En Europe comme
aux Etats-Unis, sous des formes différentes, la dette publique est la question
centrale qui se pose aux gouvernements. Et place les marchés financiers
internationaux dans l'expectative.
Les difficultés
financières de la Grèce
ont mis à mal la cohésion de l'Union européenne et menacent l'euro. Les
divergences entre les principaux pays de l'UE portent sur l'implication des
investisseurs privés dans le plan de financement de la Grèce, censé mettre
ce pays à l'abri de convulsions jusqu'à 2014. Cette question en apparence
purement technique a des implications nettement plus politiques. De fait, l'Allemagne
souhaite que les banques créancières de la Grèce participent pleinement au sauvetage
d'Athènes. La chancelière allemande Angela Merkel, en perte de vitesse électorale, ne souhaite pas
braquer davantage une opinion publique qui refuse d'assumer les ardoises de ses
voisins européens. Pour les experts, l'approche allemande pave la voie à un
défaut de paiement de la
Grève. Ce que craignent, l'effet de domino jouant, la France et l'Espagne, appuyées
par la Banque
centrale européenne (BCE). Si une amorce de consensus semble se dégager, il
reste du chemin à parcourir pour concilier des points de vue fort différents. Toutefois,
le fait que le président de l'UE ait convoqué une réunion des ministres des
Finances de la zone Euro pour jeudi prochain, 21 juillet, est interprété comme
un signal positif, les pays concernés seraient à la veille d'un accord.
L'Italie
contrainte au plan d'urgence
Ces divergences
notoires et les controverses qui s'éternisent, préoccupent les marchés
financiers contraignant l'Italie, cible de manÅ“uvres spéculatives à adopter en
urgence un plan d'économie budgétaire de 48 milliards de dollars. La
publication des résultats des stress tests des banques européennes menées par
le superviseur des marchés bancaires, l'Autorité Bancaire Européenne (ABE) devrait
contribuer à rasséréner les marchés. Les résultats sont en effet plutôt
rassurants. L'ABE avait exigé un ratio de fonds propres durs (
Tier 1 de Bâle II : capital social, résultats
mis en réserve et les intérêts minoritaires dans les filiales consolidées moins
les actions auto détenues) de 5 % : la moyenne européenne se situe à 7,7 %. Sur
91 établissements soumis aux tests dans 21 pays, 8 échouent à l'examen. Ces
huit banques, cinq espagnoles, deux grecques et une autrichienne requièrent 2,5
milliards d'euros pour se consolider selon l'ABE. Il
n'en demeure pas moins que les marchés qui accueillent positivement ces
résultats mettent en avant le fait que ces tests ne prennent pas en compte un
défaut grec, sans même évoquer les répercussions sur les autres pays à fort
déficit budgétaire.
La course contre
la montre d'Obama
Aux Etats-Unis, la
crise a pour origine la vive polémique qui oppose les parlementaires à la Maison-Blanche sur
la question du relèvement du plafond d'endettement du pays. Barack
Obama est donc engagé depuis plusieurs semaines dans
une course contre la montre pour que le Congrès accepte que le plafond de la
dette soit relevé avant la date fatidique du 2 août. Le mécanisme de
plafonnement par voie législative de la dette américaine a été instauré en 1917
à la veille de l'entrée en guerre des Etats-Unis afin d'offrir davantage de
marge de manÅ“uvre au gouvernement tout en fixant une limite d'endettement à ne
pas dépasser. Jusqu'à l'adoption de cette procédure, le Trésor américain devait
faire une demande spécifique au Congrès pour toute levée de fonds sur les marchés.
Ainsi depuis l'instauration du plafond, l'administration n'a recours à la
chambre des représentants que lorsqu'il s'agit de relever la limite
précédemment fixée. Sous l'effet des dépenses militaires et des guerres menées
par le président G.W. Bush, ce fameux plafond a littéralement explosé au cours
de la dernière décennie, il a été augmenté dix fois depuis 2001, triplant le
plafond de la dette qui est passé de 5 950 milliards de dollars en 2001 à 14 294
milliards en 2011. Le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz
estimait en 2009 que la seule guerre d'Irak avait coûté 3 000 milliards de
dollars…
Croisade
ultralibérale républicaine risquée
Il ne s'agit donc
en rien d'une demande inhabituelle de la part de l'exécutif américain, mais qui
se heurte cette année aux conditions de réduction drastique des dépenses
publiques exigées par les Républicains embarqués dans une épreuve de force
idéologique. L'effort de réduction des dépenses publiques auquel s'est engagé la Maison-Blanche ne
satisfait pas le Parti républicain poussé par son aile d'extrême-droite
« libertarienne » du mouvement du tea-party.
Ces milieux sont engagés dans une véritable croisade ultralibérale visant à
démanteler ce qu'ils appellent le « big government » et notamment sa dimension sociale dont les
programmes Medicare et Medicaid
destinés aux plus vulnérables et aux démunis sont pour eux les symboles
abhorrés. Mais si les conséquences économiques risquent d'être désastreuses par
la compression de la consommation des ménages, moteur de l'économie américaine,
les implications politiques ne sont pas nécessairement favorables aux
républicains. En jouant sur ce levier jusqu'à l'ultime moment le leader
conservateur Newt Gingrich
avait suscité le mécontentement de l'électorat et contribué à la réélection de
Bill Clinton en 1995.
Les répliques du
séisme des subprimes
Des deux côtés de
l'Atlantique les économies continuent de souffrir des répliques du séisme des subprimes de 2008 et des déficits liés aux aventures
guerrières des néoconservateurs ultralibéraux. La
seule réponse des gouvernants consiste à sabrer dans les dépenses sociales ; et
donc à faire payer, in fine, aux plus pauvres, des options qui continuent de
profiter aux nantis et au complexe militaro-financier
qui domine le G8. La financiarisation mondialisée s'est accompagnée d'un
creusement des inégalités (cf. l'excellent article de Michel Husson in Chronique internationale de l'IRES
- n° 130 - mai 2011 ), de la multiplication des crises
sur un fond de marasme économique très préoccupant. Pour autant, peu de voix
s'élèvent pour exiger une rupture urgente avec un modèle dominé par la
spéculation financière. D'autres crises, d'une ampleur encore plus grandes, sont
donc à venir.
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Posté Le : 19/07/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Saïd Mekki
Source : www.lequotidien-oran.com