Algérie

Everybody loves Libya



« Tout le monde aime la Libye !». C'est clair, c'est net etc'est dans Forbes, le magazine qui publie le classement des hommes et desfemmes les plus riches du monde.On ne saurait trop conseiller cette lecture à nos confrèresfrançais, qui poussent un soupir de soulagement après la fin de la visite enFrance du colonel Mouammar Kadhafi. Ce n'est pas ici qu'on trouvera deslaudateurs du Guide en matière de respect des droits de l'homme ou deslibertés. On connaît trop la Libye pour ne s'en souvenir qu'à la faveur d'unevisite et entonner le grand air de la réprobation indignée. On sait trop biencomment est structurée la relation entre le « centre » dominant et la «périphérie » du réservoir de ressources pour accorder du crédit à ceux qui fontmine de s'offusquer.De ce point de vue, la longue visite du dirigeant libyen enFrance a été un moment d'une telle intensité d'hypocrisie politique qu'ellefera effectivement date. « Tout le monde aime la Libye », ou plutôt le pétrolede la Libye, le gaz, les contrats, l'argent de la Libye. On fait affaire aveclui, tout en tentant de se refaire une santé «éthique» sur son burnous.On l'a vu: le point d'équilibre est plutôt difficile àatteindre et l'exercice atteint vite ses limites. Tout cet aréopaged'affairistes distingués se rue vers Tripoli et les plus avisés évitent defaire du bruit: ils préfèrent signer les contrats. Car, à l'évidence, on ne s'accommode pas seulement desautoritarismes, ils sont entretenus par ceux-là mêmes qui prétendent lesmépriser. C'est ce qui se passe partout où affleurent les matières premières.La singularité libyenne est que Kadhafi aime à jouer aux originaux, qu'ilpousse le spectacle jusqu'à ce qu'il révèle la parfaite inanité des formes etdes discours convenus. Car l'argent fait tourner le monde, ce n'est pas uneinvention africaine. Le leader libyen a beau vouloir inventer des alternatives- sans lendemain d'ailleurs, puisque même son fils en appelle au retour d'unenormalité de façade minimale -, il ne fait que mettre en pratique la « norme ».Il est client et fournisseur, ils sont clients et fournisseurs. Rien de plus etrien de moins.Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangèresfrançais, a du vague à l'âme ? On admirerait presque l'élégance de sa poseconsternée, sauf qu'on n'oublie pas qu'il a appuyé une aventure irakienneinjuste et criminelle au nom du soi-disant devoir d'ingérence et qu'il menaceun autre pays des foudres guerrières de l'Occident. On se demande d'ailleurspourquoi il ne s'est pas ingéré, à temps et avec ce si joli mouvement dementon, dans les affaires du gouvernement français pour éviter une visite quiprovoque chez lui ce lamento à usage du grand public. On le voit avec chagrin,l'élégance revendiquée n'évite pas le trivial.Le Guide a mené la revue, fait du spectacle, c'est sonregistre. D'autres se prêtent à la scène alors que, loin des sunlights, ilstirent le bilan de la rafale de contrats. Il s'agit là d'une farce d'un goûtdouteux. Forbes, le magazine des milliardaires, qui préfère les comptes à lagaudriole, n'en finit pas de s'amuser. Nous également car tous, même ceux quifont mine de se boucher le nez, aiment la Libye. «Everybody loves Libya».


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