, exemplaire en tout, mais ce jour là elle s'était disputée avec ma mère. Elle n'en avait fait qu'à sa tête ", s'est rappelé son frère cadet Djoudi, qu'elle a materné depuis sa naissance.
"Mais on ne l'a plus revue. Mon père, a dû signaler sa disparition, deux jours après. Et son corps n'a été retrouvé que le 31 octobre, coincé dans une turbine d'une écluse du canal de Saint-Denis", a-t-il ajouté dans un entretien accordé à l'APS.
"Elle n'était ni grincheuse, ni rebelle mais, visiblement, elle était précocement consciente de sa différence, la sienne et celle de ses compatriotes, éprouvés par leurs dures conditions de vie et de travail et les manifestations du 17 octobre lui ont donné l'opportunité d'exprimer ses sentiments de révolte", a-t-il expliqué.
Fatima, flanquée de son cartable de collégienne, était montée, en effet, à Paris, mais personne n'a réussi à reconstituer son parcours, ni à identifier ses rencontres éventuelles.
La police de Saint-Denis, qui n'a pas fait d'enquête a rapidement conclu à un suicide. "Il ne pouvait pas en être autrement, car pour la préfecture de Paris, la répression policière de la manifestation n'avait fait que deux morts", dira Djoudi, pour qui cette version a encore davantage accablé sa famille.
Mais la vérité a fini par éclater grâce aux investigations, en 2003, de quelques journalistes sur les massacres d'octobre 1961, ll a été mis en évidence que le corps de Fatima n'a pas été repêché seul du "canal de la mort mais découvert avec une quinzaine d'autres, tous plongés à vif dans l'eau", rapporte le romancier Didier Daeninckx.
Née en août 1946 à Tichy, dans une famille modeste, Fatima était l'aînée de 06 enfants. Elle ne s'est expatriée qu'à l'âge de cinq ans. A 15 ans, elle était déjà une adulte.
Son corps a été rapatrié en Algérie en 2006, grâce à un formidable travail procédural mené alors par la fondation du 08 mai 1945.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 16/10/2011
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Algérie Presse Service
Source : www.aps.dz