Algérie

Facteur de stabilité au niveau de la région, intensifier le partenariat, gagnant-gagnant, pour un lac de paix



Après les impacts mitigés d l'Accord de Barcelone et de l'Union pour la Méditerranée (UPM), une importante rencontre aura lieu le 24 juin en France afin de dynamiser la coopération au niveau des deux rives de la méditerranée occidentale. Le recentrage sur la Méditerranée occidentale s'accompagne de la prise de conscience que les riverains de ce bassin partagent des intérêts communs majeurs, notamment dans le champ économique, mais également sécuritaire afin d'établir une «association renforcée» entre les riverains de la Méditerranée occidentale, l'objectif étant «résolument politique» pour éviter une fracture Nord-Sud porteuse de toutes les dérives et de tous les extrémismes pouvant entraîner des déséquilibres majeurs.À titre d'exemple, pour cette rencontre, le flux migratoire dépend à l'évidence en grande partie du (sous-)développement des régions défavorisées de la rive sud de la Méditerranée et au lieu de nourrir le malentendu autour de l'idée d'une «union» des deux rives, serait-il plus judicieux de conclure un pacte de coopération et de solidarité limité aux Etats des deux rives de la Méditerranée occidentale, un pacte fondé sur des valeurs et principes communs, un pacte motivé par un objectif de solidarité et de développement, dans le cadre d'un partenariat gagnant- gagnant.
1- La société civile acteur majeur de la coopération des deux rives de la méditerranée occidentale
1.1- Il faut être conscient que les nouvelles relations internationales ne se fondent plus essentiellement sur des relations personnalisées entre chefs d'Etat mais sur des réseaux et organisations décentralisés à travers l'implication des entreprises et de la société civile qui peuvent favoriser la coopération, le dialogue des cultures, la tolérance et la symbiose des apports de l'Orient et de l'Occident. Il est dangereux de s'enfermer dans un ghetto qui enfanterait inéluctablement la violence.
Les derniers évènements devraient encore mieux nous faire réfléchir en évitant cette confrontation des religions car autant l'Islam, le Christianisme ou le Judaïsme ont contribué fortement à l'épanouissement des civilisations, à cette tolérance en condamnant toute forme d'extrémisme. Les relations futures entre les deux rives de la méditerranée occidentale composée des 5+5 peuvent être des vecteurs dynamisants. Car, globalement l'Europe du Sud et le Maghreb ne sauraient échapper à cette adaptation aux mutations mondiales (la crise actuelle devant entraîner de profonds bouleversements à la fois géostratégiques et socio-économiques) et plus globalement toute la région méditerranéenne.
Car il y a lieu de dépasser les nationalismes chauvinistes étroits dans la mesure où le véritable nationalisme a l'avenir se définira comme la capacité d'accroître ensemble le niveau de vie de nos populations par notre contribution à la valeur ajoutée mondiale. Le monde actuel est caractérisé par l'interdépendance. Cela ne signifie pas la fin du rôle de l'Etat mais une séparation du Politique et de l'Economique qui ne saurait subir les aléas de la conjoncture, l'Etat se consacrant à sa mission naturelle de régulateur macro-économique et macro-social.
Je pense fermement et après analyse que l'intensification de la coopération entre les deux rives de la Méditerranée, en n'oubliant pas la coopération entre l'Algérie et les USA, la Chine, le Japon, l'Inde, le Brésil, la Turquie, la Corée du Sud la Russie etc? et d'une manière plus globale entre l'Europe- et le Maghreb fondée sur un véritable co-développement, permettrait de bouleverser les comportements bureaucratiques rentiers conservateurs et les inscrire dans une perspective dynamique profitable aux populations de la région afin faire du bassin méditerranéen un lac de paix et de prospérité.
C'est que l'espace méditerranéen peut être ce lieu de création de réseaux rationnels permettant de communiquer avec des cultures lointaines en favorisant la symbiose des apports de l'Orient et de l'Occident. Ce réseau doit favoriser les liens communicationnels, la liberté dans la mesure où les excès du volontarisme collectif inhibent tout esprit de créativité. C'est que le Maghreb et l'Europe sont deux régions géographiques présentant une expérience millénaire d'ouverture sur la latinité et le monde arabe avec des liens naturels et dans son ensemble porte de culture et d'influences anglo-saxonnes.. Il est indispensable que l'Europe développe toutes les actions qui peuvent être mises en ?uvre pour réaliser des équilibres souhaitables à l'intérieur de cet ensemble.
En fait la constitution d'espaces régionaux économiques faibles est une étape d'adaptation structurelle au sein de l'économie mondialisée avec pour objectif de favoriser la démocratie politique, -une économie de marché concurrentielle humanisée, -les débats contradictoires d'idées par des actions sociales et culturelles pour combattre l'extrémisme et le racisme -la mise en ?uvre d'affaires communes n'oubliant jamais que les entreprises sont mues par la seule logique du profit et que dans la pratique des affaires il n' y a pas de sentiments.
