A deux reprises, en 1969 et 2009, nous avons invité notre continent à Alger pour y montrer ses richesses culturelles. Désormais, c'est lui qui s'invite chez nous pour nous rappeler ses misères de toutes sortes.Récemment, dans une rue de Kouba, une petite migrante (mais peut-on la qualifier ainsi, elle qui n'a demandé ni à naître ni à prendre les chemins de l'exil ') m'a tendu son beau regard implorant et sa petite obole de plastique. Je lui ai demandé d'où elle venait. Comme elle ne comprenait pas, je lui ai cité les pays du Sahel. Au nom de Niger, elle a acquiescé. Comme à chaque fois, j'ai pensé à elle bien après l'avoir quittée, car chacun de ces trimardeurs d'outre-désert vient directement nous interroger sur le sort de l'Afrique, la marche du monde et le sens de l'histoire, si jamais elle en a un. Là, j'y ai pensé plus que d'habitude...Le matin même, j'avais lu cette nouvelle d'une autre Nigérienne, une certaine Augusta Uwamanzu-Nna, âgée de 17 ans, dont les parents se sont installés aux USA voilà quelques années. Elle vient de réaliser une performance rarissime : se faire admettre à la fois par les huit plus prestigieuses universités nord-américaines ! Soit ce qu'on appelle la «Ivy League» qui regroupe Harvard, Dartmouth, Princeton, Cornell, Yale, Colombia, Brown et l'université de Pennsylvanie.«Ivy» signifie «lierre», car cette plante grimpante décore la plupart de ces institutions aux architectures britanniques anciennes, façon Oxford. Donc, Ivy symbolise surtout le fait de s'accrocher durement. Car, outre les moyens des parents, il faut en baver pour accéder à des lieux de savoir comme Harvard où les chances d'entrer sont évaluées à 5,2 % cette année. Augusta était déjà finaliste du prix Intel Science Talent et avait participé à des recherches dans son lycée de New York.Elle m'a rappelé un autre Africain, Utof Ekong, étudiant nigérian à l'Université Tokaï du Japon. L'an dernier, il avait défrayé la chronique en obtenant les meilleurs résultats de cette institution depuis 50 ans. Maîtrisant quatre langues (le yoruba maternel, l'anglais, le français et le japonais), ce brillant garçon, qui se spécialise en robotique, aurait réussi à résoudre une équation mathématique demeurée insoluble depuis trente ans ! Il a, de plus, déposé deux brevets à son nom pour la conception de voitures électriques. Et pour couronner le tout, ne disposant d'aucune aide, il occupe deux emplois pour financer des études au moins ardues.Respect et admiration donc à Augusta et Ufot. Mais pas d'étonnement, car si l'Afrique est le berceau de l'humanité, elle est aussi forcément celui du cerveau humain. Ma petite mendiante de Kouba aurait bien pu se trouver à la place de sa compatriote new-yorkaise. C'est là une évidence. Mais dans le monde où nous vivons, rien n'est moins évident que les évidences
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Posté Le : 23/04/2016
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Ameziane Farhani
Source : www.elwatan.com