Algérie

Essence du processus inflationniste en Algérie et ses incidences socio- économiques



«Il nous appartient de dire la vérité, rien que la vérité, sans sinistrose gratuit, démobilisateur, ni autosatisfaction loin de la réalité, devant privilégier les intérêts supérieurs de l'Algérie»Depuis le début du Ramadhan, la majorité des produits connaissent une hausse vertigineuse ayant un impact sur le pouvoir d'achat des Algériens. Le ministère du commerce doit éviter des prévisions euphoriques et tranchants il y a 72 heures je le cite «il y aura une baisse des prix dans trois jours». Il lui reste 24h à compter du 17 mai 2018, pour vérifier sa prévision en allant au marché et donc sa crédibilité qui engage tout le gouvernement. Or la maîtrise du processus inflationniste renvoie à toute la politique économique du gouvernement et concerne tant des facteurs exogènes du marché international, que plusieurs départements ministériels d'où l'importance d'une démarche cohérente.
Il s'agit d'analyser avec lucidité et objectivité les raisons du processus inflationniste et les incidences socio-économiques S'agissant d'un problème aussi complexe que celui de l'inflation, il me semble utile de préciser que qu'une analyse objective doit tenir compte de la structure et des particularités de l'économie à laquelle ils sont appliqués, les aspects de structures de l'économie internationale, de l'économie interne résultant de l'option de la stratégie de développement économique, aux schémas de consommation générés en son sein pour des raisons historiques, d'influences socioculturelles et aux composantes des différentes forces sociales pour s'approprier une fraction du revenu national.
La donnée démographique me semble stratégique. La population algérienne est passée de 12 millions en 1965, de 34 591 000 le 1er juillet 2008, à 37,5 millions d'habitants en 2010, 39,5 millions d'habitants au 1er janvier 2015, 40,4 au 1er janvier 2016, 41,2 millions d'habitants au 1er janvier 2017 et s'oriente vers 50 millions horizon 2030 avec une demande additionnelle d'emplois variant entre 350.000/400.000/an qui s'ajoute au taux de chômage actuel.
Le taux d'inflation officiel entre 1989 et le premier trimestre 2018 a été le suivant : 17 87% en 1989 ; 25 88% en 1991 ; un pic de 31,68% en 1992 ; 21,9% en 1995 ; 5% en 1998. En 1999 : 4/2% ; en 2000 : 2% ; 2001 et 2002 : 3% ; en 2003 : 3,5% ; en 2004 : 3,1% ; en 2005 1,9% ; en 2006 : 3% ; en 2007 : 3,5% ; en 2008 : 4,5% en 2009, 5,7% en 2010, 5% ; en 2011, 4,5%, en 2012, 8,9%, en 2013, 3,3%, en 2014, 2,9%, en 2015, 6,7% en 2016 8% en janvier 2017 et selon l'ONS, l'évolution des prix à la consommation en rythme annuel jusqu'à février 2018 est le taux d'inflation moyen annuel calculé en tenant compte des 12 mois allant de mars 2017 à février 2018 par rapport à la période allant de mars 2016 à février 2017 a été de 5%.
Mais il faut faire une analyse objective car l'indice d'inflations se calcule par rapport à la période précédente. Ainsi un taux d'inflation faible en T1 par rapport à un taux d'inflation élevé par rapport à To donne cumulé un taux d'inflation élevé et se pose la question de l'évolution du salaire réel par rapport à ce taux cumulé.
Aussi, l'indice global de l'inflation, doit être régulièrement réactualisé car le besoin est historiquement daté, les besoins évoluant, le taux d'inflation officiel étant biaisé, devant l'éclater par produits selon le modèle de consommation par couches sociales (fonction de la stratification du revenu national). Il est de surcroît comprimé artificiellement par les subventions sinon il dépasserait les 10%.
Car la perception de l'inflation est différente d'une personne qui perçoit 200 euros par mois de celle qui perçoit 10.000 euros n'ayant pas le même modèle de consommation. Un agrégat global comme le revenu national par tête d'habitant peut voiler d'importantes disparités entre les différentes couches sociales. Une analyse pertinente devrait lier le processus d'accumulation, la répartition du revenu et le modèle de consommation par couches sociale, devant déflater par le taux d'inflation réel pour déterminer le véritable pouvoir d'achat.
Aussi, une interrogation s'impose : comment est-ce qu'un Algérien, qui vit au SNMG, (moins de 190 euros par mois, au cours officiel soit 6,2 euros par jour, et 4 euros/jour sur le marché parallèle alors que le kilo de viande est de plus de 10 euros, la majorité des fruits dépasse 2 euros le kilo, sans oublier les produits de première nécessité comme la pomme de terre, fait face aux dépenses incontournables : alimentation, transport, santé, éducation. La cellule familiale, paradoxalement, la crise du logement (même marmite, même charges) et les subventions et transferts sociaux mal ciblées et mal gérés jouent temporairement et imparfaitement comme tampon social, encore qu'il faille pas seulement se focaliser sur les subventions aux produits de première nécessité, le montant des surcoûts des projets, la mauvaise gestion et la corruption qui alourdissent le prix final aux consommateurs.
