Algérie

ENTRAÎNEURS EUROPEENS EN ALGERIE Cote en baisse ou crise financière oblige



Les entraîneurs étrangers, notamment européens, exerçant en championnat d'Algérie de football Ligue 1, sont nettement moins nombreux cette saison, par rapport au précédent exercice : un constat qui fait débat entre partisans et opposants de l'option étrangère en matière de coaching. Parmi les observateurs et spécialistes de la balle ronde algérienne, d'aucuns s'interrogent sur les raisons de cette nouvelle donne.
S'agit-il là d'une nouvelle tendance — observée chez la plupart des dirigeants des clubs algériens — réhabilitant les entraîneurs locaux, ou bien d'une simple option imposée par les circonstances conjoncturelles, notamment financière ' De six entraîneurs en 2010-2011, le nombre de coaches européens est tombé à trois cette année. Ainsi, pour la deuxième édition du championnat professionnel de Ligue 1, et après trois journées de son coup d'envoi, ils ne sont que trois entraîneurs européens seulement à exercer dans les clubs algériens : l'Italien Giovanni Solinas (CR Belouizdad), le Français Hervé Renard (USM Alger) et le Suisse Alain Geiger, désigné tout récemment à la tête de la barre technique de l'ES Sétif. Geiger remplace le Français Christian Castellan qui n'a pas fait long feu à la barre technique de l'ES Sétif, rendant le tablier après avoir dirigé un match officiel seulement. Il emboîte ainsi le pas, au coach brésilien Dos Santos, recruté lors de l'intersaison par le CS Constantine, mais qui a dû vite rentrer chez lui. Au chapitre des techniciens étrangers exerçant dans le championnat algérien, figurent également les deux entraîneurs arabes du CA Batna et du MC Oran, l'Irakien Ameur Djamil et le Palestinien Hadj Mansour respectivement. Mais, ces deux hommes sont plutôt considérés comme des habitués du championnat algérien, tellement ils ont travaillé dans différents clubs locaux depuis déjà plusieurs années. Du coup, l'on s'interroge, dans les milieux du football algérien, sur les véritables raisons de cette nouvelle tendance — constatée chez la plupart des dirigeants des clubs algériens — de miser sur les entraîneurs locaux. Le constat sur lequel beaucoup d'avis convergent est que l'apport de la plupart des techniciens étrangers qui ont «inondé» le championnat algérien dans un passé très proche «n'a pas été considérable». Le niveau du championnat national, jugé «très modeste» par les spécialistes, illustre parfaitement cette réalité, constatée et relevée par le nouvel entraîneur national, le Bosniaque, Vahid Halilhodzic.
Manque d'argent ou réhabilitation du produit local
L'ancien sélectionneur de la Côte d'Ivoire, n'a pas mis de temps pour exprimer ses soucis vis-à-vis de la production des joueurs locaux sur le terrain. Les quelques matches qu'il a supervisés lui ont suffi pour faire un constat amer du niveau de notre championnat. «Beaucoup de travail reste à faire au niveau des clubs algériens », répète-t-il dans chacune de ses sorties médiatiques. C'est dire que la présence en masse des entraîneurs étrangers dans le championnat algérien lors des saisons précédentes, n'a rien changé dans le cours des choses. Cela semble suffisant pour le président du champion d'Algérie en titre (l'ASO Chlef), Abdelkrim Medouar, pour être conforté dans son choix de «toujours privilégier la piste locale». Il l'a d'ailleurs encore une fois confirmé tout récemment en confiant la barre technique de son équipe à un entraîneur local (Noureddine Saâdi), après le départ de Meziane Ighil qui a conduit les Chélifiens, la saison précédente, à remporter le premier titre de champion dans l'histoire du club. «Quand Meziane Ighil a décidé de partir, je n'ai pas cherché à explorer des pistes étrangères, car je suis toujours pour un entraîneur local. J'ai contacté alors l'ancien sélectionneur national, Rabah Saâdane, qui s'est excusé de ne pouvoir répondre favorablement à ma demande, suite à quoi, je me suis tourné vers Noureddine Saâdi avec qui j'ai vite trouvé un terrain d'entente», expliquait le premier responsable de l'ASO, lors de la cérémonie d'installation de son nouvel entraîneur. Même les clubs habitués à jouer la carte des entraîneurs étrangers, à l'image du MC Alger et la JS Kabylie, ont décidé cette