Algérie

ENQUÊTE-TEMOIGNAGES Parents, enfants : quand Dame Nature impose son empreinte



Que ce soit d'un point de vue physique avec des ressemblances parfois frappantes entre les parents et leurs enfants : même visage, carrure identique ou encore un air de famille qui marque la filiation d'un enfant à sa famille, que de celui des critères plus insondables pour lesquels se mêlent acquis génétiques et mimétisme parental tels le caractère, les goûts ou encore la gestuelle se retrouvent comme par magie transmis d'un parent à son descendant.
Ainsi, la transmission génétique s'associe avant toute chose aux critères physiques partagés entre un enfant et son parent : les mêmes yeux que la maman, le même nez que le papa, ou encore la voix de tonton ; un lien commun qu'on appelle air de famille et qui permet quelquefois de tisser des liens forts entre l'adulte et sa réplique enfantine. Car si la nature permet la transmission de critères purement physiques dus au partage du patrimoine génétique, elle ouvre un champ plus large aux enfants qui s'identifient aux parents qui leur ressemblent en adoptant aussi bien ces gestuelles d'adultes que ces penchants professionnels ou artistiques ; ce qui expliquerait l'existence dans certaines familles de plusieurs membres exerçant le même métier ou partageant la même passion.
Ghania, 32 ans : «J'ai eu du mal à en croire mes yeux !»
Cette enseignante trentenaire est l'heureuse maman d'une petite Lamia de 6 ans ; une paire qui fait souvent s'arrêter les passants tant la ressemblance est frappante. «Au début, les membres de ma famille me disaient que ma petite me ressemblait, mais je ne prenais pas cela au sérieux. Tous les enfants ressemblent à leurs parents et tout le monde dit cela sur tout le monde. Cependant, plus les années passaient, plus je constatais que réellement ma petite Lamia tenait beaucoup de moi : les mêmes yeux bleus avec la même forme, le nez, la bouche, la forme du visage, le teint et les cheveux, tout était à mon image. Un petit tour dans les albums de famille a achevé de me convaincre ; je n'en croyais pas mes yeux, c'était moi à son âge, un sosie parfait ou si vous préférez un portrait craché de sa maman comblée par tant de points communs. Un état de choses qui plaît particulièrement à ma mère qui revit à travers sa petite- fille sa jeunesse passée. Du coup, elle propose régulièrement de garder la petite qu'elle dit préférer à tous ses autres petits-enfants.»
Yasmine, 31 ans. «Dans notre famille, nous sommes trois paires identiques»
«Je ne parle pas bien sûr de ressemblances physiques ; dans notre famille, nous sommes trois filles et trois garçons, l'air de famille que nous partageons est indéniable, je parle plutôt de ressemblances plus profondes, plus subtiles, relatives aux caractères, aux goûts et aussi à la gestuelle. Ainsi, ma sœur aînée, Lila, s'est toujours entendue plus que tout avec notre plus jeune frère ; une entente qui était grandement due au fait que tous les deux ont le même caractère expressif et un peu égoïste. Elle, aînée, chouchoutée, et lui, petit dernier chéri à sa maman. Pour ma part, je réalise de plus en plus que je ressemble fortement à mon père ; physiquement déjà, je tiens de lui la forme du visage et les yeux, mais ce que nous partageons encore plus fortement est notre passion pour les sports de combat, particulièrement pour le karaté-do dans lequel nous avons gravi tous les échelons. Nous sommes tous les deux ceinture noire ; en plus, nous avons la même façon de gérer les choses ; avec diplomatie et complaisance, nous cédons toujours notre part en échange de la tranquillité de l'esprit. Ma mère se retrouve parfois à nous crier tous les deux tant elle se retrouve devant la même placidité souvent déroutante ; un trait que j'ai hérité de mon papa et que je n'explique que par une transmission génétique. Des choses pareilles ne peuvent s'apprendre, elles naissent en nous. Enfin, mon frère cadet et ma mère sont connus dans toute la famille pour leur caractère bougon, ils râlent pour un oui ou pour un non, et sont toujours fâchés avec quelqu'un de leur entourage. On parle chez nous de partage équitable, et franchement, on ne s'ennuie que rarement dans notre maison.»
Slimane et Ramzy, un papa et son enfant qui se ressemblent comme deux gouttes d'eau
Cette ressemblance d'abord physique a achevé de combler la maman de Ramzy lorsqu'avec le temps, elle voyait son petit partager plus que le nez et les fossettes avec son mari adoré. «Je trouve mon époux très beau, c'est ce qui m'a séduit chez lui ; c'est donc avec un grand plaisir que je notais les traits qu'il a légués à notre enfant : c'est le même homme incarné dans ce petit bonhomme, ils se ressemblent tellement que s'en est impressionnant. Les années passant, les traits communs sont devenus encore plus marqués ; la même démarche, les mêmes gestuelles d'expression et les mêmes mimiques ; un petit rictus qui trahi un sourire caché et le même froncement de sourcils quand ils sont fâchés. Mais Slimane est aussi un grand macho ; un trait qui me plaît moins, puisque je subis au quotidien sa jalousie maladive. Eh bien, mon Ramzy devient de plus en plus une réplique de son père. Par exemple, quand je m'apprête à sortir, il me rappelle gentiment que je dois mettre mon foulard et quand on lui demande ce que va faire sa maman pendant qu'il ira avec son père en promenade, il répond tout mignon qu'elle gardera la maison. Un petit travers qui appuie ma thèse qui repose sur le fait que le partage de caractéristiques entre parent et enfant n'est pas uniquement dû à la génétique mais aussi et beaucoup à un acquis auprès des membres de la famille. Un apprentissage et un mimétisme qui achèvent de parfaire la ressemblance entre un père et son fils ou une mère et sa fille.»
