Tout en examinant le tableau de bord de sa wilaya, cadran par cadran, et en prenant en main les dossiers urgents tel que celui de l'eau, le nouveau wali d'Oran se projette déjà dans le (quasi certain) plan de modernisation d'Oran. Dans cette perspective, il est capital de dégager dès à présent un portefeuille foncier à haute valeur, le support physique du plan. En prime, il faut mettre hors de portée du moins ce qui reste du littoral. La révision de certains plans d'aménagement s'impose aussi.
La déclaration, lundi 16 décembre, par le président de la République lors de la séance de présentation du plan de modernisation d'Alger que «nous passerons à d'autres wilayas» faisait forcément d'Oran une «étape suivante» plus que probable. Une évidence qui coulait de source, même. Comme il fallait logiquement s'y attendre, ce sujet s'est invité au menu de la rencontre wali-presse, où le premier chef de l'exécutif local, Samir Chibani, a eu à surfer sur plusieurs thèmes au gré des questions. «Certainement», a-t-il anticipé d'emblée. «Nous avons suivi avec un intérêt particulier l'exposé du plan de modernisation de la capitale fait devant le président de la République. Certainement, il y aura un plan similaire pour Oran comme pour Constantine et Annaba. On s'y prépare d'ores et déjà». En prévision d'un tel schéma fondé sur une vision stratégique du développement et de modernisation d'Oran pour la hisser au rang des grandes villes méditerranéennes, la wilaya s'attèle à réunir les conditions fondamentales à sa mise en Å“uvre. Au premier rang desquelles, la disponibilité du foncier. Sans le foncier, en effet, le développement ne serait qu'un vain mot.
PRÉSERVER LE PEU DE FONCIER APPROPRIÉ QUI RESTE
On peut légitimement supposer que l'Etat va conditionner l'éligibilité des villes potentiellement candidates à pareil dispositif de modernisation par les offres foncières qu'elles proposeront. Le wali d'Oran semble prendre toute la mesure de cette corrélation modernisation-foncier. «Oran sera immanquablement la 2ème étape. Peut-être même dans peu de temps. Nous allons mettre de côté une batterie de terrains vierges d'une certaine valeur immobilière. On ne peut pas tout gaspiller dans l'HLM et le cubisme. Pas plus tard qu'en début de cet après-midi, j'étais à Aïn El-Turck pour la pose de la première pierre d'un bloc UMC, où j'ai trouvé anormal qu'on ait réservé 4.000 m² à la construction sur une superficie globale de 25.000 m² (soit un coefficient d'emprise au sol de 16%). Un gaspillage pur et simple de l'espace. Hier, j'ai eu à visiter le projet de l'Institut du cancer et là aussi c'était la même chose. J'ai toujours insisté, et aujourd'hui plus que jamais, sur l'utilisation rationnelle du foncier. C'est une denrée rare, un terrain utilisé est un terrain irrécupérable. D'où mon insistance sur la phase cruciale d'étude. Quand on laisse un BET seul en scène, il y a risque de dégâts, l'austérité dans l'usage du foncier étant son dernier souci». Si pour Samir Chibani il faut donc veiller au grain sur les (quelques) réserves foncières encore libres dans l'optique de leur intégration dans les schémas du plan de modernisation à venir, rien à faire en revanche là où le mal est déjà fait. Sur les sites et îlots de sites déjà gâchés par l'urbanisme tous azimuts, à l'image du prolongement du Front de mer côté Est de la ville, pratiquement de Gambetta jusqu'à Canastel en passant par Fernand-ville, avec ce fourre-tout de logements publics de tout acabit et de promotions immobilières bas de gamme et, à la clé, une mosaïque architecturale hétérogène, décousue et désordonnée qui trahit pour le moins une simplicité d'esprit des deux côtés du guichet unique. Ce à quoi sont venus se greffer, chemin faisant, le simplisme et l'amateurisme des espaces verts version jardin citadin à base de fiche technique copier/coller (le même prototype reconduit à base de quelques palmiers washingtonia, acacias et platanes, assortis d'une cascade ou d'un petit lac artificiel plus un terrain combiné avec balançoires, toboggans et jeux gonflables pour parachever le décor) vendus à l'opinion publique comme étant l'Å“uvre d'experts paysagistes spécialistes en jardins botanistes, qui ont happé plusieurs dizaines d'hectares au nom de la verdure et des vertus de la verdure en milieu urbain.
