Algérie

Face aux mutations mondiales, comment corriger l'actuelle politique socioéconomique



Face aux mutations mondiales, comment corriger l'actuelle politique socioéconomique
La bataille de la relance économique future de l'Algérie et notre place dans la compétition mondiale se remportera grâce à la bonne gouvernance, notre capacité à innover et au sein du grand Maghreb.» (A. Mebtoul, conférence au Parlement européen, septembre 2013).1.-La politique socio-économique depuis l'indépendance politique rentrant dans le cadre du programme de Tripoli a été menée exclusivement par l'Etat avec plusieurs variantes De 1965 à 1979, avec une orientation exclusive vers l'investissement productif. Celle-ci s'est effectuée autour de l'Etat omniprésent sur l'ensemble du cycle : planification, financement, réalisation de l'investissement et production ; de 1980 à 1990, orientée essentiellement vers les infrastructures BTPH et les activités commerciales ; de 1991 à 2000, du fait de la situation particulière qu'a connue l'Algérie avec l'avènement du terrorisme et la cessation de paiement, on ne peut à proprement parler de politique de développement, mais avec la cessation de paiement des ajustements macro-économiques et macro-sociaux extrêmement douloureux du fait des exigences du FMI; et de 2000 à 2013, du fait que la demande sociale a été compressée et des destructions massives entre 1990-2000, une politique orientée essentiellement vers les infrastructures, ainsi qu'orientée vers le social, se souciant peu de l'efficacité économique rendue possible grâce au cours élevé es hydrocarbures entre 2004/2013. Paradoxalement, les paramètres macro-économiques de l'Algérie apparaissent aujourd'hui comme positifs, mais éphémère sans réformes structurelles. Tout en évitant une vision négative, reconnaissons qu'avec l'importance de la dépense publique, les impacts sont loin des potentialités de l'Algérie. Les données officielles de la Banque mondiale comme celles de la Banque d'Algérie permettent d'indiquer que pour la période 2000-2013, 97/98% des exportations sont le fait des hydrocarbures que l'Algérie, calcul réalisé selon les données de la Banque d'Algérie, a exporté 707,250 milliards de dollars et a importé pour 491,200 milliards. Grace à la rente des hydrocarbures , cela a permis des réserves de change qui ont clôturé au 1re janvier 2014 à environ 194 milliards de dollars dont 83-86% sont placées à l'étranger, notamment en bons de trésor américains et en obligations européennes. La rentabilité moyenne annuelle a varié entre 4 à 4,5 milliards de dollars par an entre 2011/2013. Grace toujours aux hydrocarbures, la dépense publique a été de 630 milliards de dollars entre 2000/2013 (budget de fonctionnement et d'équipement). Le taux de croissance moyen a été de 3% alors qu'il aurait dû dépasser les 10%. Les 5/6% de taux de croissance des hydrocarbures l'ont été indirectement par la dépense publique via les hydrocarbures à plus de 80% dont le BTPH. Selon des rapports internationaux, l'Algérie dépense deux fois plus pour avoir deux fois moins de résultats par rapport à des pays similaires. Ainsi, les tendances relatives aux grands agrégats révèlent une macro-économie sous contrôle relatif en fonction des aléas de la rente des hydrocarbures qui représente 97/98% des exportations totales. La dette est maîtrisée grâce au remboursement par anticipation, moins de 4 milliards de dollars US. La balance commerciale a fortement bénéficié de la remontée des cours des hydrocarbures. Cependant, depuis 2010, les importations suivent une tendance haussière, avec un pic pour 2013 55 milliards de dollars auquel il faut ajouter 12 milliards de dollars de services, soit 67 milliards de dollars de sortie de devises, sans compter le montant de rapatriement des capitaux entre 5/7 milliards de dollars. L'Algérie importe 70% des besoins des ménages et des entreprises qu'elles soient publiques ou privées avec un dépérissement du tissu industriel de moins de 5% du produit intérieur brut. L'inflation qui a connu un niveau record en 2012 (8,9%) selon les statistiques officielles) est relativement maîtrisée, mais compressée artificiellement par les subventions généralisées et non ciblées, (12% du PIB) . Encore qu'il faille éclater l'indice de l'ONS, et analyser les liens entre la répartition du revenu et le modèle de consommation par couches sociales, celui percevant 20.000 dinars par mois net, n'ayant pas la même perception de l'inflation que celui qui perçoit 200.000 dinars. Le budget est équilibré de par la stabilisation des dépenses de l'Etat (même si elles restent à une proportion élevée du PIB) et grâce à l'appoint de la fiscalité pétrolière, encore que le budget entre 2015/2017 devrait préfigurer des tensions budgétaires à venir en cas d'une chute du cours des hydrocarbures. Les taux d'intérêt aux entreprises restent par contre élevés malgré la baisse de l'inflation, ce qui donne un taux réel trop fort, ce qui reflète en partie la faible efficacité du système bancaire encore dominé par les banques publiques. L'apurement des créances détenues par les banques sur les entreprises publiques s'est traduit par des décaissements importants du Trésor. 2.