Algérie

Envisager l'avenir



Envisager l'avenir
Au lendemain de l'annonce, sans trop de surprise, de la candidature à un quatrième mandat du président sortant Abdelaziz Bouteflika, la rue algérienne bruisse de murmures qui ne s'élèvent même pas au-dessus du vrombissement des embouteillages et des petites cacophonies habituelles. Les quelques déclarations et communiqués de partis et personnalités politiques ne changent pas la donne. En d'autres temps, la nouvelle eût été saluée par des manifestations de joie («spontanées») dans quelques centres-villes. Fidèle à elle-même, c'est-à-dire à sa vocation et raison d'être, c'est la Toile et son entrelacs de réseaux les plus divers qui sert de premier réceptacle aux réactions des internautes. Qu'un calme à peine perturbé ait accompagné l'annonce présidentielle est un bon signe pour le pays. Pacifique, voilà le maître-mot qui devrait normalement caractériser l'action politique à venir. Stéphane Hessel, disparu l'année dernière presque centenaire, et qui avait fait le «Buzz» avec son opuscule d'une trentaine de pages intitulé «Indignez-vous», pense, à très juste titre, que les indignations les plus vives peuvent aboutir pacifiquement à des changements salutaires. Encore faudrait-il que chacun y mette du sien, comme disent les gens simples.On ne va pas encore gloser sur le pouvoir algérien, sa nature, ses méthodes, sa gestion dispendieuse aux résultats discutables, ses origines historiques...Tout ou presque a été dit sur son record de longévité, sa capacité à survivre aux séismes et crises qui l'ébranlent sans le descendre de son piédestal. Ayant survécu à Octobre 88, à la déferlante islamiste de 91, au mouvement des aârch de 2001, à la décennie rouge des années 90... on le voit mal abdiquer devant des émeutes devenues banales à force de répétition ou des petites «jacqueries urbaines», du reste toujours rapidement éparpillées. Le problème, c'est -aussi- les autres. La représentation populaire (pas seulement les institutions élues), une société civile aux contours indéfinis et confus, prompte à la compromission, des formations politiques qui agissent au gré des vents, des personnalités politiques qui prêchent par intermittence dans le désert... Le n?ud gordien de la problématique est là qui obstrue les canaux entre les citoyens et leur élite politique et intellectuelle. Reconnaître que les partis politiques d'opposition sont bridés dans leur action militante sur le terrain ne les exonère pas de certaines turpitudes et d'une indolence qui ont altéré leur vocation. Pourquoi leurs messages ne passent-ils pas dans la société et ne se traduisent par aucune mobilisation sur le terrain de la revendication pacifique ' Troubadours et faussaires du pluralisme exclus, c'est tout juste si on peut dénombrer une quinzaine, voire moins, de partis politiques dignes de ce nom. Ont-ils seulement tenté de réaliser un bref moment de communion des indignés au nom desquels ils disent parler, à travers une petite grève de 2 heures, pas plus ' La démarche serait hautement pacifique, citoyenne et le simple bouche-à-oreille pour passer le message contournerait tous les interdits et obstacles. La vérité, c'est que sur cette quinzaine de partis, il n'est pas sûr qu'il s'en trouve une moitié pour parler d'une seule et même voix en vue d'un objectif minimal. Si le pouvoir ne peut pas compter sur la seule présidentielle pour nourrir l'illusion d'une paix sociale éternelle, les indicateurs économiques présageant plutôt des temps difficiles à venir, la classe politique, de son côté, doit comprendre que sa survie est au prix de sa propre résilience, une introspection courageuse et difficile. Il ne faut pas avoir la mémoire courte, c'est l'armée de 1991 qui a accouché du FLN actuel et il ne faut jamais s'asseoir sur les baïonnettes, selon le mot de Georges Clémenceau. Le parti du 1er novembre 1954 devait, sinon disparaître du moins changer profondément et s'adapter sincèrement et sérieusement aux exigences d'une vraie démocratie. Un rapport commandé alors par le général Khaled Nezzar à trois de ses pairs (Mohamed Lamari, Touati et Taghit) recommandait plutôt de veiller à garder le FLN dans une position dedominance tout en autorisant dans sa périphérie des formations un peu plus démocratiques. C'est ce parti qu'a trouvé Bouteflika en arrivant au pouvoir en 1999 et il n'a pas beaucoup changé.A. S.




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