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du dimanche 11 juillet au dimanche 25 juillet

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Et si, cette année, vous faisiez une bonne cure d’art ? Car les études sont formelles : les visites au musée, l’art-thérapie ou la simple contemplation d’œuvres nous font du bien. Mais quels sont vraiment les bienfaits de l’art sur la santé ? Par quels mécanismes agit-il ? Faut-il le prescrire ?



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L’art est-il bon pour la santé ?



Et si, cette année, vous faisiez une bonne cure d’art ? Car les études sont formelles : les visites au musée, l’art-thérapie ou la simple contemplation d’œuvres nous font du bien.

Mais quels sont vraiment les bienfaits de l’art sur la santé ?

Par quels mécanismes agit-il ?

Faut-il le prescrire ?



Matisse, Monet ou Kandinsky, deux fois par semaine. Le tout, sur ordonnance ! Depuis cet hiver, à Montréal, aller au musée peut vous être prescrit par votre médecin. Fruit d’une entente entre l’organisme Médecins francophones du Canada et le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), l’idée du programme d’ordonnances muséales est de permettre, gratuitement, aux patients et à leurs proches aidants de profiter des bienfaits de l’art sur la santé. « Il y a un siècle, les gens n’étaient pas persuadés que le sport était bon pour la santé. Nous nous trouvons dans le même cas de figure aujourd’hui avec les œuvres d’art », affirme Nathalie Bondil, directrice et conservatrice en chef du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM), très actif sur ces questions.



La devise du musée résume l’approche : « L’art fait du bien. Mais il peut aussi soigner. » À n’en pas douter ! Depuis une trentaine d’années, en France, de nombreuses structures de santé partagent ce constat avec l’art-thérapie, qui reste encore méconnue. En utilisant toutes les formes artistiques (par exemple le dessin pour les plus jeunes, la photo et la vidéo pour les personnes âgées), l’art-thérapie améliore l’humeur du patient, lui permet de réduire sa dose de médicaments, et réduit sa convalescence. Mais que se passe-t-il concrètement dans notre cerveau ? Par quels mécanismes l’art agit-il sur notre santé ?



1. Face à une œuvre d’art, nous activons notre système de récompense

Jean-Pierre Changeux, neurobiologiste et professeur au Collège de France, est le premier à avoir décrypté les mécanismes neuronaux dans l’appréciation de la beauté (Du vrai, du beau, du bien, éditions Odile Jacob). Que se passe-t-il donc dans notre tête ? Au départ, notre cerveau perçoit une œuvre d’art comme n’importe quel objet… Sauf que la surface de l’œuvre va refléter de la lumière. C’est là que le beau engendre quelque chose d’assez unique, constate Jean-Pierre Changeux : « Il y a la transformation par la rétine des radiations lumineuses en signaux électriques qui se propagent dans notre cerveau, du cortex visuel au cortex préfrontal, déclenchant une inondation de dopamine… l’hormone du plaisir ! » Les circuits des émotions s’activent. La contemplation d’une œuvre d’art fonctionne comme une récompense. « Le beau est essentiel à l’être humain parce qu’il nous fait du bien », rappelle le spécialiste.



2. L’art réveille notre empathie

D’après Platon, « le premier bien est la santé, le deuxième la beauté » (Lois II, 22). Les études en neurosciences de ces dernières années ont confirmé les intuitions des philosophes de l’Antiquité : regarder une œuvre d’art, faire de la musique, a des effets directs sur notre cerveau. Pour Pierre Lemarquis, neurologue, tout se passe comme si « l’art nous caressait le cerveau ». Son ouvrage, Portrait du cerveau en artiste, explique que la contemplation d’une œuvre d’art sollicite le cortex frontal, siège de la raison (lorsque nous cherchons à comprendre une installation d’art contemporain, par exemple). Si celle-ci nous plaît, notre cerveau augmente la luminosité, le contraste et les couleurs pour en profiter pleinement. Très vite, nous réveillons nos neurones miroirs, c’est-à-dire nos neurones de l’empathie. Plus étonnant encore, le gyrus fusiforme bilatéral s’active aussi. C’est la zone impliquée dans la reconnaissance des visages : on voit un beau tableau comme on voit une personne aimée ! Tout cela se ressent sur notre santé. Récemment, une enquête de chercheurs de l’University College de Londres, publiée dans le British Journal of Psychiatry, concluait ainsi que les visites culturelles réduisent les risques de souffrir de dépression au cours de la vie : 32 % de risques en moins de tomber en dépression en devenant sénior, quand on se rend au cinéma, au théâtre ou au musée plusieurs fois par an. Le chiffre grimpe à 48 % de risques en moins pour ceux qui s’y rendent une fois par mois ou plus.