fois ci de changer de cap, en faisant confiance à des compétences locales, représentées par Abdelhak Benchikha et Meziane Ighil respectivement. Seulement, si l'on se réfère à des sources proches des deux clubs, «c'est l'aspect financier qui est pour beaucoup dans ce changement de ligne de conduite». Les défenseurs de l'option locale évoquent «le niveau tout juste moyen» de la plupart des techniciens étrangers recrutés par les clubs algériens, pour justifier leur position. «J'aurais applaudi le recours aux entraîneurs étrangers si ces derniers étaient de renom, et capables d'apporter un plus au football algérien», lance Noureddine Saâdi, à chaque fois qu'il est sollicité pour s'exprimer sur le sujet.
Les entraîneurs étrangers se défendent
Un avis qui n'est pas du tout partagé par certains techniciens étrangers qui ont déjà exercé en Algérie ou exercent toujours, à l'image de l'ex-entraîneur du MC Alger, le Français, Alain Michel et l'actuel driver du CR Belouizdad, Giovanni Solinas. Les deux entraîneurs insistent sur les conditions de travail en Algérie, qu'ils jugent «déplorables et qui freinent tout travail sérieux». «En plus des moyens logistiques très faibles, et l'indisponibilité de l'outil de travail, les joueurs ne sont pas régulièrement payés, ce qui se répercute sur leur rendement sur le terrain, car ils ont souvent la tête à l'argent», a fait remarquer Alain Michel, qui a failli prendre en mains le MC Oran, lors de l'intersaison, avant de rebrousser vite chemin après une seule séance d'entraînement. Pour sa part, Solinas, qui est à sa deuxième expérience en Algérie, après avoir entraîné l'ES Sétif, durant une partie de la saison dernière, met en relief l'absence «des moyens élémentaires censés disposer un club de l'élite». «Il se trouve que même quand les moyens logistiques sont mis à la disposition de l'entraîneur étranger, celui-ci trouve des difficultés pour prouver ce dont il est capable. Et pour cause, le joueur algérien manque de culture tactique, car il n'a pas bénéficié d'une formation adéquate». C'est ce qu'avait relevé l'entraîneur français, Robert Nouzaret, du temps où il exerçait au MC Alger, un club où il n'avait pas fait long feu, même s'il faisait à l'époque, l'unanimité au sein des joueurs et des supporters.
Le pari de la FAF
Ce constat est d'ailleurs partagé par le chargé de la direction technique nationale (DTN) par intérim, Boualem Laroum. «Il est clair que la formation demeure le maillon faible du football algérien. On n'accorde pas beaucoup d'intérêt à ce volet au sein des clubs, ce qui a poussé la FAF à s'y substituer en créant des Académies de football», explique-t-il à l'APS. «Toutefois, pour réussir une bonne formation des jeunes, il leur faudra un encadrement technique de valeur. Un paramètre sur lequel travaille également la FAF ces dernières saisons, en organisant des stages de formation et de recyclage au profit des entraîneurs », ajoute-t-il. C'est à Laroum d'ailleurs que l'on a confié le dossier de la formation des entraîneurs au niveau de la DTN. Plusieurs anciens joueurs internationaux prennent part périodiquement à des stages qui ont permis à un bon nombre d'entre eux de bénéficier de licences CAF (B), qui leur permettent d'exercer au sein des équipes premières, comme récemment exigé par la Fédération internationale de football (FIFA). Le président de la FAF, Mohamed Raouraoua, a annoncé récemment, pour sa part, l'organisation très prochaine d'un stage à Alger au profit des entraîneurs pour l'obtention de la licence CAF (A). «Une première sur la scène africaine», a fait observer le patron de l'instance footballistique nationale. Toutes ces mesures devraient plaider pour la renaissance du football algérien, vu le rôle déterminant censé jouer les encadreurs techniques, à tous les niveaux, un volet qui souffre «d'un déficit sensible», a révélé le président de la FAF. Le processus en question devrait aussi limiter davantage le recours aux techniciens étrangers, en attendant que le fruit du travail de l'encadrement local se traduise sur le terrain par l'émergence de jeunes talents à même de limiter la «dépendance» de la sélection algérienne vis-à-vis des joueurs évoluant à l'étranger.


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