L'inflation joue comme vecteur de redistribution et de concentration du revenu national au profit des revenus variables et pénalise les revenus fixes. Nous sommes dans un cercle vicieux : l'inflation accélère les revendications sociales pour une augmentation des salaires qui à leur tour en cas de non productivité accélère l'inflation. Comme la détérioration du pouvoir d'achat accroît soit l'endettement des ménages ou accélère la dé-thésaurisation des ménages notamment les couches moyennes qui se paupérisent en la mettant en circulation, leur épargne gonflant la masse monétaire en circulation, accélérant, en cas de rigidité de l'offre, le processus inflationniste.
Qu'en sera t-il avec l'éclatement de la cellule familiale et en cas de chute du cours des hydrocarbures ne pouvant plus subventionner, un couple avec deux enfants devant percevoir minimum entre 45.000 et 60.000 dinars/mois pour uniquement substituer et devant éviter un nivellement par le bas pour des rasions populistes suicidaires ' Or toute Nation ne peut distribuer que ce qu'elle a préalablement produite quitte à aller vers la dérive politique, sociale et économique.
2.-Quelles sont donc les raisons essentielles de l'inflation en Algérie ' Bien que dialectiquement solidaires, je recense trois raisons essentielles.
-Premièrement, l'inflation provient de la faiblesse de la production et de la productivité interne du fait que 97/98% des exportations sont le résultat des hydrocarbures à l'état brut et semi brut tenant compte des déchets d'hydrocarbures comptabilisés dans la rubrique exportation hors hydrocarbures.
C'est que plus de 95% du tissu économique sont constitués de PMI/PME organisées sur des structures familiales, ne possédant pas de management stratégique, ne pouvant pas faire face à la concurrence internationale. Les importations couvrent 70/75% des besoins des ménages et des entreprises dont le taux d'intégration ne dépasse pas 10/15%. On peut démontrer facilement que le taux de croissance officiel hors hydrocarbures de 5/6% a été permis pour 80% via la dépense publique et qu'il ne reste pour les entreprises véritablement autonomes créatrices de richesses, pouvant évoluer dans un environnement concurrentiel mondial, moins de 20% du produit intérieur brut. Nous avons évidemment la croissance démographique et le versement de salaires sans contreparties productives.. Le taux de chômage officiel est biaisé incluant les sureffectifs des administrations, des entreprises publiques, les emplois dans la sphère informelle et les activités temporaires de moins de six mois, pour partie des emplois improductifs.
Or, le taux d'emploi est fonction du taux de croissance et des structures des taux de productivité.. Car la vrai richesse ne peut apparaître que dans le cadre de la transformation du stock de monnaie en stock de capital, et là est toute la problématique du développement. La non proportionnalité entre les dépenses monétaires et les impacts favorise l'inflation.
Avec l'importance de la dépense publique, le taux de croissance qui aurait dépasser 10% entre 2004/2017 alors que la moyenne a été de 3% : mauvaise allocation des ressources, mauvaise gestion, corruption ' Selon un rapport pour la région MENA, l'Algérie pour des pays similaires dépense deux fois plus pour avoir deux fois moins de résultats, démontrant une mauvaise gestion pour ne pas dire une corruption socialisée. Et l'Etat algérien continue de dépenser sans compter en lançant des projets non fiables à terme économiquement souvent pour des raisons de prestige.
Tant qu'il y a la rente. Mais l'Algérie peut-elle continuer dans cette voie suicidaire de subventions généralisées sans ciblage, de versements de salaires sans contreparties productives, des assainissement répétées des entreprises publiques avec des recapitalisations répétées des banques publiques contrôlant 80% du crédit global, malades de leurs clients souvent non bancables, au risque sans relèvement des taux d'intérêt d'une faillite du système bancaire freinant l'investissement ' Cette masse monétaire sans contreparties productives alimente le processus inflationniste.
