Face à la montée de la discrimination et de l?islamophobie
L?Europe cherche des solutions à Cordoue Pour une première c?en est véritablement une : l?Europe a décidé de regarder la réalité en face en reconnaissant l?intolérance dont souffrent les musulmans vivant sur son sol. Ils sont plus de 15 millions de personnes de confession musulmane à faire les frais d?une terrible campagne de dénigrement, voire parfois de pratiques raciales dans les différents pays européens. C?est parce que cette pratique est devenue hélas un phénomène grandissant, que l?Organisation de la sécurité et de la coopération européenne (OSCE) a décidé de mettre le holà. Pour ce faire, une conférence internationale sur le titre générique de « L?intolérance envers les musulmans » se tient depuis hier à Cordoue en Espagne sous les auspices de l?OSCE. L?objectif étant de trouver des solutions pour contrer l?islamophobie. Premier à intervenir à l?ouverture des travaux, le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, qui assume actuellement la présidence tournante de l?OSCE, il a appelé à des « avancées décisives » contre le phénomène. « Depuis 2001, les rapports élaborés par l?Observatoire européen contre le racisme et la xénophobie attestent de la croissance des attitudes et des comportements antimusulmans », a souligné M. Moratinos. Plus grave encore, le chef de la diplomatie espagnole révèle que « toutes les enquêtes nationales et internationales montrent un sentiment de rejet vis-à-vis des musulmans dans le monde du travail, pour le logement et l?éducation ». M. Moratinos ne manquera pas de faire le parallèle entre le terrorisme et ce phénomène. « Sans doute l?émergence du terrorisme international a alimenté ce phénomène », a-t-il en effet concédé. Tel n?est pas l?avis du secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, qui, lui, minimise l?impact du terrorisme d?Al Qaïda. Pour lui, l?émergence de l?islamophobie ne remontait pas aux attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, mais à la fin de la guerre froide et de la confrontation entre l?Est et l?Ouest. Délit de faciès Cela n?a pas empêché le représentant des pays arabes, qui participe à la conférence, aux côtés des 56 pays membres de l?OSCE, de saluer cette « initiative très importante » ainsi que les efforts diplomatiques affichés par le chef du gouvernement espagnol pour une meilleure entente entre peuples, avec son idée d?alliance des civilisations. Il faut rappeler que cette initiative, lancée en septembre 2004 à l?ONU par José Luis Rodriguez Zapatero après le choc des attentats du 11 mars à Madrid, revendiqués par Al Qaïda, vise à « surmonter les préjugés et malentendus entre monde musulman et Occident ». L?ancien président portugais, Jorge Sampaio, présent également à Cordoue, a plaidé pour des « politiques fortes (...) pour construire les ponts du respect et de compréhension mutuelle ». Cela étant dit, et comme toute conférence de cette envergure, elle a été précédée la veille d?un colloque préparatoire organisé pour les ONG ?uvrant dans le domaine des discriminations contre les musulmans. « L?islamophobie est un phénomène croissant. Nous avons des rapports croissants de violence contre les musulmans », a indiqué à l?AFP, Wanda Krause, responsable de l?organisation britannique Forum Against Islamophobia and Racism. Le porte-parole de Femyso, une confédération européenne d?associations de jeunes musulmans, Aydin Suer, a estimé pour sa part qu?il y avait eu un « changement qualitatif » avec la mise en place récente de lois qui, selon lui, visent spécifiquement les musulmans, comme l?interdiction du voile islamique à l?école. Pour en revenir aux débats de la première journée, Ioannis Dimitrakopoulos, responsable de recherche pour l?agence européenne pour les droits fondamentaux, a estimé que des études ont montré que « beaucoup de musulmans souffraient de discrimination et d?exclusion dans le domaine de l?emploi, de l?éducation et du logement ». Il citera ainsi le cas de l?Irlande où le taux de chômage pour les musulmans était de 11% en 2002 contre une moyenne nationale de 4%. En Grande-Bretagne et en France, des tests ont montré, d?après lui, que les musulmans souffraient de « discriminations à l?embauche ». En tout état de cause, et en attendant les mesures concrètes qui y seront prises aujourd?hui pour contrer le phénomène, il est déjà acquis qu?il y a une prise de conscience au niveau européen. Le premier pas étant déjà fait, puisque comme l?a reconnu hier M. Moratinos, l?objectif était « de reconnaître l?ampleur du problème, analyser ses racines, identifier ses formes et élaborer des moyens pour le combattre ». Amr Moussa est allé directement dans le vif du sujet en proposant ceci pour juguler le phénomène : « Nous devons nous mettre d?accord sur des règles de comportement, de tolérance et de coexistence, car nous sommes condamnés à vivre ensemble. » La conférence devrait se pencher aujourd?hui pour étudier les réponses à apporter en particulier en matière d?éducation et de médias. M. Moratinos en donne un avant-goût : « Les conclusions présentées (aujourd?hui) comporteront des instruments spécifiques, des mécanismes de suivi et surtout une plus grande sensibilisation. » Nous y reviendrons plus en détail demain avec notre envoyé spécial à Cordoue, Mustapha Benfodil.
Posté Le : 10/10/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Hassan Moali
Source : www.elwatan.com