Algérie

Évocation : Si Nass El Ghiwan m'était conté



Évocation : Si Nass El Ghiwan m'était conté
La pratique des ghiwanes est une coutume ancestrale qui conférait à des gens connus pour leur probité et leur modestie, la faculté de décrire par le chant et la parole, la vie quotidienne, les problèmes et entraves de leurs semblables. Ces troubadours, de douars en douars, transmettaient leur savoir par l'entremise de la poésie, du chant et du jeu théâtral. Considérée comme révolutionnaire ou comme phénomène de société, la formation mythique de Nass El Ghiwane est venue prendre le relais de la révolution Beatles. Les deux groupes se croisent dans la culture mystique. La première dans le mouvement hindou de Hari Krishna, l'autre de Sidi Abderrahmane El Medjdoub. Au début des années 60, les cinq terribles garçons vont révolutionner le champ artistique maghrébin. Omar Sayed et Boujemâa dit Boujemiî. Ils ont débuté leur carrière dans la maison de jeunes de Casablanca, devenue fief de la formation dans son autobiographie "arrahil". Ils rejoignent ensuite la troupe de Tayeb Saddiki et introduisent dans son répertoire dramatique, des chansons telle la mythique "qittati Essaghira". L'idée de créer un groupe a germé dans l'esprit de Larbi Batma et de Boujemiî lors d'une tournée théâtrale en France, dans une volonté de perpétuer ce que leurs ancêtres ont transmis de génération en génération. Le premier Show eut lieu à  Casablanca dans le restaurant le Nautilus à  Ain Diab. Mais la consécration aura lieu au théâtre Mohammed V à  Rabat en 1971. Les spectateurs étaient ravis, emportés par le rythme et enthousiasmés par des textes qui les touchaient directement. Tout le monde sentait cette opposition symbolique entre deux genres de chansons : l'une conventionnelle et statique, l'autre militante et prometteuse. Les nouvelles chansons de Nass El Ghiwane avaient pour titres : "Çiniya", "Ya bani l insân", "Ahl el hal".. Par son approche insolite, le groupe Nass El Ghiwane s'inscrivait d'emblée dans un mouvement de réaction contre la "chanson âsriya" qui languissait dans d'interminables plaintes d'amour et ennuyait par son caractère relativement figé ; et s'attache à  créer un ton véhément en parfaite osmose avec les nouveaux textes. Nass El Ghiwane ne pouvaient soupçonner ce que leur prestation allait réveiller en un public avide de renouveau à  l'aube des années 70, années difficiles sur le plan social et politique. Nass El Ghiwane, par leurs habits de scène, par les instruments traditionnels utilisés, et par leur touchante faculté à  saisir le malaises ambiants, communièrent avec le public. Ils devinrent par la suite la voix des opprimés, des contestataires étudiants mais aussi d'une certaine intelligentsia de gauche. A une époque où une simple déclaration conduisait au cachot, Nass El Ghiwane dénonçaient via leurs chants les responsables corrompus.. L'idée était simple : Sur le plan musical, le groupe s'est révélé rapidement plus percutant De même, les phrases musicales sont simples et faciles à  répéter, car elles se réfèrent à  des schémas connus du public. Ils ont fait la synthèse musicale entre le style Arubi et Gnawi ; le tout associé à  des rythmes vigoureux invitant à  la transe salvatrice, imprégnés d'un souci mélodique certain. Nass El Ghiwane retrouvent ainsi le chemin du mysticisme tragique et révolté, ils développent le souvenir et forcent l'inspiration à  partir de la hadra et du hâl, un hâl désacralisé et porté en-dehors de la zaouia vers la scène, afin d'embrasser d'autres thèmes sociaux et politiques.


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