Algérie

Erdogan consacre la primauté du politique sur le militaire



Bien que la situation soit particulièrement tendue depuis vendredi en Turquie, le président Abdullah Gül continue à  garder son sang-froid. Dans une déclaration au lendemain de la démission de quatre de ses plus hauts responsables militaires, il s'est même voulu rassurant concernant l'avenir de la démocratie dans son pays. Toutefois, il n'a pas cherché à  minimiser les faits qui, selon lui, ont induit une situation «extraordinaire». Une situation qu'il a néanmoins vite fait de normaliser. Pour prouver que l'Etat turc n'est pas du tout en crise et que les militaires n'ont plus le poids qui était le leur par le passé, M. Gül a tranquillement tourné la page de cette «histoire» de démissions en approuvant la nomination de l'actuel patron de la gendarmerie, le général Necdet Ozel, à  la tête de l'armée de terre turque. Necdet Ozel devrait àªtre par la suite promu chef d'état-major interarmes en remplacement de l'actuel titulaire, le général Isik Kosaner. Bref, sous le règne de l'AKP, nul ne semble indispensable. Et c'est probablement le principal message qu'a voulu délivrer le président turc. La célérité avec laquelle le gouvernement a remplacé les généraux démissionnaires laisse même penser que Abdullah Gül autant que Recep Tayyip Erdogan étaient pressés de s'en débarrasser. Le départ du général Isik Kosaner, chef de l'état-major interarmes et des commandants des trois armes, a donné au Premier ministre turc une occasion en or d'affirmer son autorité sur la deuxième armée de l'OTAN. L'enjeu est de savoir maintenant s'il a réussi effectivement à  asseoir le principe de la primauté du politique sur le militaire en Turquie et gagné le bras de fer qui l'oppose aux généraux depuis au moins 2002. L'affaire dite des 250 officiers accusés de complot contre le gouvernement Erdogan et qui se trouvent actuellement en détention est loin, en effet, d'être le seul objet de discorde entre les deux parties.  L'armée turque, autrefois intouchable et incontournable dans la vie politique, est depuis plusieurs années la cible de critiques et d'accusations, dont celle justement de complots présumés visant à  renverser le gouvernement de M. Erdogan. Quarante-deux généraux, soit un sur dix, et plusieurs dizaines d'officiers d'active ou à  la retraite, sont actuellement incarcérés dans le cadre de ces complots présumés. Les chefs de l'armée ont exigé que les militaires en détention puissent bénéficier de promotions, même s'ils sont en prison dans l'attente de la fin de leur procès. Ils se sont toutefois heurtés au refus catégorique du gouvernement. Parmi eux se trouve même un général quatre étoiles, qui était censé devenir le prochain commandant de l'aviation. En attendant de voir la manière avec laquelle la situation évoluera, les démissions de vendredi montrent tout de même que les militaires turcs ne sont plus ce qu'ils étaient. Eux qui en 1997 encore déposaient le gouvernement de l'islamiste Erbakan ont été forcés en à  peine neuf ans de pouvoir de l'AKP à  renoncer à  leurs prérogatives et à  leur droit de regard sur la vie politique turque. Si les choses continuent à  ce rythme, l'armée, gardienne de l'Etat laïque hérité de Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la Turquie moderne, ne sera bien plus qu'un souvenir lointain.  


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