Algérie

« Evènements d’Algérie » (1954-1962), tribulations d’un berger-chouf du FLN/ALN : témoignage exclusif. 1er partie.



« Evènements d’Algérie » (1954-1962), tribulations d’un berger-chouf du FLN/ALN : témoignage exclusif. 1er partie.
Comment des bergers à peine sortis de l’enfance, analphabètes et illettrés, ne connaissant de la géographie que leur vallée et de l’histoire et de l’anthropologie humaine que leur tribu… peuvent-ils déjouer les plans militaires les plus élaborés par des officiers des services de renseignements coloniaux appartenant à l’un des plus puissant empires de l’époque, formés dans les plus grandes écoles militaires de France et de l’Occident, disposant de moyens humains et matériels quasiment illimités, fait leurs preuves au quatre coins du monde ?



Je précise que son champ d’expérience se limite à ses parcours, à la vallée de Kellal, à l’un des secteurs de la zone IV de la wilaya IV, arrière pays de Gouraya, département d’Orléanville à l’époque, actuellement de Tipaza. Il a eu en face de lui le 22ème RI (régiment d’infanterie) et son 2ème bureau dirigé par le lieutenant Jean Lacoste qui avait mis sur pied un redoutable et impitoyable commando composé d’anciens maquisards ralliés aux forces coloniales. Parmi les plus cruels de ces derniers plusieurs de mes anciens pensionnaires retournés.



Donc, en face de moi une armée moderne, professionnelle, surarmée, dotée de moyens de transport : terrestres, aériens et maritimes, surentraînée, copieusement nourrie, chaudement vêtue de pied-en-cape, encadrée par des officiers de haut rangs et expérimentés. Existe-t-il une arme efficace qu’un berger puisse opposer efficacement à une telle armada ?



Dès l’âge d’aller à l’école, vers 6 ans, les enfants de ma région, des monts Dahra et de ma génération recevaient une chèvre ou une brebis qu’ils devaient engraisser et faire prospérer, accompagnent leur grande sœur ou grand frère sur de longs et larges parcours escarpés et peu généreux en herbe pour nourrir le troupeau : une trentaine de têtes : chèvres, moutons, un âne, une vache et son veau.



Ma modeste auto-éducation générale se limite à l’observation de la nature, à l’écoute de la faune. Et, elle parle pour qui sait les écouter. D’abord je remarque que les oiseaux ont des territoires qu’ils défendent à coups de cris, de becs et de griffes même contre leurs congénères de la même espèce. Qu’ils expriment à l’aide de gazouillements en trois tonalité distinctes pour exprimer leur allégresse, détresse et leur craint. Les deux premiers se traduisent par un « R.A.S » (rien signaler) en jargon militaire. Ce sont leurs gazouillements de crainte, qui signalent une présence non-identifiée, qui sont exploitable par un berger chouf à des fins militaires.



Par ailleurs, les chèvres sont des animaux craintifs. Elles ont une ouï fine, le regard perçant et l’odorat développé. Elles sont constamment en alerte. Quand elles dressent leurs pattes avant et refusent d’avancer, tendent leur oreille vers un bosquet donné, il y a anguille sous roche. Je devais identifier l’objet de leur crainte.



Aussi un berger-chouf doit-il savoir qu’il existe des animaux diurnes (qui vivent le jour) et nocturnes (qui vivent la nuit). La faune a une vie sociale bien établie. Elle n’en déroge qu’en cas d’une impérieuse nécessité.



Le 2ème bureau du 22ème R.I (régiment d’infanterie) avait infiltré, instrumentalisé et manipulé certains nationalistes algériens. Pour faire passer leurs messages au patron du 2ème bureau, la présence d’une ou deux personnes à mettre hors d’état de nuire, par exemple, les félons utilises des relais, dans le cas d’espèce, un enfant de mon âge (12 ans en 1958), qui informe un indicateur majeur, nommé Boutriti (le retraité de l’armée) qui enfourche son vélo et court au Bois Sacré pour rapporter la nouvelle au lieutenant Lacoste.



Deux cas de figure, soit que la ou les cibles sont immédiatement traitables, soit qu’elles s’apprêtent à traverser la vallée de Kellal le jour suivant. Nous rappelons que les nationalistes algériens voyages à la tombée de la nuit. Dans ce 2ème cas de figure, pour intercepter ses adversaires, le même Lacoste place son commando composé d’anciens ralliés quelque part dans l’un des bosquets qui bordent la piste à emprunter par les cibles.



Par ailleurs, la base militaire du Bois Sacré se trouve traversée par le milieu par la route nationale numéro 11. Tantôt à vélo tantôt à pieds, je pouvais la traverser par des allers et retours, oued Kellal-Gouraya, plusieurs fois par jour. J’avais mémorisé : le nombre de véhicules, les activités des soldats quand ils ne sont pas en opération. Je devais quotidiennement savoir où se trouvait le commando d’anciens maquisards ralliés. Il devait être soit à sa base, ce qui signifie prêt à partir en opération soit en quartier-libre, au café du caïd Labtahi entrain de jouer aux cartes.



Les soldats européens, quand ils ont quartier-libre, ils devaient se trouvaient au bar Pommy entrain de siroter de la bière, jouer au flipper et au baby-foot.



Comment conjuguer toutes ces données pour en faire une imparable arme de guerre ? Nous verront cela bientôt dans la 2ème partie.


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