Algérie

Exorcisme



Sa seconde réapparition publique, le président Bouteflika la réserve à la signature à Alger de la loi de finances 2006. Elle est destinée aussi à ôter définitivement le doute sur l?existence d?une quelconque maladie invalidante ou incurable. Le chef de l?Etat semble donc décidé à « reprendre les choses en main » après le dangereux flottement des trois semaines écoulées qui a donné libre cours aux scénarios du pire, dans la rue, la presse étrangère et également au sein de la sphère publique. Le pays tout entier a été déstabilisé et on comprend que des Algériens aient voulu manifester publiquement leur satisfaction au retour aux affaires du chef de l?Etat même si diverses scènes de liesse observées çà et là, trop bien filmées par la télévision, n?étaient pas d?une réelle spontanéité et semblaient davantage l??uvre des habituels zélés professionnels. Ce qui, en fait, était exorcisé dans les ouf de soulagement des manifestants, c?était, avant tout, le risque que le pays ne fasse un saut dans l?inconnu et ne soit confronté à une situation d?alternance politique anormale et malsaine : une succession précipitée à la tête de l?Etat créerait un contexte explosif du fait de son exploitation par tous ceux qui tiennent à leurs privilèges - maffiosi, chefs de guerre et politiciens ambitieux propulsés dans les hautes fonctions, toute une faune qui a prospéré ces dernières années à l?ombre de l?ouverture anarchique du commerce extérieur et des inconséquences des dirigeants. Une faune qui n?hésiterait pas, pour ses intérêts, à mener le pays à la dérive, et ce danger a été ressenti tout au long de ces longs jours écoulés par la population qui a (re)découvert que la stabilité politique et institutionnelle d?un pays est le passage obligé pour le retour à la sécurité, l?avènement d?une démocratie pour asseoir les libertés et le règlement des lancinants problèmes de pauvreté, de chômage et d?exclusion. Le retour à la normale enclenché ces dernières années, les Algériens sont conscients de son extrême fragilité du fait de la persistance du terrorisme et de la faiblesse de l?Etat sur lesquelles s?est sédimentée une gouvernance très aléatoire dont une des manifestations est précisément cette gestion catastrophique de la maladie du Président. C?est encore une fois la société qui s?est trouvée en avance vis-à-vis de la sphère politique dirigeante laquelle n?a pas su épargner au pays une grave crise. Le président Bouteflika en tirera-t-il les leçons le moment voulu ? Par un curieux retour de situation, il a été « victime » d?un système qu?il a lui-même édifié.


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