LA VISION DE TEBBOUNE POUR LA FRANGE MARITIME D'ORAN-VILLE
Mais l'heure n'est plus aux lamentations et aux cris de cÅ“ur, ni à la critique rétrospective d'ailleurs, et il faut prioritairement sauver ce qui reste… en bas. C'est-à-dire sur la plage et l'arrière-plage créées sur son passage par la pénétrante portuaire. Ce potentiel haut-lieu du futur «plan bleu» d'Oran – pour reprendre la même terminologie des éléments-clés dont est constitué le plan de modernisation de la capitale – qui aura à rétablir la liaison ombilicale reliant la ville à sa mer. Et, puisque nous y sommes, doit-on rappeler une fois encore les petites confidences, faites depuis la tribune de l'hémicycle au détour d'un conseil exécutif, par le wali d'Oran d'alors, Saïd Sayoud, à propos de la petite conversation qu'il avait eue avec le président de la République sur les perspectives de développement et de modernisation d'Oran côté mer dans le sillage de l'ouverture de la pénétrante du port. Présent à Oran le 25 août dernier pour y animer un meeting électoral, le candidat à sa propre succession, Abdelmadjid Tebboune, avait eu une longue conversation avec le wali d'Oran au cours de laquelle le sujet d'actualité locale d'alors, la pénétrante portuaire, avait servi de thème d'échange entre les deux hommes. Les perspectives de la ville d'Oran côté façade maritime, sur les plans urbanistique et touristique essentiellement, avaient été longuement abordées lors de cette entrevue, selon les confidences de M. Sayoud, qui a révélé avoir été subjugué par la subtilité et l'originalité de la vision du Président dans ce registre précis. Toujours est-il que l'on retient aussi de ces mêmes révélations que le chef d'Etat ne voyait pas d'un bon Å“il certaines choses qui avaient été faites sur la frange perchée de la ville donnant vue sur mer, dont à titre d'exemple «les multiples petits bâtiments tant en termes de hauteur qu'en terme de design, dans le cadre d'une promotion immobilière mal pensée, et même contre-indiquée en ce sens qu'elle n'avait pas lieu d'être en cet endroit censé être réservé pour le très haut standing incarnant la métropolisation avec à la clé une architecture futuriste et un mode de construction-fonctionnement digne des villes intelligentes».
UN PROJET DE MARINA AU FOUR POINTS EN GUISE DE PREMIER JALON
Se voulant optimiste malgré les séquelles indélébiles et faisant contre mauvaise fortune bon cÅ“ur, l'actuel wali est formel : «La modernisation viendra à coup sûr. A nous de préparer le terrain (au sens propre comme au figuré)». Pour lui, «le social et le promotionnel d'aspect commercial n'ont rien à faire près de la mer. Le littoral a ses spécificités. Il est surprenant qu'Oran n'ait pas une marina comme par exemple les villes (tunisiennes) de Sousse, Hammamet ou Djerba». Il a annoncé qu'une séance de présentation – préférentiellement sur site pour mettre l'image en réel sur le plan 3D virtuel – du projet d'une marina aura lieu prochainement pour lever le voile sur ce grand investissement de la Société d'investissement hôtelière (SIH) propriétaire de l'hôtel Sheraton Towers et Four Points. L'on sait d'ores et déjà qu'un petit port de plaisance et de sports nautiques, une plage artificielle et une station de thalassothérapie font partie du complexe projeté sur une concession octroyée à cette SPA en contrebas de son hôtel Four Points by Sheraton, à hauteur duquel d'ailleurs est connectée la pénétrante portuaire avec le Centre-ville. Faisant à juste titre le lien entre la réhabilitation du vieux bâti de la ville – et plus en particulier le quartier de Sidi El-Houari – et le plan de modernisation d'Oran, le wali a soulevé nombres de problématiques communes presque à tous les vieux quartiers à travers le pays. «Il y a surtout la complexité du cadre juridique. On y trouve trois modes de propriété interférentes : les parties communes, les parties privatives exclusives de chaque copropriétaire et les parties mises en location par l'OPGI. Pour ce dernier segment, pas de problème : on reloge (logement public locatif LPL) et on détruit aussitôt. Une sorte de parallélisme de formes. Mais le vrai casse-tête, ce sont les propriétés privées et notamment les commerces. Là, l'acte de démolir est extrêmement coûteux en ce qu'il contient comme lourdes indemnisations. Une sacrée facture pour le Trésor public. Et j'en connais un rayon pour avoir eu à gérer un cas d'espèce dans un village à Skikda (il était chef de daïra d'El Harrouch alors) qui s'est traduit par une note salée en termes de logements à affecter et d'indemnisations à verser et de tas de tracasseries de squats, d'indus-occupants et d'actions en justice.
