Algérie

Entretien avec Salah Dabouz*



Entretien avec Salah Dabouz*
Manipulation ? «Ce qu'ils ignorent, c'est que ces gens présentés comme des «notables» de la région ne le sont pas. Comment voulez vous qu'ils interviennent pour retenir ces «baltaguia», alors qu'ils ne les connaissent même pas '»InfoSoir?: A qui profite la violence qui sévit depuis plusieurs mois dans la wilaya de Ghardaïa 'Salah Dabouz : Les événements que connaît la wilaya de Ghardaïa depuis le mois de novembre 2013 à ce jour, ont fait 10 morts et détruit plus de 500 habitations et des pertes qui se chiffrent à des centaines de milliards de centimes pour les commerçants. A cela s'ajoutent les nombreuses palmeraies incendiées ou saccagées et la destruction de sites classés patrimoine humanitaire universel (des cimetières avec leurs équipements, mosquée et salles d'ablution, etc.). Les perdants dans cette affaire ce sont donc les habitants de Ghardaïa qu'ils soient arabophones malékites ou amazighophones ibadites.Le seul qui a tiré profit de tous ces événements c'est le pouvoir qui a réussi, à travers cette contestation populaire contre une administration qui a prouvé ses limites, à placer comme arbitre et comme seuls interlocuteurs des personnes choisies en majorité par les services de sécurité pour les présenter comme des «notables» de la région et parmi lesquels figurent même des ex-militaires.Quels sont, à votre avis, les raisons ou les responsables de cet embrasement 'Nous avons remarqué qu'à chaque fois qu'un responsable du gouvernement effectue une visite dans la wilaya, la situation s'embrase. Dans la commune de Guerrara on nous a dit que les esprits ont commencé à s'échauffer après le discours prononcé par le wali à l'occasion d'une visite du ministre de l'Intérieur. Le wali avait déclaré à cette occasion qu'à partir de cette date la loi sera appliquée. Pourtant, rien n'a été fait, alors que des vidéos existent. Elles ont été filmées par des citoyens montrant des dizaines de policiers offrant des couvertures à des «baltaguia» qui pénétraient dans les cimetières pour les saccager. Aussi trois citoyens ont été tués par tir de balles réelles par la police à Hadj Messaoud, selon une enquête que nous avons effectuée sur place.En somme, les raisons c'est au niveau du pouvoir qu'il faut les chercher.Quels sont les plus touchés dans la population à Ghardaïa, les ibadites ou les malékites 'Nous n'avons pas de statistique dans ce sens. Mais nous savons que les dégâts sont énormes au point de ressembler à une situation post-catastrophe naturelle. A la seule différence que ces affrontements ont généré une fracture sociale profonde qu'il est difficile, voire impossible, de colmater.En quelques phrases, racontez-nous la situation qui prévaut aujourd'hui ' Et quelles sont les mesures urgentes à mettre en place 'C'est le chaos total, un climat très tendu, et des rumeurs de tous genres meublent le quotidien des Ghardaouis. Une intox à des fins politiciennes et électorales à travers certains titres qui parlent de prise en main de la ville par l'armée. A cela il faudrait ajouter les analyses faites sur certaines chaînes dites privées pour culpabiliser telle ou telle communauté, et qui rendent le climat déjà tendu insoutenable. Pour ce qui est des mesures à prendre, il faut que le ministre de l'Intérieur, le DGSN, le wali et le divisionnaire de la sûreté de la wilaya rendent des comptes sur ce qui s'est passé à Ghardaïa. Ce sont eux les premiers responsables de cette violence. Les problèmes que connaît la wilaya de Ghardaïa, doivent être traités dans le cadre de la loi et au sein des instituts de la République. C'est la politique de l'impunité qui est à l'origine de cette situation.La présidentielle est-elle pour quelque chose dans cette situation 'Le mode de gestion de la chose publique en Algérie à travers un système gangréné par une bureaucratie étouffante, une corruption générale et un refus d'ouverture et de respect des libertés sont les seules et vraies raisons de ce chaos.Les initiatives de bonne volonté ont toutes échoué. Pourquoi 'Ce que vous appelez «Les initiatives de bonne volonté» ce sont des démarches qu'effectuent certaines personnalités pour dire aux «nota-bles malékites et ibadites» de retenir leurs enfants. Ces personnalités reçoivent, malheureusement, toujours la même réponse : «Nous n'avons pas d'autorité sur nos enfants». Mais, ce qu'ils ignorent c'est que ces gens présentés comme des «notables» de la région ne le sont pas. Comment voulez-vous qu'ils interviennent pour retenir ces «baltaguia, alors qu'ils ne les connaissent même pas ' D'autant que ces derniers agissent presque en parfaite symbiose avec les services de sécurité, comme le montrent plusieurs vidéos. Une réalité qui devrait faire changer d'avis toutes ces bonnes volontés en les incitant à orienter leurs efforts vers les véritables responsables de ces troubles.* Avocat, militant de la LADDH et membre de la Commission des droits de l'homme de l'Union internationale des avocats.




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