Algérie

Essais nucléaires dans le Sahara algérien: Le secret-défense sous la loupe



Les très patientes et endurantes associations des vétérans des essais nucléaires (AVEN) et l'Association des travailleurs polynésiens des sites nucléaires (Moruroa e tatou) viennent de marquer un point dans leur combat destiné à rendre justice aux victimes civiles et militaires des essais nucléaires français dans le Sahara algérien et en Polynésie française.

Les deux associations qui ont déjà contribué à sortir le dossier de la négation officielle. L'Etat français a adopté, à la suite du long combat mené par les associations, une loi n° 2010-2, du 5 janvier 2010, relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Même si cela constituait un progrès par rapport au déni qui a prévalu jusque-là, cette loi a été jugée insuffisante et excessivement restrictive par les associations qui continuent de combattre pour la «vérité et la justice» des personnes exposées aux radiations dans le Sahara et en Polynésie, entre 1960 et 1996. Selon le ministère français de la Défense, 150.000 civils et militaires ont participé aux 210 essais menés par la France, dans le Sahara algérien puis en Polynésie française. Nombre de ces personnes exposées ont développé des cancers et le combat des associations consistait à faire reconnaître un lien de causalité entre leur état de santé et les essais nucléaires. Le combat des associations est semé d'embuches. L'une de ces embuches s'est manifestée par l'opposition du «Secret Défense» à la demande de communication de pièces et documents au ministère français de la Défense. AVEN et «Moruroa e tatou» ont décidé, en octobre 2007, de saisir le tribunal administratif contre ce refus de communiquer des pièces au motif qu'elles seraient couvertes par le Secret Défense. Les deux associations ont été entendues par le tribunal administratif de Paris qui a ordonné, en son audience du 22 septembre 2010, «au ministère de la Défense de saisir la commission consultative du Secret Défense et de justifier un éventuel refus de communiquer les pièces demandées».

«Une affaire qui fait jurisprudence»

Même si cela ne préjuge pas de la décision de la commission consultative, l'association AVEN s'est réjouie, dans un communiqué de «l'importance de cette décision puisqu'elle devrait faire jurisprudence, attendu qu'elle est rendue à la demande des associations et qu'elle couvre toute la période des essais nucléaires (1960-1996)» français au Sahara algérien et en Polynésie. Statuant sur le rejet opposés au nom du Secret Défense, le tribunal administratif de Paris a décidé «qu'il sera demandé au ministre de la Défense de saisir sans délai la commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) afin qu'elle émette, dans un délai de deux mois, à compter de sa saisine, un avis sur la déclassification et la communication des documents visés par les associations requérantes, en date du 22 octobre 2007". Le tribunal demande également au ministre de la Défense de se prononcer à nouveau sur ladite déclassification et ladite communication». «Dans le cas où (le ministre) estimerait que la déclassification et la non communication de tout ou partie de ces documents sont justifiées par le secret de la défense nationale», il devra «verser au dossier tous les éléments d'information sur les raisons de l'exclusion des documents en cause», ordonne le tribunal.

 Selon la procédure, le ministère de la Défense est obligé de transmettre à la commission consultative la demande du tribunal. Ce sera ensuite à la commission de statuer et de décider de déclassifier tout ou partie des documents ou refuser la dé-classification sur l'ensemble. La CCSDN a été instituée en vertu de la loi du 8 juillet 1998. Il s'agissait d'éviter que le gouvernement en fasse un usage abusif. En vertu de cette loi, l'autorité qui a procédé à la classification d'un document doit requérir l'avis de la Commission, quand la justice le demande. Lorsque la déclassification est demandée par une juridiction, la saisine de la CCSDN est obligatoire même si le ministre n'est pas obligé de suivre son avis. Selon l'AFP, le porte-parole du ministère de la Défense, Philippe Tanguy, a souligné que «depuis son arrivée, Hervé Morin a toujours suivi les avis de la commission consultative du Secret Défense». «Il devrait en être de même dans ce cas».




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