3. L’art stimule les émotions et la motricité

Les hôpitaux sont de plus en plus nombreux à éprouver scientifiquement les bienfaits de l’art. Pionnière dans ce domaine : la ville de Tours, où la faculté de médecine et le centre hospitalier proposent des ateliers d’art-thérapie. Tours est aussi le berceau de l’École d’art-thérapie (Afratapem), dont les enseignements sont diffusés à Grenoble, Lille mais aussi en Corée et qui permet d’obtenir un titre officiel d’art-thérapeute reconnu par l’État. Avec cette nuance : l’art-thérapie traditionnelle est une spécialité qui fait partie du champ de la psychologie et l’art-thérapie moderne est une discipline qui fait partie du champ du paramédical. La profession est en expansion : « Aujourd’hui, vous avez de l’art-thérapie dans tous les milieux, aussi bien dans les services de gériatrie que dans le milieu carcéral, ou dans l’aide aux sans-domicile fixe », abonde Richard Forestier, fondateur de l’école de Tours.



L’art-thérapie répond en effet à des personnes ayant des problèmes aussi divers que l’autisme, les troubles de l’alimentation, la schizophrénie, l’anxiété, la dépression, le cancer ou la maladie d’Alzheimer. Cette maladie neurodégénérative est au cœur de l’action de l’association ARTZ, fondée il y a onze ans à Paris et aujourd’hui étendue à Lausanne en Suisse : « ARTZ est un projet basé sur la stimulation cognitive en vue de révéler les facultés persistantes des malades, tout en soutenant leur estime de soi », explique Cindy Barotte, sociologue et directrice de l’association. Concrètement, grâce à leurs bénévoles qui accompagnent (et raccompagnent) les patients atteints d’Alzheimer, ces derniers bénéficient d’une visite adaptée dans les salles de six musées partenaires, dont le musée du Louvre, le musée du Quai Branly-Jacques Chirac et le château de Versailles. Stimulés, soutenus, encouragés à s’exprimer, les souvenirs affleurent.



4. L’art restaure la confiance en soi

L’art est une expérience qui agit à plusieurs niveaux. En plus de stimuler les émotions et la motricité, le contact avec la beauté, avec l’ouverture au monde qu’elle offre, restaure la confiance en soi. Spécialiste des troubles de l’alimentation à l’hôpital Douglas de Montréal, Howard Steiger a mené il y a deux ans une expérience afin d’évaluer l’impact d’une visite au Musée des beaux-arts de Montréal chez des personnes souffrant d’anorexie ou de boulimie, à travers un parcours spécifique parmi les œuvres, ponctué d’une pause repas et d’un atelier créatif. Les résultats de l’expérience ont été publiés dans le journal The Arts of Psychotherapy : si la visite n’a pas eu d’effets notables sur les symptômes de leur trouble alimentaire, elle a réduit le niveau d’anxiété des participants – plusieurs d’entre elles jugeant que l’atelier de création, au cours duquel elles pouvaient expérimenter des matériaux, sans pression de performance, était le plus beau moment de leur journée.



5. Du rôle des couleurs et de la lumière

Couleurs et lumière : ces deux composantes de l’œuvre d’art ont une influence notable sur notre santé. Dès 1903, les effets thérapeutiques de la lumière ont été récompensés par le Nobel de médecine attribué au Danois Niels Ryberg Finsen, débouchant sur la luminothérapie, que nos voisins du Nord connaissent bien pour traiter les dépressions saisonnières et les insomnies. Puissant régulateur de nos hormones, telle la mélatonine, et de nos nutriments, comme la vitamine D, la lumière a un impact majeur sur le corps, l’esprit et le comportement. Les couleurs, elles, agissent sur notre perception sensorielle. C’est le constat que faisait Léonard de Vinci il y a cinq cents ans, débusquant dans les couleurs opposées un système apaisant… Une trouvaille que la science va décrire en 1956 sous le nom de « loi des contrastes » : les cellules du système visuel qui sont excitées par le rouge sont inhibées par le vert, celles excitées par le jaune sont inhibées par le bleu, et celles excitées par le blanc sont inhibées par le noir (et inversement). De là à imaginer « une cure par les couleurs » prônée par Fernand Léger avec son décor pour l’hôpital de Saint-Lô, ou à comparer comme Matisse un tableau à « un bon fauteuil qui délasse de ses fatigues »…



Plus d’excuses, sans attendre de prescription, cette année on file au musée.



Par Malika Bauwens, BeauxArts

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