Algérie

Éssais concluants


Poursuivant leur démarche d'exigence dans le choix de leurs publications, la diversification de leur catalogue et la qualité graphique de leurs ouvrages, les Editions Barzakh viennent de placer en librairies plusieurs essais issus de leur partenariat avec Acte Sud. Cette maison très européenne qui s'emploie à partir d'Arles à développer une démarche éditoriale éloignée du parisianisme de nombre d'éditeurs français, veille à mériter son enseigne en regardant vers tous les Sud de la planète et notamment la Méditerranée. Ce qui est remarquable dans la collaboration entre les deux éditeurs, c'est que les livres coédités sortent quasi-simultanément en Algérie et en France. Dans cette fournée, le lecteur algérien pourra découvrir un livre précieux, cosigné par l'Emir Abdelkader et le général Daumas, et intitulé Dialogues sur l'hyppologie arabe (478 p). Il s'agit de la réédition d'un ouvrage rare de 1851 dont l'édition intégrale que propose Barzakh a été établie par François Pouillon, directeur de recherche à l'Institut des hautes études en sciences sociales et, dans le privé, fils de Fernand Pouillon l'architecte bien connu en Algérie.Toute la science et le savoir-faire des Arabes sur les chevaux se retrouvent dans cette somme. Une tradition ancestrale perpétuée en Algérie au temps de l'Emir et, aujourd'hui encore, dans quelques régions où se pratique l'équitation traditionnelle. Ce n'est pourtant pas un livre sur le cheval exclusivement mais sur un univers historique, social et culturel comme l'indique son titre original : « Les chevaux du Sahara et les m'urs du désert ». Il peut donc être lu par tout lecteur curieux d'histoire sans qu'il ait un jour monté un cheval. On y trouve à la fin un texte en arabe rétabli à partir d'un manuscrit détérioré, « Le Petit traité sur les chevaux » de l'Emir Abdelkader rédigé au milieu du XIXe siècle. Dans la collection Falsafa de Barzakh, à signaler la parution attendue de Derrida à Alger, un regard sur le monde qui reprend les actes du colloque tenu à la Bibliothèque Nationale d'Algérie en novembre 2006, à l'initiative de Mustapha Chérif.Les textes permettent de mieux comprendre les théories du grand philosophe, né en 1930 à El Biar, mais aussi et surtout de défricher ses liens étroits avec l'Algérie. Les témoignages indiquent comment l'enfant Derrida, en tant que juif, fut chassé de l'école durant la 2e Guerre mondiale et comment, ne trouvant de solidarité qu'auprès des musulmans, sa vision du monde en fut marquée à jamais. Il n'est pas étonnant par exemple qu'après les attentats du 11 septembre 2001, il ait déclaré : « Ils ont été, certes, exécutés par « eux » mais « nous » (les Occidentaux) avons voulu qu'il en soit ainsi ». Les 17 textes qui composent cet ouvrage de 192 pages sont une mine d'informations et de découvertes d'une 'uvre philosophique où l'Algérie a tenu une part importante, révélée ici par des auteurs dont on peut souligner la pertinence et l'originalité des écrits.L'image de la femme au Maghreb (121 p.), coordonné par Khadidja Mohsen-Finan, offre une lecture très intéressante de la représentation de la femme dans cette région et, partant, de sa condition. Zakya Daoud analyse « La situation de la Marocaine à travers la presse et les médias ». Hédi Khellil se penche sur les « Représentations de la femme dans le cinéma tunisien » tandis que Ghania Mouffok aborde les femmes algériennes par le biais de la presse écrite, mettant en évidence les limites et contradictions d'un traitement médiatique. Enfin, l'historien du Maghreb contemporain, Pierre Vermeren, propose une analyse des femmes diplômées au Maghreb et de leur image dans la société.Dans le prolongement thématique de cet ouvrage, un autre aborde « La puissance maternelle en Méditerranée, mythes et représentations », un voyage sur les rives de cette mer et de ses mères, depuis les mythologies fondatrices (dont l'ogresse Teryel des contes kabyles) jusqu'aux représentations modernes comme celles du cinéma. Plus de 160 pages d'une densité passionnante. Enfin, Barzakh et son partenaire, proposent un classique de la pensée sociale et politique en format de poche (Babel), le fameux ouvrage d'Alexis de Tocqueville Sur l'esclavage, présenté et annoté par Seloua Luste-Boulbina. Un ouvrage de référence que les étudiants en sciences humaines cherchaient jusque-là en vain et qui trouvera sans doute aussi d'autres lecteurs.
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