Algérie

En attendant le prix du ticket de métro



L'imposition de la taxe sur les transactions de véhicules neufs (TTVN) semble avoir été décidée sans évaluation d'aucune de ses incidences ni sur le marché encore moins sur le consommateur moyen.

Si aucune valeur aussi approximative soit-elle n'a encore été fixée au ticket de métro ou du tramway, sur quelles bases alors les financiers ont-ils arrêté le niveau de la taxe sur les transactions de véhicules neufs ? La question s'impose dans la mesure où le législateur justifie l'imposition de cette nouvelle taxe par le besoin d'alimenter un fonds spécial pour le soutien au ticket de ces deux moyens de transport dont la réalisation est loin d'aboutir. Interrogé sur le prix du ticket, le ministre des Transports n'a pu en outre en donner aucune approximation. C'est dire que la chose «économique» évolue au gré des humeurs de politiques qui semblent ne lui maîtriser aucune conjoncture. Des politiques qui font ainsi dans l'aberration quand ils justifient l'imposition d'une telle taxe par la nécessité de l'Etat de soutenir financièrement un ticket au prix inconnu pour des transports inexistants. Au regard des travaux de leur réalisation, ces transports fonctionneront bien un jour. Mais pour l'heure, c'est à coup «d'Inchallah» que les gestionnaires des affaires de l'Etat évoquent vaguement l'échéance de 2009.

Des responsables d'importantes institutions de l'Etat estiment que cette taxe répondrait au souci d'alléger les seuls désagréments des bouchons qui rendent les voies de circulation infernales. Le législateur aurait pensé qu'en imposant une taxe aussi lourde, le nombre de véhicules diminuerait et le trafic routier deviendrait fluide. L'approche n'est pas mauvaise si elle avait été retenue avant l'ouverture du marché de l'automobile. Les ventes de véhicules auraient été effectuées selon les capacités des routes nationales à les absorber sans les voir s'agglutiner quotidiennement y compris sur le périphérique algérois. Il est connu que les étranglements en matière de circulation routière sont la résultante de voies défectueuses, de mauvaise conduite, d'accidents de la route, de travaux désorganisés et bien sûr de barrages de services de sécurité plantés en général en plein milieu de routes à grande circulation. A la vue d'un uniforme debout entre les voies bleue, blanche et jaune, les automobilistes réduisent la vitesse pour rouler en première deuxième. Le trafic bloque de fait, du périphérique au centre-ville de la capitale. Et l'imposition d'une nouvelle taxe ne changera rien à cette situation de débandade institutionnelle et de déroute politique.

Ce qui est vrai c'est que dès le mois en cours, période d'entrée en vigueur de la TTVN, la première incidence est une chute des ventes des véhicules. C'est en fait deux incidences en une parce que selon les concessionnaires, beaucoup de demandes d'achat ont été retirées à cause de ces frais supplémentaires. La mévente des véhicules les inquiète donc sérieusement, mais le 1% de taxe qu'ils doivent désormais à l'Etat est jugé futile. Ceci étant, ils font d'une pierre deux coups et demandent aux responsables de reporter l'application de cette taxe pour qu'ils puissent gérer les dossiers des acheteurs en suspens. Les acheteurs, eux, peineraient à revendiquer quoi que ce soit en l'absence de recours légal ou d'instruments de substitution sur lesquels ils se rabattraient si le véhicule, neuf ou d'occasion, devient désormais hors de leur portée. Ce sont donc les concessionnaires qui gagnent le plus pour payer le moins face à des acquéreurs qui paient le plus dans tous les cas de figure. Une taxe de 50.000 à 150.000 dinars imposable aux seconds contre 1% sur le chiffre d'affaires pour les premiers, la comparaison est impensable. C'est peut-être la première fois qu'une disposition soit aussi rapidement publiée dans le Journal officiel pour devenir très vite exécutoire.

Et l'autre incidence, l'augmentation inévitable des prix des voitures d'occasion. L'on se rappelle que l'installation d'une multitude de concessionnaires de voitures en Algérie a été permise surtout pour rajeunir et moderniser le parc national. C'est ce qui a été fait en un laps de temps très court. Un retour à la position initiale peut cependant être très vite opéré. Si les voitures neuves deviennent inaccessibles, il est évident que ce sont celles d'occasion qui prendraient le relais dans les années à venir. Ce n'est pas la première fois que les politiques font des volte-face qui coûtent cher à la nation et font perdre du temps et de l'énergie au pays. Le gouvernement est, faut-il le dire, revenu récemment aux anciennes dispositions des textes régissant les marchés publics. Le président de la République en personne a interdit l'option du gré à gré dans l'octroi de marchés mais elle est régulièrement retenue dans des opérations diverses comme par exemple la construction d'infrastructures culturelles.

Le gouvernement vient de prendre d'autres mesures pour les contredire quotidiennement. Ahmed Ouyahia a en effet signé récemment une instruction par laquelle il fait savoir aux médias publics qu'ils ne sont pas obligés de couvrir toutes les activités des ministres. Par contre, il leur demande d'assurer une couverture régulière au point de presse de Boukerzaza, le ministre de la Communication. Il n'y a pas un jour où la télévision nationale ne filme un Amar Ghoul en train d'arpenter les routes non encore construites. Le chef du gouvernement a aussi ordonné à ses ministres de ne pas dénigrer l'action l'un de l'autre. «Celui qui a envie de le faire, qu'il s'en abstienne», leur a-t-il dit. Des débâcles d'un système vieillissant, l'Algérie en retiendra beaucoup. Comme celles de voir ses ministres faire des signes de la main à des voyageurs ou remplir leurs poches de pistaches. Mais celles-ci sont plutôt pour rire contrairement à beaucoup d'autres qui la font pleurer à chaudes larmes.




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