C'est étonnant comme le destin d'un homme ou d'une femme peut basculer sans crier gare. Fatiha, une jeune fille qui habitait, il y a peu de temps, le quartier de Kouchet El-Djir, plus précisément au lieu-dit «Terrain Gazelle», en a fait l'expérience à ses dépends. Pour ceux qui ne s'en souviennent pas ou qui préfèrent volontairement l'amnésie pour ne pas affronter ce que peut être parfois la dure réalité de la vie, Fatiha c'est cette jeune fille sortie à peine de l'enfance dont la mère a tragiquement trouvé la mort, dans la nuit du 26 au 27 novembre dernier, ensevelie sous les décombres... de sa triste vie. Son modeste foyer n'a pas pu résister aux fortes précipitations qu'a connues Oran et ses environs, il y a une quinzaine de jours. Le dernier geste de Feu Belkacem Kheïra, c'est d'avoir veillé à ce que sa fille Fatiha soit bien couverte avant de dormir pour ne pas prendre froid en cette nuit orageuse et glaciale de ce mois de novembre. «Et toi Mma, tu ne dors pas ?» «Non ma fille. Dors toi, moi j'ai pas encore sommeil», répond la mère. Ce sont là les dernières paroles échangées entre la fille et sa mère. Quand les voisins ont réussi enfin à la sortir des décombres, au petit matin, Mme Belkacem était dans sa même posture de la veille : assise, faisant face à sa fille. «Les ultimes moments de sa vie, elle les a passés à veiller sur moi. C'est comme si elle avait un pressentiment qu'un événement tragique allait se produire», se souvient Fatiha. «D'habitude, moi je dors à côté d'elle. Cette nuit là, elle m'a demandé de pousser mon matelas vers l'autre extrémité de la chambre. Pour être le plus loin possible du froid et de la pluie, disait-elle. Finalement c'est du côté du mûr où elle était, que les blocs de pierre ont défoncé la maison», raconte la fille sans pouvoir contenir son émotion. En quelques heures, Fatiha a tout perdu : sa mère, sa maison et son enfance. Tout ce qu'elle garde aujourd'hui de sa vie antérieure, ce sont ses papiers (livret de famille, carte d'identité...) que la mère avait soigneusement caché sur elle, prévoyant certainement le pire. Elle garde aussi une bague de sa mère, retrouvée intacte dans un petit écrin sorti des débris. Tout le reste est irrécupérable. Même ses propres effets vestimentaires n'ont pas échappé aux torrents. Depuis la mort de sa mère, Fatiha est hébergée chez des voisins. Déjà orpheline du père, depuis près de neuf ans, Fatiha a perdu en cette tragique nuit du 26 novembre, l'être le plus cher qu'une jeune fille de son âge peut avoir, sa mère. Certes, Fatiha a des demi-frères du côté paternel, mais comme c'est souvent le cas dans pareilles situations familiales, elle ne partage pas avec eux des liens qu'on pourrait qualifier de très soudés, nous confie-t-elle. Heureusement qu'il y a la famille Belkacem. Une famille qui, jusque-là, a fait preuve de beaucoup de compassion et d'humanité. «On ne peut pas rester indifférent face à une tragédie pareille. Il était de mon devoir d'ouvrir ma maison à cette jeune enfant sans défense, qui vient d'avoir cette année son baccalauréat. Elle a besoin d'être soutenue pour pouvoir se remettre de cette dure épreuve et suivre convenablement ses études à l'université d'Oran où elle est inscrite en première année sociologie. Elle est actuellement avec mes filles qui essayent de lui apporter un soutien moral en cette douleureuse épreuve». Côté solidarité, il y a aussi la directrice du secteur urbain El-Badr qui, selon Fatiha, l'a beaucoup aidée depuis le drame, à titre purement personnel. «A ce jour, les autorités locales sont toujours dans l'expectative concernant mon cas», affirme Fatiha, même si elle garde espoir qu'on se penche sur sa situation dès que les conditions seront favorables. «J'ai essayé de renconter le wali d'Oran pour lui exposer mon cas. Je n'ai pas pu le faire, mais je lui ai laissé une lettre accompagnée des documents administratifs attestant que je suis sans parents ni tuteur pour me prendre en charge», nous confie-t-elle. «J'espère que mon cas sera pris en charge par le wali d'Oran, de la même façon que la famille d'El-Hamri, dont la maison s'est effondrée faisant trois morts, a été prise en charge», ajoute-t-elle. Le wali d'Oran a, pour rappel, exprimé lors de la cérémonie d'installation de l'APW, sa totale solidarité avec les familles endeuillées lors des dernières intempéries, en lançant un appel aux nouveaux élus de placer le dossier du vieux bâti à Oran parmi leurs priorités durant leur mandat.
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Posté Le : 12/12/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : H Barti
Source : www.lequotidien-oran.com