Le parlement européen a abrité, mercredi et jeudi, une rencontre avec les élus des parlements nationaux autour de l'enjeu de l'immigration. L'Union européenne vieillissante veut du sang neuf venu du sud, sans se soucier de l'hémorragie causée à ces pays. Si ce n'est pas de l'égoïsme...
Députés du Parlement européen (PE) et élus des parlements nationaux des 27 pays membres de l'UE ont, mercredi et jeudi, débattu à Bruxelles de la question de l'immigration, de son impact sur les relations avec les pays tiers et sur l'avenir de l'Europe. Ecoutant, tour à tour, les interventions du président du PE, Hans Poëttering, du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso et celle du ministre français à l'Immigration, l'Identité et l'Intégration, Brice Hortefeux en tant que représentant de la présidence de l'UE (France), les élus européens ont mis en place trois groupes de travail portant sur l'immigration légale et son intégration, la lutte contre l'immigration clandestine, et la politique d'asile. Tout de suite un constat : l'immigration représente, officiellement, 3,8 % de la population totale de l'UE en 2008. La Commission européenne estime que le nombre annuel d'arrivants varie entre 1,5 et 2 millions et conclue «que rien ne laisse présager que les flux d'immigration diminueront à l'avenir». L'autre constat tient à la tendance vieillissante de la population européenne et de son besoin de main d'oeuvre étrangère. D'ici 2060, «la population en âge de travailler devrait diminuer de 50 millions si l'immigration est maintenue à son niveau actuel, et de 110 millions sans cette immigration» estiment les stratèges de l'UE. Ce qui, évidemment, vous l'aurez deviné, pose au régime des pensions et retraites un sérieux problème de financement. Face à un tel dilemme, l'UE s'échine à trouver une solution commune, soit une politique commune de l'immigration. Et ce n'est pas aussi évident, tant les exigences économiques, humaines et politiques varient d'un pays à l'autre de l'Union. C'est que depuis 1999, et le Conseil européen de Tempere (Portugal) qui avait lancé les premiers jalons d'une politique commune de l'immigration, au «pacte européen sur l'immigration et l'asile» dans sa dernière version de juillet 2008, l'UE peine à uniformiser ses lois et règlements en la matière et, surtout, à rencontrer une forte adhésion des pays tiers, zones de transit et pourvoyeurs de cette immigration. Comment peut-il en être autrement lorsque l'UE affirme d'une part, que seul le développement des pays tiers, notamment sud-méditerranéens, contiendra les flux migratoires incontrôlés et qu'elle encourage d'autre part, pour elle-même, une immigration choisie? En d'autre termes, l'UE vise à rajeunir sa population par l'apport d'une immigration jeune et hautement qualifiée provenant de ces pays en développement, tout en leur demandant de contenir le reste des flux migratoires. Pour paradoxale qu'elle soit, cette façon de concevoir la coopération internationale dans ce domaine est, aux yeux de l'UE, juste et légitime, à tel point que les débats sur la question sont, aujourd'hui, intégrés au chapitre de sa politique extérieure. Ainsi, avec bon nombre de pays tiers, l'UE inclue, comme condition préalable à tout accord de coopération, la question migratoire. A ce jour, 14 pays tiers ont signé des accords de réadmission avec l'UE, dont la Chine, la Géorgie, l'Albanie...). L'Algérie n'applique pas encore, officiellement, le principe de réadmission même s'il est contenu dans l'Accord d'association. Et puis il y a l'autre contexte dans lequel est conçue la politique de l'immigration européenne : celui de la sécurité. S'il est évident que la conception d'une politique de l'immigration est tributaire du domaine sécuritaire, en particulier depuis l'internationalisation du phénomène terroriste, il n'est pas raisonnable de la bâtir sous cet unique aspect. Qu'on le veuille ou non, la propagande des médias occidentaux associe «immigration et sécurité», voire terrorisme, sous mille et une facettes de l'actualité quotidienne. Aucun pays au monde ne nie la complexité de la gestion des flux migratoires puisque l'ONU les a inclus parmi les «objectifs du millénaire» et en a discuté au sein du Forum mondial tenu à Bruxelles en juillet 2007, comme lors de son Assemblée générale de novembre de la même année. Le problème avec l'UE est qu'elle veut mettre en place une politique sur l'immigration qui tienne compte de ses seuls intérêts d'abord. Ensuite les autres. On a vu lors du Sommet UE - Afrique de Lisbonne (Portugal) de décembre 2007 - comment, en plus de vouloir réduire les pays africains au rôle de gardes frontières de l'Europe, leur imposer par ailleurs l'application des fameux Accords de partenariat économiques (APE). Ces derniers accords pénalisent plus encore les fragiles économies africaines et poussent leurs populations à chercher des cieux plus cléments. En dehors du Maroc, de la Libye et du Sénégal qui ont accepté ce rôle de gendarme de l'Europe, la majorité des autres pays n'est pas prête à ce jeu de dupes. Dans l'hémicycle du PE, le DG adjoint de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), organe de l'ONU, M. Ndioro NDIAYE, n'est intervenu qu'au deuxième jour de la rencontre. Bien après le ministre français Brice Horteufeux et l'autre français, Jacques Barrot, Commissaire européen à la justice, la liberté et la sécurité. Tout un symbole de la conception européenne des phénomènes migratoires dans leur dimension universelle. Pour le reste, les débats ont sonné comme du déjà vu et entendu. Rien de bénéfique au delà de la...Méditerranée.
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Posté Le : 13/09/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Correspondant A Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med
Source : www.lequotidien-oran.com