Algérie

Entre optimisme et scepticisme


L’idée d’exploiter le gaz de schiste en Algérie divise les experts qui se sont affrontés, à coups d’arguments, deux jours durant, lors d’un atelier qui a pris fin hier, au Centre des conventions d’Oran. Ce débat, organisé par l’Association algérienne de l’industrie du gaz sous l’égide de l’Union internationale de l’industrie du gaz, a permis un large éclairage susceptible d’aider à la prise de décision par les autorités.D’un côté, il y a ceux qui conseillent aux centres de décision de méditer «la réussite américaine» en la matière ; de l’autre, ceux qui énumèrent les contraintes incitant à plutôt adopter une position de réserve. Parmi les communicants, il y a ceux qui estiment que l’exploitation du gaz de schiste permettra à l’Algérie de doubler ses recettes d’exportation de gaz. «Il serait malheureux d’avoir une richesse et de ne pas l’utiliser», estime Husein Abdallah, ancien cadre de Sonatrach  actuellement en charge des études chez le groupe espagnol Repsol. Pour lui, «les études préliminaires et l’importance du potentiel que recèle le sous-sol algérien plaident pour une exploitation de cette ressource non conventionnelle». «Pourquoi perdre du temps '», s’interroge-t-il, estimant qu’il faut «prendre pour exemple les Etats-Unis, puisque, du point de vu technique, nous avons un même type de formation et un même potentiel important». Selon lui, «d’importantes quantités de gaz estimées à plusieurs centaines de TCF sont récupérables, soit plus que la quantité de gaz conventionnel que recèle le sous-sol algérien». Face à de nombreux plaidoyers favorables à l’exploitation, d’autres communicants ont, en revanche, formulé des contraintes qu’il faudra surmonter pour réussir à exploiter ces gaz non conventionnels. Ramin Lakani, General Manager chez Gafney Cline et Associates-Baker Hughes, qui a déjà travaillé en Pologne, souligne que «la filière du gaz de schiste est porteuse de risques sur les investissements». Djerroumi Zerrouk, consultant, a animé une communication dans laquelle il a sérié les contraintes à surmonter pour réussir à transposer l’expérience des Etats-Unis en Algérie. Cet expert rappelle que la France et la Russie ont interdit l’exploration et l’exploitation des gaz de schiste par fracturation hydraulique. Le risque environnemental ne vient pas du gaz lui-même ; une fois extrait, ce dernier a les mêmes caractéristiques que le gaz consommé habituellement ; c’est son exploitation qui inquiète, en particulier la fracturation hydraulique. Le gaz de schiste ne se trouve pas dans des poches, comme le gaz conventionnel, mais se répartit de manière diffuse dans la roche. Les réserves potentielles sont très importantes, mais elles ne sont pas faciles à extraire. La solution actuellement développée consiste à réaliser un forage et à injecter de l’eau de façon à ouvrir des fissures. Des pollutions peuvent être provoquées par l’usage de produits chimiques. M. Djerroumi met en exergue les préoccupations soulevées par les défenseurs de l’environnement liées à la contamination des eaux souterraines. De son côté, Husein Abdallah oppose à ces préoccupations des arguments : «Contrairement à l’Europe, en Algérie, nous n’avons pas affaire à des zones fortement urbanisées, mais à des régions désertiques.» De plus, poursuit-il, «les études d’impact sur l’environnement n’ont pas été menées sur le non-conventionnel». Melenaos Ydreos, vice-président de l’Union Gas Ltd-A Spectra Energy Company abonde dans le même sens en déplorant «l’absence de recherches sérieuses et poussées quant à l’impact sur l’environnement». Pour lui, «le risque n’est pas totalement écarté». M. Djerroumi  développe d’autres interrogations sujettes à débat : «Y a-t-il urgence à exploiter le gaz de schiste ' Le gaz produit serait-il économiquement viable ' Est-il approprié d’attendre que les prix de revient soient intéressants pour exploiter ce gaz ' Comment pallier au handicap majeur de la rareté de l’eau '» L’extraction de ce gaz étant, en effet, très gourmande en eau. Pour lui, «il y a des incertitudes sur les plans financier, technique et environnemental auxquelles on ne peut apporter de solutions avant de se frotter au terrain en menant une exploitation pilote permettant de prendre la décision». «Ce n’est qu’en répondant à toutes ces questions, explique-t-il, que nous pourrons alors dire : yes we can.»
 
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