Election de Muhammadu Buhari à la tête du Nigeria

Avec un peu plus de quinze millions de voix, soit 53,9% des suffrages, Muhammadu Buhari, 72 ans, candidat du Congrès progressiste (APC), a été déclaré vainqueur de la présidentielle au Nigeria par la Commission nationale électorale indépendante.Pour le nouveau Président, la quatrième tentative a été la bonne. Candidat malheureux à trois reprises dont la dernière face à M. Jonathan en 2011, il a été déclaré vainqueur de cette présidentielle en remportant 21 Etats, des 36 que compte la fédération nigérienne.Quant à Goodluck Jonathan, 57 ans, président sortant et candidat du Parti démocratique populaire (PDP), il a été crédité de 44,96% des suffrages, soit près de treize millions de voix. Cette présidentielle, qui est l'une des plus serrée qu'a connue le pays, marque un tournant dans l'histoire agitée du plus peuplé des pays d'Afrique. Elle est la première alternance démocratique du pays. Car, jusqu'à présent les dissensions politiques avaient souvent attisé les tensions ethniques et religieuses, entraînant de sanglantes émeutes post-électorales. Cette fois-ci, le vote s'est déroulé dans le calme.Depuis son indépendance en 1960, le pays a connu six coups d'Etat militaires et a été gouverné par le même parti depuis la fin des dictatures militaires, il y a seize ans. Muhammadu Buhari a lui-même un lourd passif de putschiste. S'il se présente aujourd'hui comme «un converti de la démocratie», le nouveau Président avait auparavant dirigé le pays à la faveur d'un coup d'Etat en 1983, avant d'être renversé à son tour par un putsch en 1985. L'ancien général est à la tête d'un pays de plus de 170 millions d'habitants soumis à de fortes tensions entre musulmans et chrétiens. Si la mixité y est officiellement la règle, le pays est divisé entre un Nord majoritairement musulman et un Sud à dominante chrétienne, zone la plus riche grâce aux revenus du pétrole.Depuis quelques années, des troubles religieux ont éclaté entre les deux communautés, essentiellement dans le nord du pays, provoquant des milliers de morts. Depuis mi-2009, le pays est touché quasi quotidiennement par des attaques, attribuées pour la plupart au groupe islamiste Boko Haram, qui avait lancé en 2009 une insurrection sous l'autorité de leur ancien chef Mohammed Yusuf à Maiduguri. L'armée avait brutalement réprimé le soulèvement et environ 800 personnes avaient été tuées. La mosquée ayant servi de quartier général au mouvement avait été rasée et son chef, tué.Mais le groupe continue de lancer des raids meurtriers visant policiers, militaires, hommes politiques ainsi que des responsables communautaires ou religieux. Par ailleurs, si le pays est considéré comme le plus grand producteur de pétrole en Afrique et le onzième dans le monde, il est le seul pays du monde disposant d'importantes ressources pétrolières à présenter un déficit budgétaire. Il a été épinglé par l'organisation non gouvernemental, Global Financial Integrity, en 2010 comme étant le pays, de loin, le plus soumis aux fuites de fonds par des pratiques financières illicites. Le rapport estime que de 1970 à 2009, les fuites de capitaux du Nigeria s'élèvaient à 89,5 milliards de dollars, à un taux moyen de 10 milliards par an.