Algérie

Ennahda veut faire main basse sur l'UGTT Cela explique pourquoi il soutient les Ligues de protection de la révolution



Les islamistes voient d'un mauvais 'il le fait que cette structure importante soit dominée par des laïcs, ce qui est pourtant dans la logique
des choses de par la nature même du mouvement syndical.
Tunis
De notre correspondant
L'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) a fini par dévoiler son rapport sur les incidents survenus devant son siège le 4 décembre 2012. La commission d'enquête, mise en place pour faire la lumière sur cet événement grave, n'est, rappelle-t-on, pas parvenue à une conclusion commune concernant la qualification des faits et la désignation des inculpés. Que cache cette sortie unilatérale ' «L'UGTT a fait preuve de beaucoup de retenue en annulant le mot d'ordre de grève générale prévue le 13 décembre. Elle s'est limitée à exiger la reconnaissance de l'agression subie et à demander la poursuite des impliqués. La centrale syndicale a même opté pour une enquête commune afin de trouver une issue consensuelle», a déclaré le secrétaire général de la centrale syndicale, Hassine Abbassi, lors de la conférence de presse tenue au début de la semaine pour annoncer justement les conclusions de l'enquête menée en commun avec le gouvernement.
M. Abbassi a poursuivi en précisant : «Les deux vidéos transmises aux enquêteurs par les services du ministère de l'Intérieur montrent clairement que les Ligues de protection de la révolution sont à l'origine des incidents du 4 décembre 2012 et que ses membres ont sciemment attaqué les locaux de la centrale syndicale.» «La présence des membres des Ligues de protection de la révolution n'insinue pas leur implication dans les violences», réplique Abdellatif Mekki, membre de la direction d'Ennahda, actuellement ministre de la Santé et membre de la commission d'enquête.
Le juge administratif, membre de la commission d'enquête, Ahmed Souab, a indiqué pour sa part que «les faits impliquent d'une manière avérée des membres des Ligues de protection de la révolution dans les agressions contre le siège de la centrale syndicale. Il n'y a aucun doute là-dessus. Il y a même des cadres moyens du parti Ennahda qui étaient présents». Et au secrétaire général de la centrale syndicale de s'interroger : «Pourquoi le gouvernement refuse-t-il donc de reconnaître cette agression '»
Nul ne doute que les différends entre les membres de la commission d'enquête sur les incidents du 4 décembre 2012 ont une portée politique évidente et traduisent une lutte d'influence sur la scène politique en Tunisie. La centrale syndicale a toujours été l'une des composantes de la lutte pour la démocratie, voire la composante fondamentale. Ses locaux ont joué le rôle de relais pendant la révolution du 17 décembre 2010/14 janvier 2011.
Lutte d'influence
L'UGTT continue par ailleurs d'avoir du poids sur la scène sociopolitique, ce qui déplaît au parti Ennahda. Les islamistes voient en effet d'un mauvais 'il le fait que cette structure importante soit dominée par des laïcs, ce qui est pourtant dans la logique des choses de par la nature même du mouvement syndical. Donc, pour avoir un soupçon d'influence sur la centrale syndicale, le parti Ennahda a appelé ses sympathisants au sein de l'UGTT à faire entendre leur voix.
Ces derniers ont choisi la date du 4 décembre 2012 pour se rassembler et souligner leur démarcation par rapport à la direction syndicale. Le «front de réforme syndicale» a donc appelé à un rassemblement pour exiger «l'épuration des structures» et réclamer «la destitution de Abbassi». Comme les syndicalistes islamistes étaient faibles, ils ont demandé le soutien des Ligues de protection de la révolution (LPR), structures jouant le rôle d'une milice parallèle au service des intérêts du gouvernement de la troïka.
C'est ce que les vidéos des incidents ont clairement montré.
Or, le parti Ennahda ne veut pas reconnaître ce lien quasi organique entre ses structures et les LPR. Lequel lien constitue la traduction sur le terrain de la thèse de Rached Ghannouchi sur «les bousculades sociales». «C'est le terrain qui impose son rythme à la société», a régulièrement rappelé le leader d'Ennahda. En termes pratiques, pour le cas d'espèce, ce sont ces Ligues de protection de la révolution qui sont descendues dans la rue pour marquer sa présence et imposer ses règles à l'UGTT, «par la violence», a indiqué Sami Tahri, porte-parole de l'UGTT.
«Or, les islamistes oublient qu'ils sont face à une organisation militante, qui s'est forgée dans la lutte pour la démocratie et ne saurait être intimidée par de tels agissements», a-t-il rappelé. Les incidents du 4 décembre 2012 constituent une première tentative des islamistes pour s'imposer dans l'une des structures-clés du mouvement démocratique. Mais Ennahda ne saurait reconnaître cela.


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