-La deuxième raison est à la fois la dévaluation rampante du dinar. La cotation officielle du dinar/1970/ mai 2018 est la suivante : 1970 : 4,94 dinars un dollar 1980 : 5,03 dinars un dollar 1995 : 47,68 dinars un dollar 2001...69,20 dinars un euro 77,26 dinars un dollar -2002...75,35 dinars un euro -69,20 dinars un dollar 2003...87,46 dinars un euro 77,36 dinars un dollar -2004...89,64 dinars un euro 72,06 dinars un dollar-2005...91,32 dinars un euro 73,36 dinars un dollar-2006...91,24 dinars un euro 72,64 dinars un dollar 2007...95,00 dinars un euro- 69,36 dinars un dollar -2008...94,85 dinars un euro 64,58 dinars un dollar-2009..101,29 dinars un euro 72,64 dinars un dollar-2010..103,49 dinars un euro 74,31 dinars un dollar-2011..102,21 dinars un euro 72,85 dinars un dollar-2012,102,16 dinars un euro 77,55 dinars un dollar-2013..105,43 dinars un euro 79,38 dinars un dollar-2014, 106,70 dinars un euro 80,06 dinars un dollar- 2015, 108,60 dinars un euro 99,50 dinars un dollar. Le 19 mai 2018, nous avons - 116,02 dinars un dollar et 137,05 dinars un euro ( achat).
C'est que ce dérapage du dinar officiel voile l'importance du déficit budgétaire, donc l'efficacité de la dépense publique. On peut établir un coefficient de corrélation entre la cotation du dinar, le niveau des réserves de change provenant des hydrocarbures et l'évolution des recettes des hydrocarbures pour un taux d'environ 70%, 30% étant dues aux phénomènes spéculatifs et aux sections hors hydrocarbures bien que limitées.
Avec une diminution des réserves de change inférieur à 20 milliards de dollars, pouvant tendre vers zéro horizon 2020/2022 au rythme de la dépense publique actuelle, la cotation du dinar s'établirait à entre 200/250 dinars un euro au cours officiel et plus de 300 dinars un euro sur le marché parallèle, les réserves ayant substantiellement baissé entre 2012/2017 :-2012 :190,6 milliards de dollars, -2013 :194,0 milliard de dollars, -2014 :178,9 milliards de dollars, -2015 :144,1 milliards de dollars, -2016 : 114,1 milliards de dollars, -2017 : 97,3 milliards.
Pour 2018/2020/2022, le niveau des réserves de change sera fonction essentiellement du cours des hydrocarbures et de la relance économique sections hors rente conditionnée par de profondes réformes structurelles afin d'éviter le scénario pessimiste du rapport récent de la banque mondiale (rapport de février 2018). Le cours du pétrole Brent a été de 111 dollars le baril en 2012, 108 dollars en 2013, 100 dollars en 2014, 53 dollars en 2014, 45 dollars en 2015, 54 dollars en 2017 et qui a été coté le 19 mai 2018 à 78,67 dollars le Brent, du à la faiblesse du dollar et surtout pour des raisons de tensions géostratégiques au Moyen Orient.
- La troisième raison du processus inflationniste est la dominance de la sphère informelle produit des dysfonctionnements des appareils de l'Etat et le manque de vision stratégique qui bloquent l'émergence d'entreprises productives. (voir étude du professeur Abderrahmane Mebtoul «Essence de la sphère informelle au Maghreb et comment l'intégrer à la sphère réelle» Institut Français des Relations Internationales ? IFRI- (Paris- Bruxelles décembre 201360 pages) Le taux sur le change du marché parallèle Port Saïd/Alger au mois de mai 2018, nous avons un euro qui dépasse 2010 dinars un euro. la majeure des produits importés, excepté les produits subventionnés, d'alignant sur le cours du marché parallèle.
Pour cette sphère il s?agit différencier trois ratios qui donnent des montants différents expliquant les données contradictoires des responsables. Sa part dans la masse monétaire en circulation environ 40% données, 25/30% du produit intérieur brut (PIB) et enfin par rapport à l'emploi environ 30% selon le ministère du Travail, et plus si l'on inclut le taux d'activité de la population féminine. Or, 70-75% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées étant importés, la dévaluation du dinar officiel et sur celui du marché parallèle accélérant le processus inflationniste tant des biens finaux que sur le coût des matières premières et des équipements Cette sphère informelle en Algérie contrôle 65/70% des segments de produits de première nécessité auxquels plus de 70% des ménages consacrent presque l'intégralité de leurs revenus (marché fruits et légumes, poisson, viande rouge et blanche, textile et cuir) et sans compter les factures de plus en plus élevées de l'eau et de l'électricité qui absorbent une fraction importante du revenu des ménages pauvres et moyens accroissant leur endettement.
Au niveau de cette sphère, le contrôle de la masse monétaire en circulation permet une importante intermédiation financière informelle mais avec des taux d'usure accroissant l'endettement des ménages qui s'adressent à cette sphère. L'importance de cette masse monétaire captée, favorise une concentration du revenu au niveau de cette sphère avec des tendances monopolistiques et souvent oligopolistiques (quelques offreurs pour une multitude de demandeurs) et alimente, la demande au niveau du marché parallèle de la devise et l'évasion fiscale. Les transferts illégaux au moyen de surfacturation par le canal de vases communicants (rapatriements) permettent paradoxalement accroître l'offre et d'éviter un dérapage plus accentué du dinar sur le marché parallèle.


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