Ainsi, il y a lieu d'accorder une attention particulière à l'action éducative car l'homme pensant et créateur devra être à l'avenir le bénéficiaire et l'acteur principal du processus de développement. C'est pourquoi je préconise la création d'une université euro-maghrébine ainsi qu'un centre culturel de la jeunesse méditerranéenne comme moyen de fécondation réciproque des cultures pour la concrétisation du dialogue soutenu afin d'éviter les préjugés et les conflits sources de tensions inutiles ainsi que d'une banque centrale euro méditerranéenne pour favoriser les échanges. L'Algérie et la France peuvent favoriser la création de ces structures dynamisantes.
1.2- C'est dans ce contexte que doit être appréhendé une approche réaliste du co-partenariatdes deux rives de la méditerranée occidentale où la société civile jouera un rôle majeur, tenant compte de la quatrième révolution mondiale 2020/2030 tant dans le domaine géostratégique, économique, social que culturel. Au niveau mondial, nous assistons à l'évolution d'une accumulation passée se fondant sur une vision purement matérielle, caractérisée par des organisations hiérarchiques rigides, à un nouveau mode d'accumulation fondé sur la maîtrise des connaissances, des nouvelles technologiques et des organisations souples en réseaux comme une toile d'araignée à travers le monde, avec des chaînes mondiales segmentées de production où l'investissement, en avantages comparatifs, se réalisant au sein de sous-segments de ces chaînes.
Comme le note justement Jean-Louis Guigou, Président de l'Ipemed (Institut de prospective économique du monde méditerranéen, à Paris), il faut faire comprendre que, dans l'intérêt tant des Français que des Algériens, et plus globalement des Maghrébins et des Européens ainsi que de toutes les populations sud-méditerranéennes, les frontières du marché commun de demain, les frontières de Schengen de demain, les frontières de la protection sociale de demain, les frontières des exigences environnementales de demain, doivent être au sud du Maroc, au sud de la Tunisie et de l'Algérie, et à l'est du Liban, de la Syrie, de la Jordanie et de la Turquie, passant par une paix durable au Moyen-Orient, les populations juives et arabes ayant une histoire millénaire de cohabitation pacifique. Plus précisément, économiquement le partenariat gagnant-gagnant au niveau des pays deux rives de la méditerranée, présente des atouts et des potentialités pour la promotion d'activités diverse et cette expérience peut être un exemple de ce partenariat global devenant l'axe privilégié du rééquilibrage du Sud de l'Europe par l'amplification et le resserrement des liens et des échanges sous différentes formes.
Les échanges peuvent être intensifiés dans tous les domaines : agriculture, industrie, services, tourisme, éducation sans oublier la coopération dans le domaine militaire, où l'Algérie peut être un acteur actif, comme le montrent ses efforts en vue de la stabilisation de la région. Par ailleurs, n'oublions pas le nombre de résidents d'origines maghrébines, et quel que soit le nombre, la diaspora est un élément essentiel du rapprochement entre nos peuples du fait qu'elle recèle d'importantes potentialités intellectuelles, économiques et financières. Et doit mobiliser à divers stades d'intervention l'initiative de l'ensemble des parties concernées, à savoir les gouvernements, les missions diplomatiques, les universités, les entrepreneurs et la société civile.
1.3- L'intensification de la coopération entre des deux rives de la méditerranée occidentale ne sera possible que si les pays le composant cet espace ont une approche réaliste du co-développement loin de la vision mercantiliste et de l'esprit de domination, devant avoir une vision commune de leur devenir. La symbiose des apports de l'Orient et de l'Occident, le dialogue des cultures et la tolérance sont sources d'enrichissement mutuel. Les derniers événements devraient encore mieux nous faire réfléchir, évitant cette confrontation des religions car autant l'islam, le christianisme que le judaïsme, ont contribué fortement à l'épanouissement des civilisations, à cette tolérance en condamnant toute forme d'extrémisme.
La mondialisation est un bienfait pour l'humanité, à condition d'intégrer les rapports sociaux et ne pas la circonscrire uniquement aux rapports marchands en synchronisant la sphère réelle et la sphère monétaire, la dynamique économique et la dynamique sociale. Au moment des tensions géostratégiques au niveau de la région avec notamment le terrorisme, la consolidation des grands ensembles, enjeux de la mondialisation, le rapprochement entre les deux rives est nécessaire pour une intensification de la coopération, à la mesure du poids de l'histoire qui nous lie.
Mais soyons réalistes. Dans la pratique des affaires n'existent pas de sentiment, les entrepreneurs étant mus par la seule logique du profit et chaque pays doit défendre ses intérêts propres. Mais la mise en ?uvre d'affaires saines, comme l'image d'un pays, ne repose plus comme par le passé sur des relations personnalisées entre chefs d'États ou ministres, mais doit être la résultante de réseaux décentralisés, favorisés notamment par l'implication de la société civile, d'ONG et d'entreprises dynamiques innovatrices. Les tactiques doivent s'insérer au sein de la fonction/objectif stratégique qui est de maximiser le bien-être social de toute la région méditerranéenne.
(A suivre)
Professeur des Universités, expert international Dr Abderrahmane Mebtoul


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