Djamila, 45 ans. «Mon fils aîné ressemble plus à son grand-père qu'à son père !»
«Pour cette mère de famille, les liens de parenté sont parfois impénétrables. Après notre mariage, mon époux et moi avons élu domicile dans la villa de mes beaux-parents. Nous y avons vécu près de dix ans, et c'est durant cette période que j'ai mis au monde mon premier enfant. Un garçon que tout le monde adorait surtout son papi qui le sortait tous les jours et ne manquait jamais de le gâter en lui offrant des friandises ou des cadeaux. Un lien que nous voyions se prononcer de jour en jour. Mon fils ressemblait déjà beaucoup à son grand-père, il tenait de lui les yeux et le nez. Mais vers l'âge de huit ans, il a commencé à avoir les mêmes manières que le patriarche. Déjà, il prenait cet air sérieux et moralisateur que son ancêtre revêt à chaque prise de position. A dix ans, Lamine parlait en homme mûr et instruit des travers de la vie ; il conseillait son père quand celui-ci se plaignait de son travail et me faisait de grandes leçons de morale quand je me disputais avec mon mari à propos de choses et d'autres. Il me disait par exemple que le secret de l'harmonie familiale était surtout le sacrifice : «Laisse papa croire qu'il a raison, et tu verras qu'il sera plus gentil avec toi.» Une maturité qui me mettait souvent en déroute car mon petit parlait comme un grand, mais cela ne m'inquiétait pas outre mesure puisque mon beau-père me tenait le même langage. J'imagine qu'ils discutaient entre eux de nos problèmes de famille et que l'adulte prenait l'enfant pour son égal, chose qui ne m'a pas déplut, du moment qu'il ne lui inculquait pas de mauvais comportements. Notre déménagement de la maison familiale n'a pas réussi à anéantir une telle relation fusionnelle car mon fils se rendait tous les après-midis après l'école chez ses grands-parents, et ce, jusqu'à sa terminale. Aujourd'hui, Lamine a fini ses études mais il ressemble de plus en plus à son papi. Comble du hasard, il a suivi des études en médecine et tient à présent le cabinet de son grand-père parti en retraite.»
Madjid, 62 ans. «Mon père, mes deux frères, mes trois fils et moi-même sommes comptables»
«Les liens de sang peuvent s'avérer des transmetteurs de dons rares et insondables ; les sorciers, les guérisseurs et les voyants partagent dans de nombreux cas leurs pouvoirs avec leurs descendants. Qui n'a pas entendu dire que tel guérisseur a transmis son don à son fils ou à sa fille, ou que telle famille maîtrise la magie ou la sorcellerie ; un héritage qui tient aussi bien de la transmission de savoir-faire que de réels dons que partagent parents et enfants. Pour ma part, retraité comptable de profession, c'est plutôt la destinée qui a fait que moi et tous les hommes de ma famille nous nous sommes tournés vers la comptabilité. A bien y réfléchir, je ne sais vraiment pas comment expliquer cette belle coïncidence, car mon père, qui était gestionnaire d'une menuiserie, ne m'a nullement poussé à suivre la même formation que lui, c'est plutôt une attirance personnelle. J'ai choisi ce métier par passion des chiffres. Mon frère cadet a également suivi la même branche ; j'expliquerai cela avec le succès du domaine de la comptabilité en ce temps-là. En Algérie post-indépendance, le mot d'ordre était au nationalisme ; donc beaucoup d'entreprises on été créées. Boumediène voulait faire de l'Algérie un pays auto-suffisant et des Algériens les architectes de cette future nation. Il fallait donc des gestionnaires pour tenir les comptes ; mon cadet a donc suivi mon exemple et a facilement décroché un très bon poste. Cependant, ce qui m'a un peu surpris, c'est que mon petit frère, le dernier de la famille, qui a émigré en Australie durant les années 1980 avec son bac en poche, a également fini par suivre des études en comptabilité et travaille actuellement pour une grande boîte privée. Hasard pour hasard, mes trois fils, de personnalités et de niveaux différents, ont aussi suivi des cursus universitaires en comptabilité et finances. Ce qui me pousse à penser que peut-être ce penchant vers les chiffres et les comptes est une sorte de virus que l'on se transmet par le sang et qui perdure dans le temps. En tout cas, génétique ou simple mimétisme filial, ce qui compte c'est que chacun de nous ait choisi sa vocation et l'exerce avec amour et perfection.»


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)