Algérie - Djamila Flici Guendil


Entretien avec Djamila Flici Guendil
Rencontrée à la Bibliothèque nationale du Hamma, où elle a fait un carton durant les séances de vente-dédicace, Djamila Flici Guendil, l'auteure de «Diwan Al Fen, dictionnaire des peintres, sculpteurs et designers», que viennent de publier les éditions ANEP et ENAG, a bien voulu accorder cet entretien avec notre journal.

El Moudjahid : comment l'idée d'écrire ce livre vous est-elle venue ?
Djamila Flici Guendil : C'est en exerçant en qualité de conseillère au ministère de la Culture que je fus en contact direct avec la communauté des artistes. A l'époque, j'étais chargée, avec d'autres collègues, de réfléchir à l'élaboration du statut des artistes. Par ailleurs, ayant eu à assumer la présidence de l'Office national des droits d'auteur (ONDA), j'ai participé à des regroupements d'artistes à Alger, Oran et Constantine, avec M. Touassar, directeur général de l'ONDA, dans l'objectif de recueillir les avis des artistes à propos de la question de leur statut.
C'est donc dans ce cadre d'immersion dans le monde des artistes et à leur contact que l'idée s'est imposée à moi d'écrire un livre, dédié à la préservation de la mémoire et d'un pan du patrimoine culturel.
Il faut dire aussi que c'est au fur et à mesure que j'avançais dans la recherche et l'écriture du livre, que ma quête devenait plus insistante. Je me retrouvais ainsi plongée aux sources du mouvement pictural et de l'histoire de notre jeune peinture.

Pensez-vous que le dictionnaire englobe tout l'art algérien dans ses générations et ses multiples époques ?
Honnêtement, je pense que cet ouvrage recouvre la période contemporaine, mais on peut dire qu'il a le modeste mérite de remonter aux sources d'une peinture d'inspiration authentiquement algérienne, avec la nécessaire recherche de l'exhaustivité. Il comporte 1.977 notices biographiques, dont une partie notable est consacrée à des jeunes créateurs qui ont essaimé dans tous les recoins du pays. Le livre est un condensé, une sorte de brassage des générations de créateurs, puisque les grandes figures des arts plastiques côtoient des talents autodidactes ou issus des écoles d'arts et expressifs de toutes les tendances en arts plastiques.
Il y a aussi des artistes qui font partie de la diaspora algérienne dans le monde, ces Algériennes et Algériens d'adoption de diverses nationalités qui, avec leur sensibilité propre, ont contribué à l'enrichissement de notre patrimoine culturel et artistique, et que des circonstances où le désir de la confrontation aux autres artistes, ont conduit à s'établir ailleurs.
Mais l'objectif essentiel que je me suis assignée à travers cet ouvrage, c'est surtout de permettre l'accès à une information sur l'ensemble, du moins je l'espère, de la création artistique en Algérie.

Combien de temps vous a-t-il fallu l'élaboration et l'écriture de ce dictionnaire ?
En fait, c'est surtout le travail de recherche et de prospection qui a nécessité beaucoup de temps, l'écriture elle-même, vu ma passion pour les arts, est venue naturellement. Pour tout dire, l'ouvrage a nécessité environ cinq années de labeur, qui ont été une véritable aventure de recherche à travers les diverses sources de la documentation, archives, dossiers, ouvrages d'art, presse…

Quels sont les critères ayant présidé au choix des artistes ?
Parler de critère de sélection me paraît quelque peu impropre, car il ne s'agissait pas pour moi d'exclure qui que ce soit. Le spectre biographique, qui est celui du livre, est suffisamment large pour éviter les éventuelles omissions. Je me suis limitée aux peintres, aux sculpteurs et designers algériens d'origine ou d'adoption, vivant en Algérie ou à l'étranger.
Et les autres me diriez-vous, tels les bédéistes, photographes caricaturistes, dont l'Algérie regorge de talents. Je me suis imposée une certaine rigueur, car il ne s'agissait pas, pour moi, de faire une compilation, une sorte d'annuaire. Ce n'est ni mon objectif ni mon ambition. Je me suis limitée volontairement à ces trois catégories d'artistes pour approfondir ma recherche et l'affiner, mais on peut aussi rencontrer dans le livre tel photographe ou bédéiste, qui sont, par ailleurs, peintres, sculpteurs et designers, mes goûts personnels ayant fait le reste.

Que pensez-vous de l'édition nationale, et êtes-vous satisfaite de la fabrication du livre en Algérie. Autrement dit, quelle est votre appréciation sur l'aspect esthétique ?
Porter un jugement de valeur sur l'édition nationale serait quelque peu prétentieux de ma part. Je dois simplement vous avouer toute mon admiration pour le travail colossal qu'accomplissent, chaque jour, toutes ces maisons d'édition qui fleurissent en Algérie, et qui le font souvent dans l'adversité et dans un environnement, le moins que l'on puisse dire, difficile, même s'il faut saluer les efforts louables des pouvoirs publics qui doivent, à mon sens, poursuivre cette dynamique pour promouvoir la politique du livre en Algérie.
S'agissant de la position marginale dans laquelle se trouve l'édition d'art et du livre à proprement parler, cette situation n'est pas spécifique à l'Algérie. Elle se pose même dans les pays connus pour leur grande capacité d'édition et à forte production livresque.

Un dernier mot ?
L'ouvrage Diwan est en quelque sorte ce portail que j'ai voulu toujours ouvert pour les artistes omis et pour tous les nouveaux talents qui viendront embrasser le monde fabuleux des arts plastiques. Diwan sera cette porte qui doit rester toujours ouverte. Je terminerais en remerciant les maisons d'édition ANEP et ENAG qui m'ont fait confiance pour réaliser un travail qui se veut un témoignage de cette Algérie qui n'a jamais cessé d'être au rendez-vous du donner et du recevoir.


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