Algérie

Emeutes, affrontements et arrestations d'un cèté, vote à sens unique de l'autre



Emeutes, affrontements et arrestations d'un cèté, vote à sens unique de l'autre
A Bouira, les élections se suivent et se ressemblent : d'un cèté, une région berbérophone à caractère rebelle, toujours hostile au pouvoir et à tout ce qui le symbolise, et de l'autre, une région arabophone, habituée à soutenir le pouvoir quelles que soient sa nature et sa couleur et peu encline à tout ce qui sent la rébellion.Yazid Yahiaoui - Bouira (Le Soir)Ce jeudi, à l'occasion de l'élection présidentielle, le même décor que l'on a toujours vu dans la wilaya a été une nouvelle fois planté : d'un cèté la région berbérophone qui s'étend sur toute la région Est de la wilaya, dont les populations ont vécu une journée très mouvementée et très corsée par moments à travers pratiquement toutes les communes, et de l'autre, une région ouest et nord-ouest qui a vécu une journée des plus calmes avec un vote qui s'est déroulé en l'absence des observateurs des candidats dans la majeure partie des centres de vote, presque à sens unique en faveur du candidat-président.Cela étant, pour la journée de ce jeudi, tout a commencé le matin avec des affrontements au niveau de la commune de M'chédallah et celle de Saharidj. A M'chédallah, c'est dans le village de Raffour que les émeutes avaient éclaté dès l'aube, aux environs de 3 heures du matin, juste à l'arrivée des renforts des forces anti-émeute de la gendarmerie, dépêchées sur les lieux avant l'arrivée des urnes, pour sécuriser le centre de vote du village qui compte plus de 6 000 inscrits.Les jeunes qui étaient sur place, ont, dès l'arrivée des CNS, commencé à les bombarder par des jets de pierres. Ce fut le début des émeutes qui se poursuivront pendant toute la journée de jeudi jusqu'à minuit passé. Pendant toute la journée de jeudi, alors que les urnes n'ont même pas été installées au niveau de ce centre, les émeutes n'ont pas cessé et l'on a dénombré des dizaines de blessés parmi les gendarmes et les manifestants. Lors de notre arrivée sur les lieux aux environs de 10 heures du matin, nous avons été accueillis par l'odeur suffocante des bombes lacrymogènes qui ont rendu l'air irrespirable. A un moment, alors que nous étions en train de prendre des photos des jeunes manifestants qui étaient face aux forces antiémeutes, nous avons été surpris par une avalanche de bombes lacrymogènes lancées simultanément par les éléments antiémeutes et la gendarmerie. L'intensité des gaz lacrymogènes nous a presque coupé le souffle, en même temps que la vue. Heureusement que les jeunes habitués à ces gaz ont accouru vers nous, munis de bouteilles de vinaigre, remède très efficace contre ces gaz.Cela étant, sur place, les émeutiers nous parlent de plusieurs blessés de part et d'autres, et nous-mêmes, avons assisté à des scènes d'affrontements où les jeunes et les éléments des forces antiémeutes se lançaient des pierres à l'aide de frondes.Plus tard, lors de notre déplacement vers l'hèpital de M'chédallah, nous avons retrouvé plusieurs gendarmes blessés, qui à la tête, qui au niveau des jambes mais, ceux-ci avaient refusé de nous parler. Nous avons laissé le village Raffour dont le décor s'est poursuivi tout au long de la journée. Au chef-lieu de M'chédallah, nous avons, après notre passage à l'hèpital, assisté aux tentatives des jeunes de s'attaquer à l'unique centre de vote situé à l'école Lamri Abdallah. Le chef de Sûreté de daïra, présent sur les lieux, essayait de dissuader les jeunes de quitter les lieux et laisser aux gens le libre choix. Pendant plusieurs heures, les jeunes tentaient de foncer le dispositif de sécurité mis en place devant ce centre, idéalement placé entre deux rues au fond d'un cul de sac, ce qui a facilité sa protection par la police. Finalement, après plusieurs tentatives, les jeunes ont quitté les lieux et les citoyens ont pu voter librement. Ce ne sera pas la même chose pour les autres centres de vote situés dans les villages de Bouaklane, Boumedjbar, Assif Assemadh et Ath-Yekhlef, qui seront tous saccagés par les jeunes, même si celui de Boumedjbar sera rouvert à nouveau durant l'après-midi.A Saharidj également, après le saccage des deux centres de vote du chef-lieu et celui des Ath-Oualbane, les deux premiers avaient été rouverts