-L'Algérie tente difficilement sa transition d'une économie publique vers une économie plus libérale à vocation sociale. Le pays a opté au départ pour une économie étatisée. Elle s'est ouverte à l'économie de marché à partir de la crise de 1986. Toutefois, l'économie algérienne reste encore une économie essentiellement publique. L'héritage socialiste est fortement présent dans la philosophie et les pratiques de la vie économique et sociale et dans celui de la pérennité de l'entreprise publique qui a connu plus de 60 milliards de dollars d'assainissement entre 1971/2013. L'industrie publique est largement obsolète et concentre des pertes totales malgré des assainissements répétés nécessitant sa restructuration et sa modernisation. Les ressources du pays sont significatives, mais basées sur des rentes qui contribuent à anesthésier les volontés de changement. En dépit de certaines réformes timides ? paradoxe plus le cours des hydrocarbures est faible, plus on ressent le besoin de réformes, et ralentit lorsque le cours est élevé - la production, le commerce, la banque, l'emploi et les prix restent fixés par le gouvernement. La pression démographique rend l'Algérie de plus en plus dépendante des importations qui n'a pas jeté les bases d'un appareil productif capable d'affronter la concurrence internationale. Les différents revenus des rentes ne proviennent pas d'un véritable effort productif des intéressés et conduisent quasi inéluctablement à une mauvaise gestion macro-économique. L'absence de mise en place d'un appareil productif augmente chaque jour davantage les difficultés que rencontrera le pays lorsque la rente tendra vers l'épuisement. Actuellement, les considérations politiques à court terme l'emportent sur les perspectives à long terme. Tant que la majorité de l'électorat tirera ses revenus des emplois dans la fonction publique, de transfert de rente sans contreparties productives, qu'elle pourra bénéficier de services sociaux peu coûteux, les réformes fondamentales n'auront guère de chances de progresser de par l'opposition tant du grand public que de la technostructure censée mettre en oeuvre ces changements. Le salaire au sein des branches est déconnecté de la productivité du travail avec la dominance des emplois rente. Les branches qui exportent le plus ne sont pas forcément les plus ouvertes et l'industrie manufacturière même embryonnaire est très tournée vers son marché intérieur. Les investissements directs étrangers hors hydrocarbures et dans les secteurs productifs sont très faibles, les étrangers étant attirés par les marchés publics du BTPH. Excepté les hydrocarbures, de certains segments des télécommunications, de quelques sociétés mixtes, le secteur étranger productif est marginal. Le système bancaire doit faire l'objet d'une profonde restructuration à la suite de l'accumulation de créances douteuses auprès des banques publiques. D'une manière générale, les entreprises privées sont présentes surtout dans le secteur des services avec prédominance du commerce de détail, dans les petites entreprises de BTPH et du secteur manufacturier traditionnel. Paradoxalement, l'Algérie fait alors massivement appel à l'assistance technique et aux firmes étrangères en même temps qu'elle les encadre dans le cadre de la règle des 49/51% instauré par la loi de finances 2009, généralisée aux banques en 2010, le poste services étant passé de 2 milliards de dollars en 2002 à 12 milliards de dollars fin 2013 (les cerveaux algériens fuient et on fait appel aux compétences étrangères à dix fois parfois le salaire d'un algérien). L'agriculture, tenant compte de la situation semi aride de l'Algérie - intiment liée à une politique d'économie de l'eau, constitue un réservoir important de main d'oeuvre et peut servir en cas de chute du cours des hydrocarbures comme amortisseur social tout en diminuant la facture alimentaire, assurant une relative autonomie alimentaire n'existant certes pas d'autosatisfaction à 100%. La céréaliculture connait des rendements faibles qui souffrent des difficultés générales de l'économie. 3- Les politiques économiques menées entre 1963/2013 ont finalement débouché sur l'engrenage d'une triple dépendance financière, pétrolière et technologique. L'orientation quasi exclusive de l'industrie sur la substitution des produits importés a généré des déperditions et les surcoûts classiques liés à une non-optimisation des capitaux investis. Par ce phénomène, l'Algérie s'est insérée (malgré elle) dans la division internationale du travail comme fournisseur exclusif d'énergie. La configuration autarcique de l'industrie et son caractère politique ont renforcé sa dépendance envers les seuls produits commercialisables avec ses principaux partenaires commerciaux (le brut, puis le gaz). Les exigences de l'outil réalisé ont accru la dépendance à l'égard des cours et des revenus pétroliers, seule source de flux financiers externes. Le lancement de capacités industrielles a nécessité la mise en oeuvre de contrats «clés - ou produits en main», avec recours aux techniques étrangères d'où la dépendance technologique (pièces de rechange, maintenance et formation), la multiplicité des processus liés aux différents pays à l'origine des lignes de crédit, des problèmes de propriété industrielle et de licences pour permettre l'évolution des produits, qui en général n'a pas été rénovée, ce qui a creusé l'écart technologique et a favorisé les produits importés. L'industrie souffre d'une faible rentabilité et d'importants surcoûts propres aux économies dirigées. Les systèmes de prix sont souvent déconnectés de la conjoncture économique. Les systèmes d'approvisionnement ou de négociations contractuelles nées du code des marchés publics sont lents et coûteux. La vocation sociale des entreprises s'est allégée, mais a fortement imprégné les mentalités. Les systèmes de cooptation des personnels entraînent des sureffectifs et une gestion laxiste. La grande industrie a insuffisamment contribué au développement du tissu industriel et a parfois utilisé son statut public pour croître sans considération pour la réglementation. La plupart des grands complexes ont cherché à tout intégrer, non seulement les activités industrielles classiquement sous-traitées, mais aussi des fonctions aisément disponibles sur le marché (nettoyage, gardiennage, restauration...). Ce n'est que sous la pression économique qu'elles ont tardivement externalisé ces activités et parfois avec succès. La faible considération pour l'environnement va générer de graves difficultés pour attirer des groupes internationaux qui connaissent parfaitement l'évolution de la jurisprudence internationale. L'interprétation unilatérale de la réglementation a également généré des abus qui peuvent demain générer des contentieux internationaux, comme en témoigne les nombreux litiges dont ceux de Sonatrach, à l'international et l'importance de la sphère informelle ( propriété intellectuelle). (A suivre)




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