Algérie

Faire face aux dépenses: Le prêt sur gage, l'ultime recours



C'est un rituel : au début du mois de ramadhan, l'agence BDL située près de la place Karguenta, communément appelée agence Ozanam, renoue avec le grand flux. Motif de la ruée : le prêt sur gage.

A vrai dire, cette affluence massive n'est pas observée uniquement durant le mois sacré, elle se produit durant toutes les périodes exigeantes en termes de dépenses, comme l'Aïd El-fitr, l'Aïd El-Adha ou la rentrée scolaire. Avec la baisse du pouvoir d'achat, les Algériens sont de plus en plus nombreux à avoir recours au prêt sur gage. Ces prêts à la consommation permettent de faire face à un besoin de trésorerie, un coup dur ou un imprévu à des taux relativement intéressants.

Dès la veille du mois du jeûne, voire un peu avant, cette succursale de la Banque de Développement Local (BDL), l'unique banque qui fait dans le prêt sur gage dans toute la région de l'Ouest, est quasiment prise d'assaut tous les jours ouvrables par la foule. La gent féminine représente la majorité écrasante. C'est évident, il s'agit de bijoux.

Dès la première lueur du jour, les «gageurs» matinaux sont là, devant la porte de l'agence. Certains d'entre eux prennent même leur repas du «s'hour» sur place. Toutefois, on est bien loin des immenses queues dans la rue, du phénomène des veilleurs de nuit qui vendaient leurs places aux clients.

La salle des guichets grouille de monde. «Nous recevons en moyenne entre 300 et 350 clients par jour. Parfois, ça peut aller jusqu'à 450», indique une source de cette agence, qui précise que le ramadhan est synonyme de rush. La majorité des personnes présentes au service du prêt sur gage met en avant le besoin de liquidités pour faire face aux frais de la consommation durant le mois du jeûne. «J'ai besoin d'argent, c'est pour ça que je fais appel au prêt sur gage », confie une dame, veuve ayant trois filles et deux garçons à sa charge, venue d'Arzew. «Je gage mes bijoux pour ne pas les vendre à moitié prix. En plus, je préfère qu'une banque me prête de l'argent plutôt qu'un membre de mon entourage», réplique une autre femme, mère au foyer résidant à Oued-Tlélat, non sans une touche d'ironie.

D'autres personnes croisées dans ces mêmes lieux estiment qu'elles n'ont pas le choix et que c'est leur seul et dernier recours. La plupart des clients sont satisfaits en expliquant que «c'est aussi la facilité d'avoir de l'argent dans l'immédiat, ainsi que les garanties qu'offre la banque qui nous laisse faire appel à ce genre de crédit».

 Certaines conditions doivent néanmoins être respectées. Le bijou mis en dépôt doit être poinçonné par les services de la garantie relevant des impôts algériens. Sa teneur doit être de 18 carats, selon la réglementation algérienne. La banque propose actuellement 1.000 dinars/gramme. Mais avec la banque, l'octroi de liquidités à titre de prêt est immédiat après dépôt des bijoux. Pour le bénéficiaire, la seule condition qu'il doit remplir, c'est d'être un particulier qui réside en Algérie. Le seuil maximum, ou le prêt plafond, que peut offrir la banque est de 250.000 dinars, selon la même source, qui ajoute que le crédit est rémunéré à un taux d'intérêt de 8%. Il faut compter aussi un certain nombre de taxes. La somme d'argent est prêtée pour une durée de 6 mois et, cela s'entend, les délais sont à respecter. La durée est renouvelable au maximum 5 fois. Au-delà de 36 mois, le gage doit être payé, sinon les bijoux seront mis à la vente aux enchères. Ce sont néanmoins des cas rarissimes, la banque faisant tout pour que le client restitue son bien.

Les statistiques relèvent du «top secret» pour les banquiers. Aussi, nous en sortons sans aucun chiffre à se mettre sous la dent. Pour éviter les fraudes, l'identité du déposant est systématiquement vérifiée. Un contrat nominatif est signé. Le prêt est le plus souvent accordé dans le délai d'une heure. Chaque objet est estimé par un commissaire-priseur indépendant. Le montant du prêt proposé représente, en général, 50 à 70 % de la valeur estimée de l'objet sur le marché des ventes aux enchères publiques.

Par ailleurs, la même source fait savoir qu'il existe un projet pour la généralisation du prêt sur gage à d'autres objets de valeur, sans en citer la nature. Dans de nombreux pays, on accepte une large panoplie d'objets : bijoux, montres, argenterie, tableaux de maîtres, sculptures, tapis, mobilier, tapisserie, verrerie, fourrure, instruments de musique, etc.




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