Algérie

«Es'sefqa» et «Kiyass ou labess» séduisent le public



Le TNA continue à abriter les différentes représentations théâtrales dans le cadre de la 14ème édition du Festival national du théâtre professionnel entre les pièces de théâtre en compétition et hors compétition. C'est le cas de «Es'sefqa» (la transaction), un psychodrame existentiel traitant de la situation précaire de l'artiste dans une société en perte de valeurs, a été présenté dimanche dernier, le soir à Alger, dans le cadre du 14e Festival national du théâtre professionnel (Fntp). Astreint au strict respect des mesures de prévention contre la pandémie de la Covid-19, le public venu en nombre à la salle Mustapha-Kateb du Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi (TNA), a assisté à un spectacle conçu sur l'idée d'un microcosme social, résultat d'un atelier de formation.Flashback
Mis en scène par Haïder Benhassine sur un texte de Mahi Benamara, le spectacle, conçu dans la technique de la «théâtralisation du théâtre», selon l'académicien-critique Ahcène Tlilani, pose, durant une heure de temps, une problématique doublement existentielle.
Des comédiens en répétition (méta- phore d'une société active), interprétant un texte dont le contenu relate l'histoire d'un champ commun convoité par des industriels prétendants à son achat, entrent dans un profond désaccord, renvoyant ainsi une image forte et déplorable sur le manque de communication et l'absence de cohésion entre les citoyens d'une même société.
Rendu par Ramzi Achour, Yazid Keroui, Dalila Azarouil, Soraya N'Ait Abderrahmane, Ahmed Makhlouf, Malek Fellag, Adel Ouahab et Younès Hammoum, le spectacle renseigne sur la nécessité absolue d'une considération effective de l'artiste, «vivant encore dans la précarité et l'incertitude», pointant du doigt les ravages de l'individualisme dans la société.
Dans un choix conceptuel difficile à pénétrer, le metteur en scène a usé du jeu des temporalités à travers la technique du Flashback et transféré les conflits à l'échelle de la réflexion par le monologue intérieur et l'usage d'une chorégraphie, signée par Khadidja Guemiri, expressive du marasme que vivaient les personnages dans leur fort intérieur, un rendu hautement esthétique.
Les comédiens, au jeu sincère et adéquat au choix conceptuel du metteur en scène, ont réussi à porter la densité du texte, occupant tous les espaces de la scène dans des échanges ascendants et intenses. Exploitant une scène presque vide, la scénographie minimaliste, oeuvre du metteur en scène, a consisté en un éclairage aux atmosphères «glaciales», d'abord latéral et neutre, puis vertical, de couleur bleue feutrée, et un décor, fait d'une porte, différents types de mobiliers et quelques accessoires, a bien servi la sémantique générale de la trame, marquée par le sentiment de psychose et un niveau d'échanges conflictuel et anxiogène.
La musique, véritable élément dramaturgique et sans doute un des meilleurs ateliers du spectacle, conçue par le génie créatif de Hassen Lamamra, a été d'un grand apport au cheminement de la trame. Produite par le Théâtre régional Kateb-Yacine de Tizi-Ouzou, la pièce de théâtre «Es'sefqa» (la transaction) est le troisième spectacle à entrer en compétition au 14e Fntp.
Une comédie noire
Pour sa part, le monodrame «Kiyass ou labess», a été programmée en «off». Création de la Coopérative «Rocher noir» de Boumerdès, plaide pour le droit des petites gens au bonheur. Il s'agit en effet, d'un monodrame sur la condition sociale des petites gens aux revenus modestes et leur droit au bonheur, a été présenté lundi à Alger, en dehors de la compétition du 14e Festival national du théâtre professionnel (FNTP), devant un public astreint au strict respect des mesures d'hygiène sanitaire...
Mise en scène par Abdelghani Chentouf sur un texte d'Ahmed Rezzak, le spectacle a été accueilli au Théâtre municipal d'Alger-Centre. Brillamment mené par le talentueux Fouzi Bayet, ce one man show aux traits de comédie noire, raconte l'histoire poignante d'El Ayachi, masseur dans un bain et marqué par les déceptions de la vie, étalant ses tourments causés par Romana, personnage suggéré au regard «bavard et pétillant», qu'il avait croisée du regard dans un bus et suivie jusqu'à son domicile parental, sans pour autant pouvoir lui souffler un mot. Simple hypothèse au départ, transformée ensuite, en idée fixe, Romana, amour imaginaire et utypique, hante la vie d'El Ayachi, qui, chaque fois qu'il se résout à lui envoyer une missive pour lui révéler sa flamme et son métier, il finit par se rétracter de peur de la perdre. Rongé par le désespoir et l'incertitude, El Ayachi se raconte, évoquant quelques moments de sa vie, avec son père notamment, qui lui avait appris à voir une femme comme une «bouteille de gaz butane» qu'il faut «bien fermer» au risque qu'elle n'explose. Déclamant un texte dense aux contours métaphoriques et allusifs, El Ayachi va passer en revue différents secteurs de la vie et pointer du doigt les travers de la société et essayer ensuite d'établir les responsabilités, sans pour autant approfondir son propos.
«El Ayachi ne peut s'occuper du gommage et du décrassage de vos consciences de tous les pêchers que vous avez pu commettre», fait-il remarquer s'adressant aux responsables du marasme social. Dans une prestation au rythme soutenu, Fouzi Bayet s'est surpassé dans l'interprétation des différents personnages qu'il a intelligemment intégrés dans des situations comiques très appréciées par le public qui a longtemps applaudi l'artiste. La scénographie, minimaliste est également l'oeuvre de Abdelghani Chentouf, qui a judicieusement opté pour quelques accessoires du hammam, dans un espace scénique délimité par un tas de papiers déchirés, suggérant les nombreuses lettres jetées qui témoignent de la détresse d'El Ayachi.
«Le rire et la dérision, tout comme le théâtre populaire, demeurent parmi les seules alternatives pour espérer voir le public reprendre le chemin du théâtre», a déclaré le metteur en scène à l'issue de la représentation.


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