Publié le 29.05.2024 dans le Quotidien l’Expression
des centaines de milliers de personnes priaient inlassablement pour que Tahar Djaout s’en sorte.
Le 26 mai 1993 restera une journée maudite. Tahar Djaout qui personnifiait la bonté et l'esprit littéraire dans toute son ampleur et sa splendeur, est victime d'un attentat.
Le poète d'Oulkhou n'est pas décédé sur place. Hospitalisé, il rend l'âme le 2 juin, soit une semaine plus tard.
L'Algérie et la littérature venaient de perdre l'un de leurs meilleurs écrivains. Un romancier accompli et poète brillantissime et hors du commun qui, à moins de quarante ans, a réussi à s'imposer sur la scène littéraire francophone de fort belle manière grâce à sa maîtrise phénoménale de la langue de Molière ainsi qu'à son style d'écriture flamboyant qui ne ressemble à aucun autre.
La carrière d'écrivain de Tahar Djaout est ainsi écourtée injustement. Il demeure éternel par son oeuvre, mais aussi par le symbole qu'il représente et qu'il représentera toujours, celui de la littérature algérienne post- indépendance. Né à la veille du déclenchement de la guerre d'indépendance, le 11 janvier 1953, à Oulkhou, village planté entre la mer et la forêt d'Azeffoun, Tahar Djaout a été énormément marqué par la guerre. À l'instar de nombreuses familles de sa région natale, celle de Tahar Djaout a quitté Azeffoun pour Alger. Tahar Djaout y vivra jusqu'à son décès. Mais tout en gardant le lien ombilical avec sa localité natale aussi solide qu'il le fut du temps où il y vivait.
Les traces de cet attachement, on les retrouve amplement dans l'oeuvre du poète assassiné. Il a onze ans lorsqu'il découvre l'univers algérois avec sa richesse et sa diversité culturelle. Il parvint alors à concilier les deux facettes de sa personnalité doublement enracinée dans la vie villageoise très rude et celle d'Alger, plus clémente malgré tous les aléas. Cet enrichissement trouve son prolongement dans l'oeuvre romanesque de Tahar Djaout. Bien que matheux de formation universitaire, l'écriture littéraire a toujours couru dans ses veines. Il a à peine 17 ans quand il publie sa première nouvelle qui reçoit une mention à un concours littéraire.
Le fait de vivre à Alger lui permit de tisser des liens amicaux et d'échange avec pas mal d'hommes de culture et plus particulièrement des poètes. à peine sa licence de mathématiques en poche, Tahar Djaout s'engage comme critique littéraire à El Moudjahid culturel, supplément du quotidien éponyme. En 1980, il rejoint Algérie Actualité, en tant que journaliste culturel, mais aussi reporter. Certains de ses reportages constituèrent la matière première de ses futurs écrits littéraires, selon de nombreux collègues à lui, l'ayant côtoyé dans les années 80. Après l'ouverture démocratique de 1988, Djaout fonda Ruptures, un hebdomadaire prestigieux et de haute facture intellectuelle où signèrent et cohabitèrent des sommités de la plume comme Abdelkrim Djaâd, Arezki Metref, Nadjib Stambouli, Saïd Mekbel, Rachid Boudjedra... Tahar Djaout est l'auteur de quatre romans et d'un cinquième inachevé publié à titre posthume. Il s'agit de «L'exproprié», «Les chercheurs d'os», «L'invention du désert», et «Les vigiles». Ce dernier a obtenu le prix Méditerranée en 1991. Son roman posthume inachevé, intitulé «Le dernier été de la raison» a été édité en 1999. Tahar Djaout est l'auteur d'un seul recueil de nouvelles: «Les rets de l'oiseleur» mais de nombreux recueils de poésie dont: «Solstice barbelé», «L'arche à vau-l'eau», «L'oiseau minéral», «L'étreinte du sablier»...
Aomar MOHELLEBI
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 30/05/2024
Posté par : rachids