Algérie

Et malgré tout «Mazal kayen l'espoir»' Cheb Hasni, 18 ans après sa disparition



Et malgré tout «Mazal kayen l'espoir»'                                    Cheb Hasni, 18 ans après sa disparition
Cheb Hasni n'est pas de cette race d'artistes qu'on évoque au passé. Même mort, il continue de faire débat, de s'attirer de nouveaux fans et surtout de réaliser des ventes qui feraient pâlir d'envie des chanteurs vivants qui n'arrivent pas à faire flamber le hit parade.
Hasni, dix-huit ans après, continue de roucouler comme au bon vieux temps. Ses paroles continuent de servir de musique de fond aux idylles naissantes et aux histoires d'amour finissantes. On continue de puiser dans son répertoire pour colorier les plus chaudes des sérénades.
Même mort, il continue d'être une poule aux 'ufs d'or pour une frange de producteurs qui continuent de dupliquer ses chansons. Les royalties, ils n'en ont cure du moment que le marché n'est pas près d'oublier le roi du sentimental.
Sa mère, sa famille, sa veuve, son enfant Abdallah, sont le dernier des soucis de ces commerçants du dimanche sans foi ni loi. On duplique, on fait grincer la caisse enregistreuse et on achève bien les chevaux. 29 septembre 1994, alors que le quartier de Gambetta, emmitouflé dans sa monotonie, s'apprêtait à vivre un après-midi d'automne, des balles assassines ont brisé un élan.
L'écho de leur déflagration a fait frémir les murs de la ville, que dire, du monde. On a assassiné l'amour, on a assassiné la chanson sentimentale.
On a tué Cheb Hasni qui tire ainsi sa révérence, ironie du sort dans son quartier natal, et entouré de ses amis, ceux qui ont accompagné ses premiers pas de footballeurs et ses premiers trémolos de chanteur.
En participant au stade 5 Juillet à un gala non-stop en solidarité avec les enfants de Somalie, il avait agrandi la foule de ses fans qui ne se recrutaient plus parmi les mordus du raï de M'dina Jdida, Derb, Gambetta ou dans les contrées reculées de l'Ouest.
On chantait depuis cette soirée du Hasni dans toutes les chaumières du pays. Galou Hasni mate (on a annoncé la mort de Hasni), une chanson prémonitoire pour le chanteur qui avait également chanté El-visa, l'espoir Mazal kayen l'espoir,
El hedda (l'émigration).
Même mort, il dérange
Son enterrement fut pour la jeunesse algérienne l'occasion de crier sa haine contre les fossoyeurs de l'espoir, contre ceux qui croyaient faire triompher les ténèbres sur l'éclat de la lumière.
Mort, Hasni dérangeait encore plus. Il était devenu le symbole d'une jeunesse qui croyait en de meilleurs lendemains, qui refusait d'abdiquer. Ses chansons sont un véritable hymne à la vie. Il ne chante pas le désespoir ou l'abattement. Il chante l'espoir, l'amour et l'avenir. Le petit enfant de soudeur, qui était prédestiné à une brillante carrière de footballeur, avait choisi sa voie. Il avait emprunté les tumultueux sentiers de la chanson. Il avait brillé au firmament avant que son envol ne soit brutalement stoppé par la haine. On a tué Hasni.
Hasni est mort, mais l'espoir est devenu plus fort. Aujourd'hui, sa famille se bat pour faire valoir ses droits. Elle se bat contre ceux qui profitent encore de l'aura du chanteur, ceux qui se font passer pour ses amis pour mieux l'abattre. Elle se bat contre l'amnésie qui s'insinue dans la mémoire collective.
Elle se bat contre mille et un pique-assiettes qui veulent encore profiter avant que la table ne soit desservie. Ceux qui l'aiment se contenteront d'évoquer avec nostalgie son souvenir.
Ceux qui l'aiment se rendront sur sa tombe pour y déposer une fleur. Ceux qui l'aiment iront se recueillir devant la plaque de marbre qui marque le lieu où il a été assassiné. Ceux qui l'aiment continueront de l'aimer. Mais ceux qui voyaient en lui une corne d'abondance promettront encore une fois à ses fans un album exclusif et jureront que le chanteur l'avait enregistré avant de tirer sa révérence. Dors en paix, Hasni !


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