LA VIEILLE VILLE ET LE CAS SINGULIER DE SIDI EL-HOUARI
Si les anciens quartiers de Hamou Boutlélis et de Derb – pour ne citer que ces deux sites programmés à brève échéance – sont certes compliqués à traiter dans le cadre du processus urbain de réhabilitation-restructuration, le cas de Sidi El-Houari s'avère de plusieurs crans encore plus problématique. La promulgation de ce vieux quartier comme secteur sauvegardé par décret exécutif n° 15-13 du 22 janvier 2015, portant création et délimitation du secteur sauvegardé de la vieille ville de Sidi El-Houari, suivie par la désignation d'un bureau d'études ayant pour tâche d'établir un plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé (PPSMVSS), puis le gel de l'opération et son dégel quelques années après et la relance du projet par le choix d'un autre BET… autant de péripéties qui sont de nature à temporiser toute action en attendant d'y voir plus clair. La possibilité quasi évidente d'un futur plan présidentiel pour la modernisation d'Oran est un motif supplémentaire, bien plus pesant celui-ci, de temporisation. Rien n'exclut en fait l'éventualité de la prise au profit de Sidi El-Houari d'une décision par la présidence de la République similaire à celle ayant visé la Casbah d'Alger consistant à l'intervention de l'Etat pour l'acquisition des bâtisses appartenant à des particuliers et leur incorporation dans le Domaine national. Cela, s'il devait être décrété, réglerait une bonne partie du problème. Dans un autre registre, mais qui n'est pas tout de même sans rapport avec le développement et la modernisation du Grand Oran, le wali Samir Chibani, en réponse à une question de savoir s'il y avait une idée particulière qui effleurait son esprit et lui tenait à cÅ“ur «en visiteur» d'Oran et qui s'est muée en une sorte de challenge personnel pour lui aujourd'hui qu'il est wali de cette ville, a poussé un long soupir avant de lâcher : «Oui, il y en a une : la réalisation d'une autoroute Sud-Ouest».
AUTOROUTE SUD-OUEST : LE PROJET DE CHIBANI POUR ÉQUILIBRER ET HOMOGÉNÉISER
Et d'expliciter : «Quand je venais souvent à Oran, je ne pouvais me libérer d'une pensée récursive et presque obsessionnelle, en l'occurrence que je devais toujours passer bon gré mal gré par le Nord pour me rendre en chef-lieu. Je m'imaginais emprunter un trajet virtuel via le côté sud pour rejoindre la ville côté ouest, non sans me poser la question pourquoi n'a-t-on pas songé à un tel itinéraire apparemment si évident. Et maintenant que je suis wali d'Oran, j'y songe. Très sérieusement même. Je vais m'y mettre bientôt. Voyez-vous, une autoroute qui passe par l'arrière-pays de la ville côtière pour nous emmener à l'autre bout via un chemin excentré et peu fréquenté loin de la circulation étouffante et accablante de la ville côté mer. Une nouvelle rocade de 15 à 20 kilomètres qui ouvrira sur son passage des perspectives pour toute une région en retrait, y apportera une nouvelle dynamique socioculturelle et insérera des espaces jusque-là marginalisés dans le développement local. Car la route est bien plus qu'une voie de transport et de communication, c'est aussi un vecteur d'intégration régionale et de développement socioéconomique. C'est également, un instrument d'équilibrage du territoire, y compris à l'échelle interne d'une même wilaya. C'est cela mon idée-force, ma vision, en ce qui concerne ce projet d'une boucle autoroutière Sud-Ouest pour Oran », a expliqué le wali d'Oran, Samir Chibani.
Houari Saadia
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Posté par : presse-algerie
Ecrit par : l'Histoire
Source : www.lequotidien-oran.com