mais sous un air d'émeutes qui ont duré tout l'après-midi et qui se sont soldées par plusieurs blessés de part et d'autres.Aux environs de 14 heures, après avoir quitté la daïra de M'chédallah, nous avons mis le cap sur la commune de Haïzer où nous avons assisté à une bataille rangée entre les jeunes qui lançaient des pierres sur des policiers déployés devant le centre de vote où les gens, malgré ces affrontements, entraient à l'intérieur pour voter. Les affrontements se sont poursuivis durant tout l'après-midi et dans la soirée, l'on nous a annoncé l'arrestation de 15 jeunes qui étaient acheminés vers le siège de la Sûreté de wilaya, où ils sont toujours maintenus jusqu'à l'heure où nous écrivions ces lignes, c'est-à -dire, vendredi après-midi.Après Haïzer, nous avons pris la destination de la commune d'Aïn Bessem. Là , et à l'instar des autres communes de cette région ouest de la wilaya, c'est un autre décor opposé : point d'émeutes ni de tension. Au niveau du centre Taleb Saed qui compte 5 110 inscrits, les élections se déroulaient normalement et le taux de participation à notre passage à 16 heures, était de 30%. Enfin normalement puisque, à notre grand étonnement, lorsque nous avons interrogé une personne sur place quelle est la tendance, celle-ci s'est montrée presque étonnée, en nous répondant simplement : «Mais, pour Bouteflika. Pour qui voulez-vous que les gens voteraient '» La messe était dite.De retour à Bouira, nous avons sillonné certains centres de vote du chef-lieu et là aussi, nous avons été frappés par l'absence des représentants des candidats, et plus, par l'absence des représentants de Benflis qui a promis la mobilisation des observateurs dans la quasi-totalité des bureaux de vote.Entre-temps, alors que la wilaya annonçait la prolongation des délais de fermeture des bureaux de vote jusqu'à 20 heures pour 14 communes, alors que la majorité des observateurs expliquait ces prolongations par la volonté manifeste de l'administration de gonfler le taux de participation et de bourrer les urnes en faveur du candidat-président, l'on nous annonçait des émeutes qui venaient d'éclater à El-Esnam avec des affrontements entre des dizaines de jeunes et les forces antiémeutes de la police, affrontements qui se sont soldés par l'arrestation de deux jeunes acheminés vers Bouira et détenus aux cètés de ceux de Haïzer jusqu'à ce vendredi ; ainsi que le saccage des urnes au niveau du centre de vote du village Ichihane à Bechloul, et enfin, un des affrontements et le saccage des urnes au centre du Technicum de Chorfa, au centre du village Ath-Bouali à Ath-Mansour et enfin, au centre Boubi Ali d'Ahnif. Après la fermeture des bureaux de vote à 20 heures, alors que les partisans du président sortant fêtaient déjà la victoire avec des cortèges de véhicules dans la daïra de M'chédallah, les affrontements se poursuivaient entre les jeunes et les forces antiémeutes de la gendarmerie à M'chédallah, à Raffour et à El-Esnam.Alors que les responsables de la wilaya de Bouira distillaient au compte goutte certaines informations comme par exemple le taux de participation à l'échelle de la wilaya, communiqué aux environs de 22 heures, avec 34,66 % mais sans aucun détail concernant les taux de participation par commune. Plusieurs communes de la région est de la wilaya comptaient encore leurs blessés et même les arrestations : on dénombrait une quarantaine de blessés parmi les manifestants à Raffour et Saharidj, une soixantaine parmi les gendarmes entre ces deux localités, et une trentaine d'arrestations.Hier vendredi matin, alors que l'administration était toujours muette concernant ces détails de participation par communes et les résultats finaux, l'on apprenait du cèté des citoyens que les jeunes arrêtés la veille par les forces antiémeutes de la gendarmerie à Raffour, ont été libérés alors que les 17 manifestants arrêtés par les forces antiémeutes de la police à Haïzer et El-Esnam, sont toujours au niveau de la Sûreté de wilaya. Pendant ce temps, alors qu'aucun résultat officiel n'est communiqué, les partisans du candidat-président nous informent que Bouteflika a glané 78% de voix à l'échelle de la wilaya de Bouira. Aucun chiffre n'est avancé concernant le candidat malheureux Ali Benflis. Quant aux autresâ€?




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