Le défunt Nourredine Saâdi était un grand militant politique de gauche.
Il a longtemps milité dans la clandestinité durant une période caractérisée par une terrible chape de plomb. Il était également romancier et essayiste. Il avait enseigné à la faculté de droit d’Alger avant de quitter l’Algérie en 1994 pour s’installer en France où il a enseigné à l’université d’Artois.
L’universitaire Benamar Mediene a animé une communication lors d’une rencontre organisée pour rendre un vibrant hommage à Nourredine Saâdi, samedi dernier, à la librairie Livres, Art et Culture d’Oran. Le Pr Mediene, qui est un spécialiste des arts et de la littérature et auteur de plusieurs ouvrages, parle de son ami écrivain et universitaire, disparu le 14 décembre 2017, après avoir combattu dignement la maladie. Le conférencier a longuement évoqué le parcours militant de celui qui a consacré sa vie à défendre ses idéaux.
En effet, Nourredine Saâdi représente l’Algérie des combats et des luttes progressistes. Benamar Mediene ne pouvait parler de son ami sans aborder le récit de ses luttes estudiantines, l’indépendance de l’Algérie, le Parti de l’avant-garde socialiste (PAGS), ou encore la décennie noire.
Les mots du conférencier résonnaient fortement, son récit se conjuguant au présent, comme s’il se refusait l’emploi du temps des souvenirs, et ce, même en évoquant la mort de son ami. «Je l’ai rencontré pour la première fois en 1973 chez Mohamed Khadda, qui est lui-même un militant du PAGS, mais avec un statut d’artiste», raconte Mediene pour souligner ce lien à l’art qui les réunissait, en plus des positions politiques.
Il faut savoir que Benamar Mediene est docteur en sociologie culturelle et directeur de recherche en histoire et philosophie de l’art. Il demeure fasciné par la beauté et la finesse de la plume de son ami, qui était enseignant de droit, mais qui écrivait sans la rigidité qu’on connaît aux textes juridiques.
En effet, Saâdi est un intellectuel des bifurcations, comme le dit le conférencier, faisant allusion à sa capacité à trouver à chaque fois de nouveaux centres d’intérêt, sans pour autant changer de position. Nourredine Saâdi est né en 1944 à Constantine. Il avait milité dans l’Union nationale des lycéens et collégiens algériens (UNLCA), puis dans l’organisation estudiantine UNEA. En 1965, il s’engage dans l’ORP (Organisation de la résistance populaire), opposée au coup d’Etat qui a écarté Ahmed Ben Bella du pouvoir, avant d’adhérer, en 1966, au PAGS, dès sa création, dont il est devenu un militant jusqu’aux années 90.
Il avait été arrêté en 1970, lors de la dissolution de l’UNEA. Il a également exercé comme journaliste et milité en tant que syndicaliste universitaire. Il a publié Dieu-le-fît, en 1996, La nuit des origines, en 2005, et La maison de lumière, en 2000. Son dernier roman, Boulevard de l’abîme, est sorti en octobre 2017, à l’occasion du 22e Salon international du livre d’Alger. Il s’agit de loin de sa plus belle œuvre littéraire, témoignent les participants à cet hommage.
On rappelle également qu’il s’est intéressé aux artistes algériens en publiant Koraïchi, portrait de l’artiste à deux voix, en 1999, ou encore Denis Martinez, peintre algérien, et Alloula, vingt ans déjà !, un ouvrage collectif paru en 2014. Benamar Mediene se rappelle, par exemple, d’une réunion, tenue en septembre 2016, où «Nono», comme il l’appelle, et lui-même faisaient leur adieu à leur ami Nabil Farès : «C’était au cimetière Vaudrans de Marseille.
Il n’y a rien de moribond dans ce cimetière apaisant, où les tombes apparaissent comme des maisons avec des carrés funéraires de petits villages avec une convivialité, comme nos villages de Kabylie. Ça nous rappelle chez nous et on se dit que Nabil Farès a de la chance de reposer dans un lieu pareil.» Parler de la beauté des cimetières semble être la seule approche que s’accorde Mediene pour imaginer le départ de Nourredine Saâdi, puisqu’il évoque un autre lieu : «Nourredine Saâdi a un rapport aux cimetières qui n’est pas du tout morbide», lance-t-il.
Il évoque le cimetière de Kristel, à Oran, dont «Nono» serait tombé amoureux. «Pour lui, ce sont des lieux de repos…et c’est le cas !», raconte Pr. Mediene, qui se rappelle de sa rencontre avec celui qui partage sa même passion pour l’art.
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Posté Le : 18/05/2018
Posté par : litteraturealgerie
Ecrit par : Redouane Benchikh
Source : El Watan