Des regards effrayants, qui vous guettent de biais. Mystérieux. Des visages effrayants, qui font peur, accentués par ces yeux entêtants, qui semblent vous épier, comme sortis d'un film d'horreur, des êtres monstrueux, difformes, désarticulés et autres étrangetés, c'est ce que vous découvrez lorsque vous pénétrez dans l'espace-galerie de l'Institut français d'Alger où se tient une très belle, mais énigmatique exposition de la jeune artiste peintre. L'oeil semble être la pièce maîtresse par laquelle naît cette exposition, puisque c'est le miroir de l'âme où se réfléchissent, se composent et se décomposent mille et un états d'âme. Grace à une maîtrise parfaite du trait entre ombre et lumière, l'artiste exprime à sa façon le tourbillon complexe et macabre qui peut gésir en chacun de nous. Mais au-delà de la profonde froideur qui se décèle au sein de ces personnages peints avec minutie, il y a lieu de souligner la finesse du pinceau de cet artiste qui peint des corps, des visages, tantôt dans un réalisme cru et tantôt dans un surréalisme strident. Et c'est là ou réside l'originalité de ces oeuvres, dans ce fil tenu qui sépare le réel du fantastique surnaturel et grotesque qui relève de l'époque baroque,voire du Moyen Age. des créations picturales réalisées par une jeune esthète qui est à sa première exposition, après celle de l'Institut culturel français d'Annaba qui a gagné à mettre en lumière cette artiste et la sortir des ténèbres pour l'emmener vers la lumière en allant à la rencontre d'un public, qui ne peut être qu'admiratif devant ces tableaux et loin s'en faut, ne pas rester de marbre devant un tel talent, pour lequel on ne peut que faire allégeance et tirer son chapeau... Si ces peintures impressionnent, elles ne peuvent que susciter moult interrogations. Interpeller notre psyché.Dans «Peau inversée» nous percevons de l'inquiétude, de l'effroi, de la force, mais aussi du grotesque dissimulé sur fond de fragilité humaine. «Peau inversée» est le titre de cette expo, à la vision bien troublante au premier abord. «J'ai longtemps retardé l'échéance. Les créatures se faisaient de plus en plus nombreuses, elles s'agitaient dans ma tête, fouillaient dans mes souvenirs, parlaient, commentaient, jugeaient, elles vivaient en moi, dans ma pauvre tête... Et je ne voulais pas qu'elles y meurent. Alors, j'ai un jour décidé de les libérer, de me libérer.» confie la jeune artiste, née en 1997 dans un petit village près de la ville de Batna. «Lorsque j'ai rencontré Aya Bennacer pour la première fois, ce qui m'a marquée c'est la manière dont son regard, et tous ses gestes s'animaient à l'évocation de son travail de peintre; c'est le désir de donner à voir ses oeuvres, qui emplissait l'espace et ne me laissa pas indifférente.», souligne la directrice de l'Institut français d'Annaba.
Des yeux qui vous guettent
Côté biographie, nous apprenons qu'Aya Bennacer a toujours développé une passion pour les arts et la culture. Très jeune déjà elle choisit de s'évader dans l'univers de la littérature où elle trouve sa place, loin d'un monde qui lui semble, déjà à l'époque, particulièrement hostile. Après un baccalauréat technique, elle poursuit à l'ENS de Constantine des études supérieures en langue et littérature françaises, renforçant ainsi le lien déjà solide qu'elle entretient avec les lettres et la philosophie.
Un monde inquiétant
En 2019, un besoin d'expression irrépressible la pousse vers les arts plastiques, et la peinture en particulier, point de départ de sa pratique d'artiste autodidacte. Au début, son art est une description de ses lectures, dont elle extrait des images. C'est ainsi qu'elle commence par dessiner des portraits, de Michel Foucault, Franz Kafka ou Vladimir Lénine enfant, des philosophes et auteurs qu'elle idolâtre. Avec le temps et la pratique, elle commence à développer une vision et une expression du monde propres à elle. Ainsi sa peinture évolue et sa technique mûrit. Aya Bennacer est également musicienne et chanteuse, et c'est particulièrement dans le blues et le jazz qu'elle se complait. Elle fait aussi de la sculpture et crée des bijoux. «Pour cette première exposition, Aya Bennaceur a choisi des oeuvres qui la structurent, comme les vertèbres inter reliées qui soutiennent cette colonne vertébrale, se font nécessité au reste de ce corps disloqué (Vohle), torturé, évoquant les danses macabres dans l'art du Moyen Âge. Telle une Vanité fièrement exposée, elle questionne notre humanité et l'éphémère condition de l'existence, cette pulsion miraculeuse qui retient la vie dans le corps représenté» peut -on lire dans le texte descriptif de cette exposition. À voir absolument!
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Posté Le : 20/09/2022
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : O HIND
Source : www.lexpressiondz.com